Ovide (suite)
Simultanément, à partir de 3 apr. J.-C., Ovide s’appliqua, avec les Fastes (Fasti), à chanter suivant l’ordre du calendrier les fêtes religieuses et nationales de Rome. Il n’en écrivit que les six premiers livres, mais si l’œuvre offre un louable souci de documentation, sa valeur poétique est moindre : la curiosité amusée du poète pour des événements vénérables, son manque d’émotion vraie, voire sa désinvolture enlèvent toute force à l’évocation de ce passé légendaire. Et, en fait, le mérite d’Ovide est ailleurs : il réside dans les livres d’élégies des Tristes (Tristia) et des Pontiques (Epistulae ex Ponto), composés sur les bords inhospitaliers du Pont-Euxin (et auxquels il faut ajouter le poème de l’Ibis et un traité sur la pêche, les Halieutiques [Halieutica]). En novembre de l’an 8, en effet, Ovide fut banni par Auguste sous le prétexte de l’immoralité de l’Art d’aimer, plus vraisemblablement en raison de quelque mystérieuse intrigue de palais. C’est de Tomes qu’il envoya régulièrement à Rome ce journal d’un poète exilé, poignant document sur la vie d’un citoyen romain aux confins de l’Empire tout autant que plainte pathétique et directe d’un homme qui laisse parler son cœur. Ces cris jaillis d’une âme blessée, cette nostalgie du sol natal, ces confidences familières, tandis que s’écoulent des heures vides et lugubres sur cette terre barbare, présentent un caractère unique dans la littérature latine. Plus que par ses vers d’amour, finalement monotones en dépit de leur virtuosité, Ovide, au soir de sa vie, sut trouver les accents sincères et émouvants que fait naître la souffrance.
A. M.-B.
G. Lafaye, les Métamorphoses d’Ovide et leurs modèles grecs (Alcan, 1904). / R. Cahen, le Rythme poétique dans les Métamorphoses d’Ovide (Geuthner, 1921). / E. Ripert, Ovide, poète de l’amour, des dieux, et de l’exil (A. Colin, 1922). / E. K. Rand, Ovid and his Influence (Londres, 1926). / F. Peeters, les « Fastes » d’Ovide. Histoire du texte (Van Campenhout, Bruxelles, 1939). / H. F. Frankel, Ovid, a Poet between Two Worlds (Berkeley, 1945 ; nouv. éd., 1969). / G. May, D’Ovide à Racine (P. U. F., 1949). / L. P. Wilkinson, Ovid recalled (Cambridge, 1955). / M. J. Herescu, Ovidiana, recherches sur Ovide (Les Belles Lettres, 1958). / S. Viarre, l’Image et la pensée dans les « Métamorphoses » d’Ovide (P. U. F., 1965 ; Ovide. Essai de lecture poétique (Les Belles Lettres, 1976). / B. Otis, Ovid as an Epic Poet (Cambridge, 1966). / J.-M. Frécaut, Esprit et humour chez Ovide (Presses universitaires de Grenoble, 1972).