Journal de l'année Édition 1971 1971Éd. 1971

Calais, Nevers et Laval, toutes trois UDR, passent respectivement aux mains des communistes, des socialistes et du groupe Objectif 72 qu'anime Robert Buron ; l'UDR, pourtant, enlève Castres aux radicaux, Dijon aux républicains indépendants, Melun et Rueil à des centristes ; Auxerre échappe aux indépendants du CNI pour aller aux giscardiens ; Bernard Cornut-Gentile, étiqueté centriste, reprend la mairie de Cannes. Evreux et Agen, villes radicales, vont à un socialiste et à un divers gauches. Nuances ou glissements.

Désistements et retraits

Entre les deux tours s'accentue la tendance déjà marquée à la bipolarisation. Rares sont désormais les villes où l'élection ne se ramène pas à un duel entre deux listes ayant respectivement soit la participation, soit le soutien, ou au moins la neutralité bienveillante de l'UDR ou du parti communiste. Dans les cas les plus intéressants et en vue, à Lille et Toulouse, où les maires sortants socialistes Augustin Laurent et Louis Bazerque affrontent, le premier un ministre, Xavier Ortoli, le second un giscardien, Pierre Baudis, le PC se désiste en faveur des listes de gauche. À Paris, le centre ne demeure en lice que dans quatre secteurs (sur quatorze) et les alliances de la majorité comme les ententes de gauche s'étendent fort loin, jusqu'à des modérés antigaullistes ici, jusqu'au soutien du PSU et de trotskistes là. Mais les communistes se maintiennent à Marseille, où Gaston Defferre a pris un net avantage sur son rival gaulliste Joseph Comiti ; ils se retirent à Grenoble, sans faire voter pour le maire issu des GAM, Hubert Dubedout.

Second tour

La participation reste forte (26,4 % d'abstentions, contre 29,2 % en 1965). La majorité gagne huit villes : Toulouse et Narbonne, vieux fiefs radicaux et socialistes, ainsi que Belfort, Boulogne-Billancourt, Périgueux, Valence, Hyères, Rueil. Mais elle perd notamment La Rochelle, Meaux, Metz, Orléans, Pau, Firminy.

L'opposition prend, avec dominante communiste, Arles, Rosny-sous-Bois. Saint-Dizier, Savigny-sur-Orge et Amiens, ces trois dernières localités étant conquises sur l'UDR ou ses alliés. Les succès des radicaux (La Rochelle et Orléans), ceux des socialistes, qui consistent le plus souvent en réélections brillantes (G. Defferre à Marseille, G. Montpied à Clermont-Ferrand, L. Longequeue à Limoges, A. Laurent à Lille, etc.) ne compensent pas leurs pertes. Les gains du PC et ses progrès souvent, une certaine poussée du PSU, notamment en Bretagne dans des localités de moyenne importance, des conventionnels dans la vallée du Rhône (Vienne, Tarare, etc.), quelques réussites des centristes d'opposition, en particulier à Metz, des socialistes à Bron et à Pau ne constituent pas véritablement une victoire éclatante, cependant qu'on constate un certain recul de la majorité, mise en difficulté dans ses bastions traditionnels de l'Ouest breton et normand, de l'Est alsacien et lorrain.

À Paris, l'UDR et ses alliés prennent de justesse la majorité — 46 sièges sur 90, mais avec 7 centristes —, la gauche emportant 31 sièges et le centre 13. En banlieue, les communistes enlèvent seuls ou avec leurs partenaires de gauche un certain nombre de villes, détenant ainsi la majorité dans quatorze des dix-huit villes de plus de 30 000 habitants de la Seine-Saint-Denis (et trois avec les socialistes), quinze communes du Val-de-Marne (et cinq avec les socialistes) sur trente-sept politiquement classables, etc.

Huit membres du gouvernement, 55 des 212 députés UDR qui s'étaient mis sur les rangs aux municipales n'ont pas été élus. Ce dernier fait ne laisse pas d'agiter quelque peu la majorité et d'animer aussi bien ses débats internes que l'action gouvernementale ; les leçons de ce scrutin, en effet, prennent tout leur sens dans la perspective du renouvellement, au printemps 1973, sauf dissolution, de l'Assemblée nationale, si massivement favorable au pouvoir en place depuis juin 1968.