autonomie

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du grec autos, « soi-même » et nomos, « loi ».


Jusqu'à la fin du xviiie s., le mot appartient surtout à l'histoire ancienne et désigne le droit que les romains avaient laissé à certaines villes grecques de se gouverner par leurs propres lois. Kant fait de l'autonomie de la volonté un concept essentiel de la philosophie morale : « l'autonomie de la volonté est cette propriété qu'à la volonté d'être à elle-même sa loi. »(1).

Philosophie Générale

1. Capacité d'un être vivant à l'autorégulation, au maintien d'une certaine indépendance vis-à-vis du milieu environnant (par exemple, la thermorégulation). – 2. Chez l'homme en tant qu'être doué de raison, la capacité à se donner ses propres lois et à se régir d'après elles.

En ce dernier sens, l'autonomie est bien synonyme de liberté, telle qu'elle est définie par Kant dans les Fondements de la métaphysique des mœurs : « L'autonomie de la volonté est cette propriété qu'a la volonté d'être à elle-même sa loi. ». Elle s'oppose en cela à l'hétéronomie, ou dépendance à l'égard de mobiles pathologiques sensibles ou d'une loi extérieure.

En tant que liberté transcendantale, elle est l'essence de la loi morale, mais elle n'est connue de la raison qu'à travers l'impératif catégorique. L'autonomie est essentiellement la légalité à l'œuvre dans la liberté.

Plus largement, l'autonomie est celle d'une entité ayant un pouvoir de décision propre qui reste indépendant de toute instance supérieure ou extérieure.

Elle concerne spécifiquement l'État souverain, qui s'autoadministre et se gère dans le cadre d'un corpus législatif admis (concernant la politique intérieure autant que les rapports extérieurs aux autres entités politiques).

Mais elle peut être entendue aussi comme autonomie culturelle, religieuse, linguistique, liée au principe de l'autodétermination des peuples, édictée avec la création de la Société des nations, après le premier conflit mondial.

Les revendications de certains groupes, qu'elles reposent sur une assise culturelle, linguistique ou religieuse, peuvent prendre la forme de l'indépendantisme, ou lutte pour la reconnaissance d'une autonomie, se heurtant parfois à la norme de l'instance supérieure qui entend englober ces groupes et les régir (revendication d'un statut d'autonomie régionale aux dépens de l'État).

La difficulté de la notion d'autonomie tient tout entière dans cette cohabitation entre la forme de la loi, du devoir, de la contrainte, et la liberté, l'indépendance qui tend à se délier de toute entrave de la loi (anarchie). L'autonomie au sens kantien qui concilie ces deux points, est bien ce lieu où la liberté se fixe à elle-même ses propres bornes.

Christelle Thomas

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Kant, E., Fondements de la métaphysique des mœurs (1785), 2e section, pp. 169-170, Delagrave, Paris.

→ anarchisme, hétéronomie, liberté

Morale

Fait de n'être soumis qu'aux lois que l'on se donne soi-même.

Définie d'une façon négative, la liberté de la volonté est sa capacité à agir sans être soumise à des lois reçues de l'extérieur ou à des causes extérieures qui la déterminent. Définie positivement, la liberté est la propriété d'une volonté soumise à la loi qu'elle se donne, elle est alors autonomie. L'autonomie de la volonté est le principe suprême de la moralité. Elle permet de comprendre pourquoi il n'y a pas de contradiction entre la liberté, exigée par la moralité comme condition même de la responsabilité morale, et la soumission à l'impératif catégorique également exigée par la moralité. C'est qu'il n'y a de véritable autonomie que si la maxime qui préside à l'action peut-être aussi une loi (puisque l'autonomie est soumission à la loi que l'on se donne soi-même). L'autonomie s'identifie ainsi à l'impératif catégorique qui stipule d'agir uniquement d'après une maxime dont on peut vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle.

« En quoi donc peut bien consister la liberté de la volonté, sinon dans une autonomie, c'est-à-dire dans la propriété qu'elle a d'être à elle-même sa loi. Or cette proposition : la volonté, dans toutes ses actions, est à elle-même sa loi, n'est qu'une autre formule de ce principe : il ne faut agir que d'après une maxime qui puisse aussi se prendre elle-même pour objet à titre de loi universelle. Mais c'est précisément la formule de l'impératif catégorique et le principe de la moralité ; une volonté libre et une volonté soumise à des lois morales sont par conséquent une seule et même chose »(1).

Le contraire de l'autonomie est l'hétéronomie. Il y a hétéronomie chaque fois que la volonté cherche hors d'elle-même la loi à laquelle elle se soumet. Toutes les philosophies morales qui ne fondent pas la morale dans la raison sont ainsi illégitimes. Qu'elles fondent la morale dans les commandements divins, dans la recherche du bonheur, dans un prétendu sentiment moral ou dans l'idée de perfection, elles tombent dans l'hétéronomie et déduisent la morale d'un impératif hypothétique.

Colas Duflo

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Kant, E., Fondements de la métaphysique des mœurs, 2e section, in Œuvres philosophiques, Gallimard, Pléiade, Paris, t. II, 1985, p. 308.
  • Voir aussi : Kant, E., Critique de la raison pratique.

→ impératif, liberté, morale, moralité, raison pratique