Ventes

Après quelques années d'euphorie, où le montant des ventes françaises, stimulées par des investissements spéculatifs, progressait d'environ 20 % par an, on constate que la crise économique n'a pas épargné le marché de l'art. Pour la première fois depuis l'après-guerre, le chiffre d'affaires des commissaires-priseurs parisiens (qui représente environ la moitié des ventes françaises) est en recul de 10 %. Il s'établit à 460 000 000 de F en 1975, contre 510 000 000 de F en 1974.

Les salles des ventes londoniennes ont subi encore plus durement les contrecoups des difficultés économiques et monétaires, accusant des baisses de 17 % pour Sotheby et de 24 % pour Christie's.

La relance économique d'automne a permis un net rattrapage en fin d'année après des mois de malaise, d'incertitude et de stagnation. À Paris, la reprise se fait sentir en deux paliers : d'abord à partir d'octobre 1975, où un certain dégel des disponibilités monétaires longtemps retenues redonne un coup de fouet aux enchères ; puis, à partir de février 1976, avec l'installation de l'hôtel Drouot sur la rive gauche, lorsqu'un nouveau public, s'ajoutant aux professionnels habituels, stimule l'activité des commissaires-priseurs parisiens par une plus forte pression de la demande.

Une taxe de 4 % sur les objets d'art et les antiquités, à la charge du vendeur, est inscrite dans le projet gouvernemental sur les plus-values présenté en avril 1976 par le ministre des Finances. Ce texte, où certains voient une incitation à la fraude et à la création d'un marché noir de l'art, est vivement critiqué par les commissaires-priseurs et les antiquaires, qui ne veulent pas se transformer en agents du fisc.

Drouot-Rive gauche fait recette

C'est le 24 janvier 1976 que Me René Boisgirard a frappé le dernier coup de marteau dans le vieil hôtel Drouot qui, édifié au début du second Empire, a vu défiler en cent vingt-quatre ans des millions d'objets les plus divers, parsemés de milliers de chefs-d'œuvre. Mais l'installation, sous les voûtes de la gare d'Orsay, de nouvelles salles des ventes a attiré de nombreux amateurs d'art et d'objets anciens. L'hôtel Drouot-Rive gauche doit servir pendant quatre ans de banc d'essai au futur Hôtel des ventes dont la reconstruction est prévue rue Drouot, à l'intérieur d'un vaste ensemble architectural. Le succès des installations de la gare d'Orsay risque de remettre en cause cette décision. Certains commissaires-priseurs considèrent le 9e arrondissement comme un quartier difficile d'accès et sans vocation artistique. Ils estiment que les dépenses de reconstruction et d'entretien du futur Hôtel des ventes (50 millions d'anciens francs) seront trop lourdes et qu'il serait préférable de vendre le terrain pour réaliser une fructueuse opération. Les commissaires-priseurs contestataires recherchent dès maintenant de nouveaux lieux de ventes (l'hôtel Meurice, par exemple, où les premières ventes ont eu lieu fin avril) et proposent d'aménager des salles modernes à la périphérie de la capitale, dans les nouvelles préfectures de Nanterre, Créteil, Bobigny, Sceaux, Boulogne, Le Raincy.

Tableaux et dessins anciens

Les premiers symptômes de la crise s'étaient manifestés au cours de l'été 1974, et une baisse en dents de scie avait pendant près d'un an perturbé le marché. Le redressement s'est opéré dans les derniers mois de 1975 avec de belles enchères pour des paysages flamands et italiens, des scènes de genre, des natures mortes, des tableaux de fleurs.

– Bruegel de Velours, Avant le déluge, panneau (44 × 56) : 150 000 F, Versailles, 29-II-76.

– École de Caravage, Vénus (83 × 106) : 61 000 F, même vente.

– Panneau flamand (fin XVe), Crucifix emporté par des anges (63 × 35) : 501 000 F, Galliera, 26-XI-75.

– Guardi, Vase de fleurs (20 × 48) : 275 000 F, Drouot, 25-II-76.

– Turner, The Bridgewater Sea Piece : environ 315 000 F. Christie's, Londres, 18-VI-76.

– J.-B. Oudry, Chien flairant du gibier (131,5 × 108) : 80 000 F, Galliera, 26-XI-75.