On peut oublier le film tourné par Gassman lui-même (Sans famille), regretter le manque de vigueur de Monicelli dans Voyage avec Anita (qui consacre cependant l'humour décontracté de l'Américaine Goldie Hawn) et de Luigi Magni dans Au nom du père roi ; mais garder le souvenir de La fille, d'Alberto Lattuada, pour l'éclatante beauté de Nasstassja Kinski, la fille de Klaus.

On peut négliger Le jouet dangereux, de Giuliano Montaldo, malgré la présence d'une insolite Marlène Jobert. Mais il serait injuste de ne pas garder en mémoire le sobre et émouvant récit de Gianfranco Mingozzi, Les trois derniers jours, l'évocation d'un attentat manqué contre le Duce par un adolescent. Enfin, fait rarissime, l'Italie a donné cette année le dessin animé le plus neuf de ces derniers temps : Allegro ma non troppo, de Bruno Bozzetto.

Allemagne

Retour en force de l'Allemagne, qui partage cette année la Palme d'or de Cannes avec les États-Unis. Le tambour, film très littéraire, très dense et très étrange, adaptation fidèle du célèbre roman de Günter Grass, consacre définitivement la maîtrise et l'intelligence de Volker Schlöndorff.

Trois autres films figurent parmi les plus forts de cette saison : d'abord, controversé par les puristes, le très sophistiqué Nosferatu, de Werner Herzog, des images superbes, une certaine froideur et, avec une Isabelle Adjani blême à souhait, Klaus Kinski dans toute sa splendeur de vampire aux ongles crochus.

Également controversé pour son parti pris de dépouillement, d'intériorisation extrême, mais par la même passionnant, La femme gauchère, de Peter Handke, avec Édith Clever et Bruno Ganz. Un comédien qui s'est, cette année, imposé avec éclat, puisqu'on le voit aussi dans le troisième film important venu d'outre-Rhin, Le couteau dans la tête, d'un nouveau venu, Reinhardt Hauff. Bruno Ganz y interprète avec une force très convaincante un homme victime d'un attentat et d'une manipulation policière. À noter encore qu'on retrouve l'acteur dans un film à la carrière plutôt discrète mais qui a suscité l'intérêt de la critique : L'échiquier de la passion, de Wolfgang Petersen.

Pour le reste, les metteurs en scène habituels n'ont pas totalement séduit cette année, qu'il s'agisse de Fassbinder (avec Gibier de passage, La troisième génération et Despair, qu'interprètent Dirk Bogarde et Andréa Ferréol), ou de Wim Wenders, dont L'angoisse du gardien de but au moment du penalty est d'ailleurs vieux de huit ans, ou encore de Margaret von Trotta (Le second éveil), tentative féministe sympathique mais pas tout à fait convaincante.

À signaler tout de même, plus comme un phénomène de société que comme une œuvre cinématographique accomplie, l'Allemagne en automne, film collectif des cinéastes d'outre-Rhin (avec la participation de l'écrivain Heinrich Böll) sur leur vision, pessimiste et psychanalytique de l'Allemagne d'aujourd'hui. Et le premier film d'un ancien journaliste, Bernhard Sinkel : Lina Braake fait sauter la banque, une comédie douce-amère.

Divers

Du reste du monde, peu de surprises cette année. Une fois de plus, l'un des plus grands films de la saison est signé Ingmar Bergman : le Suédois, de retour dans son pays, a donné avec Sonate d'automne l'une de ses plus belles œuvres. Avec, aux côtés de son interprète favorite, Liv Ullmann, la présence — événement —, dans le rôle d'une mère à la trop forte personnalité, de la grande Ingrid Bergman, trop rare sur les écrans.

Pour le Japon, c'est Yasujiro Ozu, découvert tout récemment, qui domine avec Le goût du saké, une chronique familiale contemporaine et, bien qu'en couleurs, aussi épurée et dépouillée qu'une estampe. À noter aussi la force étrange de L'empire de la passion, où Nagisa Oshima, après L'empire des sens, poursuit son exploration personnelle et fantastique de l'univers du sexe et de la mort, et la perfection de Kenji Mizoguchi, redécouvert avec L'impératrice Yang Kwei.

À signaler enfin, pour son prodigieux succès auprès des enfants, le très vilain Goldorak, dessin animé qui reprend le personnage bien connu du petit écran, dont le merchandising a envahi toutes les boutiques.