Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Los Angeles (suite)

Site et situation

La majeure partie de l’agglomération occupe une plaine littorale adossée à des collines et montagnes et drainée par les rivières Los Angeles, San Gabriel et Santa Ana, cours d’eau à écoulement saisonnier (washes) plutôt que fleuves côtiers. Le cadre montagneux est formé de blocs tectoniques inégalement soulevés : monts de Santa Monica (500 à 700 m), de Santa Ana (1 300 m), de San Gabriel (plus de 3 000 m). L’agglomération s’étend de plus en plus dans les vallées intérieures, vallées de San Fernando, entre les monts de Santa Monica et de San Gabriel, de San Bernardino, entre ceux-ci et les monts de Santa Ana, ainsi que sur les premières pentes des reliefs. L’inconvénient du site est sa forte séismicité : les blocs jouent verticalement et horizontalement le long d’accidents associés à la grande faille active de San Andreas (la vallée de San Fernando a été récemment victime d’un violent séisme).

La situation ne correspond à aucun des facteurs habituels de localisation urbaine. C’est le climat sec et ensoleillé de l’extrême Sud californien qui fixa un centre urbain dans cette région en attirant d’abord des retraités, des pionniers de l’aviation et de la construction aéronautique, des artistes de cinéma, puis des activités industrielles et commerciales employant une nombreuse main-d’œuvre. L’ensoleillement s’élève à 73 p. 100 des heures possibles (82 en août), taux qui n’est atteint ou dépassé que dans l’Arizona et le Nevada. Les gelées sont exceptionnelles (moyenne de 12,5 °C et minimum moyen de 7 °C en janvier) ; les températures d’été (20,5 °C en juillet et août), tempérées par les brises de mer, sont inférieures à celles de la Vallée centrale. On ne compte que 35 jours de pluie (surtout en hiver) et seulement 316 mm de précipitations, ce qui pose des problèmes de ravitaillement en eau pour une agglomération de cette importance. Ce climat, tant vanté, est gâté par une pollution fréquente ; on compte en moyenne 135 microgrammes de particules minérales et organiques par mètre cube d’air, taux comparable à celui qu’enregistrent des foyers industriels de l’Est, mais l’intense radiation solaire réagit sur ces aérosols en donnant naissance à des produits très nocifs (smog oxydant et smog acide) ; de plus, l’alternance des brises de terre et de mer entraîne souvent un va-et-vient de la masse d’air pollué.


Le développement urbain

D’un village indien situé à une quinzaine de kilomètres de la mer, les Espagnols firent en 1781 un pueblo dénommé Nuestra Señora la Reina de Los Angeles. Ce ne fut longtemps qu’une étape sur le Camino Real ; orienté sud-ouest - nord-est, son plan se reconnaît encore dans le centre de la ville. Après la conquête américaine, la Californie méridionale resta isolée, tandis que l’exploitation des gisements aurifères, les progrès rapides de San Francisco et le développement de l’agriculture favorisaient la partie centrale de l’État. Los Angeles ne comptait que 4 385 habitants en 1860, 5 728 en 1870, 11 183 en 1880.

Los Angeles fut longtemps privée de bonnes relations ferroviaires avec l’Est, malgré le versement de 602 000 dollars et la concession de terrains à la compagnie Southern Pacific. Celle-ci se désintéressa d’abord du sud de la Californie au profit du centre ; maîtresse des tarifs, elle n’offrit ensuite que des conditions peu avantageuses aux denrées de la région de Los Angeles. Tout changea en 1885 lorsque la ligne de la compagnie concurrente Santa Fe atteignit la ville ; le prix des transports s’effondra (l’expédition d’un wagon de fruits dans l’Est tomba de 1 000 à 400 dollars). Submergeant la population hispanique, un flot d’immigrants arriva grâce au nouveau moyen de transport : la population de Los Angeles atteignit 100 000 lors du boom de 1887-88. Elle retomba momentanément à 50 000 au profit des villages de la plaine littorale et des vallées intérieures, situées aujourd’hui dans la ville ou sa banlieue, pour s’élever de nouveau à 100 000 en 1900.

L’ouverture du canal de Panamá, les progrès de l’extraction pétrolière, de l’agriculture et de la pêche en Californie méridionale, l’expansion des États riverains du Pacifique depuis un demi-siècle, le développement des industries d’armement et des constructions navales et aéronautiques au cours de la Seconde Guerre mondiale furent des facteurs importants de la croissance de Los Angeles, dont la population propre passa de 319 000 habitants en 1910 à 1 240 000 en 1930 et à 3 175 000 en 1970, tandis qu’une nébuleuse de villes satellites peu à peu coalescentes, peuplée d’environ 100 000 habitants en 1910, en comptait 3 857 000 en 1970. Les 7 032 000 habitants de Los Angeles représentent 35,7 p. 100 de la population de la Californie. Avec les conurbations toutes proches d’Anaheim - Santa Ana et de San Bernardino - Riverside-Ontario, la région urbaine de Los Angeles rassemble 48 p. 100 de la population de l’État.

Déclenchée par l’achèvement du transcontinental de la Santa Fe, l’immigration, responsable de cette croissance remarquable, a été composée, dans un premier temps, d’Américains originaires de Nouvelle-Angleterre et de la côte atlantique, d’abord, du Midwest ensuite. Un peu plus tard sont arrivés des immigrants d’Europe centrale (Allemands, Suisses) et méridionale (Italiens, Portugais). À la fin du xixe et au début du xxe s., les Asiatiques affluèrent en grand nombre, notamment les Japonais, qui se groupèrent dans le quartier de Little Tokyo (primitivement situé à l’écart, aujourd’hui en plein centre de l’agglomération). La colonie chinoise fut relativement moins importante qu’à San Francisco. Actuellement, les immigrants les plus nombreux viennent du Mexique. Entrés légalement ou clandestinement, à titre temporaire ou définitivement, ils renforcent le groupe des Hispano-Américains et des tenants du « pouvoir brun ». Longtemps peu représentés à Los Angeles, les Noirs sont arrivés surtout après la Seconde Guerre mondiale ; leur part dans la population totale de l’agglomération a atteint 9,5 p. 100 en 1960, 14,2 p. 100 en 1970. Ils sont aujourd’hui plus d’un million, dont 525 000 à Los Angeles même, notamment dans le quartier de Watts (entre le centre des affaires et le port), siège d’émeutes très graves il y a quelques années. Depuis la Seconde Guerre mondiale sont arrivés aussi des Hawaiiens et Philippins, dont un grand nombre sont employés sur les bateaux de pêche.