Peintre chinois (actif v. 1190-1225).
Les paysages de Ma Yuan reflètent, comme ceux de Xia Gui (Hia Kouei*), l’esthétique « romantique » en vogue à l’académie impériale des Song* du Sud (1127-1276/1279). Les deux peintres ne diffèrent que par leur tempérament, Ma plus poétique, Xia plus dramatique. Aussi leur art et celui de leurs disciples sont-ils désignés sous le nom d’école Ma-Xia.
Séduisant et facilement accessible dans ses caractères extérieurs, ce style connut une immense popularité en Occident et au Japon. Mais, en Chine même, il fut discrédité dès l’époque Yuan par les lettrés, qui y virent trop d’artifices et de virtuosité spectaculaire. C’est pourquoi peu d’informations biographiques nous sont parvenues sur ses maîtres.
De Ma Yuan, on sait seulement qu’il appartenait à une famille de peintres officiels depuis trois générations. Lui-même devint en 1190 peintre de l’académie de Hangzhou (Hang-tcheou), la capitale des Song du Sud. Très apprécié à la cour, il reçut de l’empereur Ningzong (Ning-tsong, 1195-1224) la distinction honorifique de la Ceinture d’or. Son activité est encore attestée au début du règne de Lizong (Li-tsong) [1225-1264]. Malheureusement, sa carrière reste mal connue, car aucune des œuvres qui lui sont attribuées par la tradition ou qui portent une signature vraisemblablement authentique n’est datée.
Bien que l’éducation artistique de Ma Yuan ait sans doute été prise en charge par sa famille, le peintre fut fortement influencé par les paysages novateurs de Li Tang (Li T’ang*), moins amples que ceux des Song du Nord, mais plus subjectifs. Continuant les recherches de son prédécesseur et des maîtres du xiie s., il donna au paysage lyrique sa forme la plus accomplie. Ma est célèbre pour ses compositions ingénieuses, le plus souvent asymétriques : des falaises rocheuses ou de grands arbres se massent dans un seul coin, tandis que des branches aux lignes anguleuses se projettent en diagonale à travers l’espace pictural. Désireux d’évoquer plus que de décrire. Ma Yuan ne garde que quelques éléments primordiaux, chargés d’un contenu émotionnel intense. Tout autour, la soie ou le papier, laissés nus ou légèrement teintés, acquièrent une puissance de suggestion poétique sans précédent.
Dans les thèmes souvent repris du « pêcheur solitaire », du « lettré perdu dans ses rêveries au bord d’un précipice », du « poète contemplant la lune », l’homme n’est plus dominé par la nature ; il occupe la première place, et le spectateur est invité à partager ses émotions.
Le rouleau horizontal représentant les Quatre Ermites du mont Shang (Cincinnati Art Museum) offre l’exemple d’une composition plus dense, où se retrouvent néanmoins le jeu dynamique des diagonales, les arbres noueux et les rochers « taillés à la hache », selon une technique dérivée de Li Tang et portée à la perfection. Là encore, la concision tranchante du pinceau et la sincérité de l’inspiration évitent à Ma Yuan les dangers d’une sentimentalité trop facile. Tel ne sera pas le cas de ses successeurs. Ma Lin, son fils, dont certaines œuvres ne manquent pas de personnalité, sera sans doute le seul capable d’évoquer encore, avec vérité, les états d’âme de l’esthète face au monde.
Dernier écho de la floraison académique des Song du Sud, l’école du Zhejiang (Tchö-kiang) perpétuera au début de l’époque Ming* la tradition de Ma Yuan et de Xia Gui.
F. D.