TOM-DOM

Loyada : des enfants contre l'indépendance

Le processus de décolonisation du territoire français des Afars et des Issas, amorcé dès le début de 1975, se précise. Au demeurant, sur place, la situation est plus instable que jamais. L'opposition à Ali Aref ne désarme pas, manifestations et incidents se multiplient tout au long de l'année et la violence est à plusieurs reprises meurtrière. De justesse, le 5 décembre 1975, Ali Aref échappe à un attentat.

Tandis que l'ONU invite la France à quitter le territoire, que l'OUA multiplie les déclarations, l'Éthiopie ne cache pas ses inquiétudes devant les risques d'un conflit avec la Somalie après l'indépendance de Djibouti. L'indécision dont Paris semble faire preuve ne simplifie pas bien sûr, les données du problème.

Cependant, un événement rappelle à l'opinion française, peu préoccupée de la décolonisation de Djibouti, l'existence du territoire : un car de ramassage scolaire pris en otage avec 31 enfants à bord.

Ce matin du 3 février 1976, le car de la base aérienne de Djibouti termine comme tous les jours sa tournée avant de prendre la route de l'école. À l'un des arrêts, six hommes armés montent et ordonnent au chauffeur de prendre la direction de la Somalie toute proche.

Au poste frontière de Loyada, à 20 km au sud-est de Djibouti, des camions militaires bloquent la route. Le car doit s'arrêter : il restera trente-deux heures immobile en plein soleil, à quelques centaines de mètres de la frontière. Des vivres et des boissons sont apportés aux enfants par une assistante sociale.

La veille, l'armée avait démantelé, dans la banlieue de Djibouti, le bidonville de Balbala, qui servait de refuge aux militants du FLCS (Front de libération de la Côte des Somalis). On pense d'abord à une opération de représailles, puis le commando fait connaître ses exigences : indépendance immédiate du territoire, annulation du référendum, libération de tous les détenus politiques.

Fusillades

Paris n'entend pas négocier sur le fond. Des tireurs d'élite de la gendarmerie sont envoyés sur place. Dès le deuxième jour, ils interviennent. En quelques secondes, 5 des 6 terroristes sont abattus. Le sixième ouvre le feu à l'intérieur du car sur les enfants, il en blesse 5 avant d'être tué. Une fillette de 5 ans est tuée par une balle perdue tirée par un des soldats au cours de l'assaut confus qui suit.

La tension est d'autant plus grande qu'un des enfants a disparu ; Frank Rutkowski, 7 ans, fils d'un mécanicien de l'armée de l'air, est prisonnier du FLCS en Somalie. Devant la réprobation unanime, et après intervention du gouvernement de Mogadiscio. Frank est libéré.