Journal de l'année Édition 1985 1985Éd. 1985

Lors de la première conférence laitière qui se tient, avec tous les professionnels, le 10 mai, Michel Rocard présente son plan, qui est approuvé par le Conseil des ministres le 23. L'objectif est de profiter des quotas pour rationaliser et moderniser la production. Trois primes sont prévues en fonction de l'âge des producteurs. Les crédits fixés par le gouvernement s'élèvent à 975 millions de F, dont 605 sont destinés aux 30 000 producteurs qui doivent, selon les prévisions des pouvoirs publics, cesser leur activité. Michel Rocard précise que le modèle de production laitière « à la française » devrait être constitué d'une quarantaine de vaches produisant entre 150 000 et 200 000 litres de lait. Au-delà, il n'y aura pas d'aides publiques. Le plan interdit les primes de quantité et l'arrêt unilatéral, par les laiteries, de leur collecte chez les petits producteurs.

François Guillaume réitère l'opposition absolue de la FNSEA à la maîtrise « bureaucratique » de la production.

Succès imprévu

La mise en place du plan, très complexe, prend du retard. L'ouverture des guichets s'effectue en juin et, dès la première semaine, quelque 10 000 producteurs, représentant 400 000 tonnes de lait, s'inscrivent. Le gouvernement décide alors de retarder la date de clôture des inscriptions au 31 août et donc de dépasser le million de tonnes. À la fermeture des guichets, 50 539 cessations d'activité laitière ont été enregistrées. Elles représentent près de 1,9 million de tonnes, dont 1,6 million peut bénéficier des primes prévues. La diminution de la production s'amorce dans le courant de l'été. Elle est due à la sécheresse et à une moindre alimentation concentrée distribuée aux vaches par les producteurs, qui craignent de dépasser leurs références.

Les ventes de certains fabricants d'aliments concentrés régressent jusqu'à 30 %. Conséquence, 10 % des 22 000 emplois salariés de ce secteur devraient être supprimés. Cette régression s'ajoute à celle (évaluée entre 5 000 et 10 000 sur 85 000 salariés) prévue dans l'industrie laitière, privée et coopérative.

Des productions contrastées

Le décalage habituel entre productions végétales et animales s'accroît considérablement. Avant que ne soit connue la décision de diminuer celle de lait, le secteur du porc connaît d'importantes difficultés. Un dispositif d'aides est mis en place par les pouvoirs publics et une caisse de régulation est créée en avril. En octobre, de nouveaux moyens sont accordés à cette caisse afin d'éviter une nouvelle explosion de mécontentements.

D'autant que la tension est déjà vive parmi les aviculteurs bretons.

Marchés et productions

Autre production en difficulté, concurrencée par les importations d'outre-Manche, celle du mouton. En août, nouvelle guerre entre la France et la Grande-Bretagne. Les services vétérinaires français détectent dans les carcasses importées un taux de lindane supérieur aux normes admises.

Malgré ce choc, les importations se poursuivent au grand désagrément des producteurs qui protestent toujours contre les distorsions de concurrence autorisées par les règlements communautaires. Ils reçoivent l'appui de la Cour des comptes de la CEE, qui estime qu'un mouton britannique permet de toucher 221 fois plus de subventions que son homologue français. Ce qui explique donc la disparition de 30 % des élevages situés dans les régions méridionales.

Situation très préoccupante dans le secteur de la viande bovine. Ses cours chutent à partir d'avril du fait d'un marché saturé par une forte production ainsi que par des importations abondantes.

Afin d'enrayer cette baisse et de désamorcer la colère des producteurs, la Communauté autorise les achats d'intervention dès le 21 août.

Le marché du veau connaît, lui aussi, un effondrement des cours. En février, ils chutent de 20 % du fait de la grève des douaniers italiens et des barrages routiers.

En revanche, c'est la récolte du siècle pour le blé. Elle atteint 32,4 millions de tonnes avec un rendement fantastique approchant les 65 q/ha (+ 32 % sur 1983). La progression de la production de l'orge est aussi spectaculaire avec 11,6 millions de tonnes. La production toutes céréales devrait atteindre 57 millions de tonnes, celle de mais stagnant du fait des intempéries.