vérification

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


De vérifier, du latin verificare.

Philosophie des Sciences

Contrôle de la conformité d'un état de chose donné avec son état supposé. Au sens restreint, fait d'exhiber la vérité d'un énoncé.

Au sens général, comme l'indique G.-G. Granger, « vérifier » signifie autant « confronter un énoncé avec les faits » qu'« examiner une chose pour voir si elle est telle qu'elle doit être »(1). Cet examen peut donc porter sur un état de choses empirique aussi bien que formel, et peut donner un résultat positif aussi bien que négatif.

Dans cette perspective, Fr. Bacon, en valorisant le recours à l'expérience dans le Novum Organum (1620), peut être considéré comme le terminus a quo de la théorie de la vérification expérimentale, retravaillée ensuite par ses successeurs lors de toute construction d'une méthodologie scientifique, comme chez Cl. Bernard.

Dans les sciences formelles, une vérification s'apparente à une démonstration appliquée à un cas particulier. Si la vérification n'est souvent qu'un auxiliaire de la démarche mathématique, elle devient, en revanche, essentielle lorsqu'il s'agit de prouver in concreto l'existence de certains objets mathématiques. C'est pourquoi l'intuitionnisme de Brouwer et Weyl, qui exige que l'on fournisse la preuve de la constructibilité effective des objets mathématiques par un ensemble fini d'opérations, peut être défini comme une exigence de « vérification radicale » dans les domaines formels.

Au sens restreint, un énoncé n'est « vérifié » que dans les cas où il prend la valeur « vrai », par opposition avec la « falsification », qui en exhibe sa fausseté. Ainsi, pour le cercle de Vienne, on ne peut justifier une théorie scientifique que pour autant qu'elle repose sur des énoncés pouvant être « vérifiés ». Cette exigence étant impossible à respecter au pied de la lettre, le principe de vérification a laissé place à un principe de simple « confirmation », celle-ci admettant des degrés, alors que la « vérification » n'en admet pas.

Alexis Bienvenu

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Granger, G.-G., la Vérification, Odile Jacob, Paris, 1992, introduction.
  • Voir aussi : Heyting, A., Intuitionism, an Introduction (1956), Amsterdam, 1971.

→ confirmation (théorie de la), intuitionnisme

Philosophie Cognitive

On dit qu'un énoncé est vérifié si l'on dispose d'une méthode pour établir s'il est vrai. Le vérificationnisme est la thèse selon laquelle le sens du mot « vrai » se réduit à cette propriété de vérification ou de vérifiabilité.

La thèse selon laquelle la vérité d'une proposition se réduit au fait que nous l'avons vérifiée ou à la possibilité pour nous de la vérifier a ses origines dans l'empirisme et dans l'intuitionnisme (par exemple, chez les sceptiques et les épicuriens), ainsi que dans diverses formes de phénoménisme et de positivisme. Mais elle a trouvé son expression contemporaine la plus claire au xxe s. chez les positivistes logiques du cercle de Vienne, qui ont d'abord soutenu une conception vérificationniste de la signification des énoncés : le sens d'un énoncé, c'est sa méthode de vérification. Ces philosophes en déduisent un critère de distinction du sens et du non-sens : les énoncés métaphysiques, en particulier, qui ne donnent lieu à aucune vérification possible, sont des non-sens. Le critère de vérifiabilité a également un sens empiriste clair, car les énoncés empiriques sont les paradigmes des énoncés vérifiables. Les difficultés d'établir un critère net de distinction entre sens et non-sens, et de délimiter ce qui relève de la vérification en principe par rapport à la vérification en pratique, ainsi que le caractère holistique de la vérification (on ne peut difficilement vérifier un énoncé isolé), conduisirent les positivistes à abandonner cette doctrine. Celle-ci survit néanmoins dans les conceptions constructivistes de la logique et des mathématiques, qui tendent à assimiler vérité et démonstration, ainsi que dans les conceptions néo-empiristes ou néo-criticistes de la science contemporaine, en particulier relativement aux interprétations de la mécanique quantique.

Pascal Engel

Notes bibliographiques

  • Ayer, A. J., Langage, vérité, et logique, trad. Flammarion, Paris, 1959.
  • Soulez, A. (éd.), Manifeste du cercle de Vienne, PUF, Paris, 1984.

→ constructivisme, intuitionnisme, positivisme logique, signification, vérité