L'épave de Giens a aussi révélé des techniques que l'on ne croyait pas si précoces. La construction de ce navire à double bordé (bordés intérieur et extérieur séparés par un calfatage) a été exécutée au moins en partie à partir des couples de la membrure et non en montant d'abord la coque à partir de la quille, méthode classique de l'Antiquité. La construction navale du temps de Cicéron et de César était donc plus avancée, plus moderne qu'on ne le pensait.

Les secrets de l'homme de Piltdown étaient sur une bande magnétique

Une des plus illustres supercheries scientifiques a trouvé son épilogue au cours d'un séminaire de paléontologie réuni en octobre 1978 à l'université de Reading. Charles Dawson, un avoué britannique dont la paléontologie était le violon d'Ingres, annonçait, en 1911, qu'il avait trouvé dans des graviers du Sud de l'Angleterre, à Piltdown, un fossile sensationnel. Le crâne était pareil à celui d'un homme, la mandibule avait l'aspect d'une mâchoire de singe. Tout à côté, Dawson avait également mis au jour des ossements d'animaux et des outils de silex. Il s'empressa d'apporter sa découverte au conservateur du département de géologie du British Museum, Smith Woodward.

Enthousiasme

Le fossile fut baptisé Eoanthropus Dawsoni et présenté à la Société géologique de Londres, où il souleva un enthousiasme énorme. On tenait l'être intermédiaire entre le singe et l'homme, le fameux chaînon manquant que les anthropologistes brûlaient de découvrir, surtout au pays de Darwin, dont la doctrine était souvent résumée par la phrase lapidaire « l'homme descend du singe », bien que Darwin lui-même ne se soit jamais aventuré à une telle expression.

Cependant, dès cette époque, l'objet paraissait suspect à certains anthropologistes. En 1953, on le soumit à une nouvelle méthode de datation. Et l'on découvrit que le crâne comme la mandibule étaient récents. Le premier avait probablement été dérobé dans quelque amphithéâtre de faculté de médecine ; quant à la mandibule, elle était celle d'un orang-outan. Le faussaire en avait seulement limé les dents pour leur donner un aspect un peu moins simiesque. Qui était ce faussaire ? On a soupçonné Dawson. En fait, il semble qu'il ait seulement joué un rôle de complice, en apportant la pièce à Smith Woodward. Le vrai coupable était un professeur de géologie nommé William Sollas. Il détestait Woodward, qui le lui rendait bien. Il imagina de fabriquer le crâne de l'homme-singe, et, avec l'aide de Dawson, il fit tomber Woodward dans le piège. Sollas, qui enseignait la paléontologie à Oxford, eut pour successeur un certain professeur Douglas, mort en 1978, à l'âge de 93 ans. Douglas avait découvert le pot aux roses. Mais c'est seulement en sentant venir sa fin qu'il enregistra son secret sur une bande magnétique. C'est elle qui a été présentée à Reading.

Nouveaux procédés de datation par les isotopes radioactifs

La datation par le carbone radioactif C 14 s'était installée dans ses habitudes : production régulièrement croissante des résultats, établissement des chronologies dont on savait bien par ailleurs qu'elles étaient à manier avec précaution. Mais la méthode butait toujours sur la limite des 30 000 à 40 000 ans : les 13,5 désintégrations par minute que l'on enregistre pour un gramme de carbone organique contemporain ne sont plus que 6,75 pour du carbone de 5 730 ans (période ou demi-vie du C 14), 3,37 à 11 460 ans, 1,69 à 17 190 ans, 0,85 à 22 920 ans...

Cette limite pourra-t-elle être repoussée ? L'année 1978 a connu bien des discussions à ce sujet. Un certain nombre de physiciens, aux États-Unis, pensent que l'on pourrait désormais dater jusqu'à des objets de 70 000 ans, en particulier par l'utilisation d'accélérateurs de particules.

Recherches

Car notre gramme de carbone actuel contient tout de même 5,8 à 1010 atomes de C 14. Or, en utilisant un accélérateur, on peut obtenir une séparation de masse très poussée entre les divers isotopes du carbone, et donc obtenir des proportions plus fortes de C 14. On peut même séparer les particules et arriver à un comptage. À Rochester, l'équipe de K. H. Purser est arrivée à séparer 300 atomes de C 14 par minute dans du carbone contemporain. Un échantillon fossile indatable par la méthode classique a donné un bruit de fond correspondant à 70 000 ans : telle serait dès aujourd'hui la limite envisageable.