Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Légumineuses ou Léguminosales (suite)

Papilionacées

Cette troisième famille est de loin la plus importante par le nombre, avec près de 400 genres et plus de 10 000 espèces (respectivement 40 et 400 en France), mais aussi par la variété des produits qu’elle fournit.

Les Papilionacées sont principalement des herbes, parfois des lianes, mais rarement des arbustes ou des arbres (Sophora). Les feuilles, munies de stipules, sont le plus souvent composées, mais quelques rares espèces sont à feuilles simples (Chorizema ilicifolium). Les fleurs sont hermaphrodites et irrégulières (symétrie bilatérale). Le calice, parfois bilabié, est à cinq sépales plus ou moins longuement soudés entre eux ; les pétales, très inégaux, sont ordinairement libres, sauf les deux inférieurs (carène) ; le supérieur, ou étendard, recouvre les deux latéraux (ailes) ; les deux derniers recouvrent, eux aussi, la carène. Les étamines, au nombre de dix ordinairement, ont le plus souvent leurs filets réunis en un tube soit toutes les dix (étamines monadelphes) ou seulement toutes les neuf, une restant libre (étamines diadelphes). Chez le genre Sophora, toutes les étamines sont libres. L’ovaire supère est à un seul carpelle, avec de nombreux ovules insérés de part et d’autre de la suture. Le fruit sec, une gousse (légume), possède ordinairement de nombreuses graines.

La systématique des dix tribus est fondée principalement sur le nombre d’étamines, la division du limbe et la forme des folioles.

J.-M. T. et F. T.


Biologie

Les Légumineuses occupent une place spécifique en agronomie grâce à une propriété essentielle, celle de fixer l’azote atmosphérique de l’air par des Bactéries symbiotes. Cette propriété ne leur est pas exclusive, mais il semble que, pratiquement, les Légumineuses réalisent la majeure partie de cette transformation sur terre. Les conséquences en sont multiples : d’une part, dans les systèmes de cultures, les Légumineuses fournissent une contribution irremplaçable au maintien et à l’amélioration de la fertilité des terres ; d’autre part, elles sont à l’origine de l’essentiel de la nutrition azotée de l’Homme, soit par une contribution directe sous forme de grains (Haricot, Pois, Arachide), soit indirectement par l’alimentation azotée des animaux à viande ou à lait ou des producteurs d’œufs.

Les graines de Légumineuses sont généralement riches en protides et en glucides, et ont une teneur variée en lipides. Leur longévité est d’autant plus élevée qu’elles sont plus riches en aleurone (protides) et pauvres en huile : un an chez l’Arachide ; de cinq à huit ans chez la Fève. La dormance est presque toujours faible ou nulle ; il y a même parfois germination avant maturité complète des graines.

La germination exige des conditions d’aération suffisantes pour une bonne hydratation des téguments. Les besoins thermiques sont plus élevés que pour les Graminacées. La vitesse de germination est souvent faible à moins de 6 °C. Les modalités de croissance de la plantule sont variées : germination épigée chez le Haricot, hypogée chez le Pois.

Les conditions périodiques pour la mise à fleur sont généralement peu contraignantes, tant pour la vernalisation que pour la photopériode*. Dans la fleur, l’autofécondation est fréquemment possible, mais les cas d’autostérilité ne sont pas rares ; les agents de la pollinisation sont alors très variés, mais souvent entomophiles ; c’est ainsi que la production de graines de luzerne connaît souvent des difficultés à cause de l’emploi d’insecticides trop peu sélectifs. Les fruits sont des gousses issues du carpelle, qui contiennent plusieurs graines issues des ovules fécondés.


La fixation symbiotique de l’azote

La symbiose* entre une Bactérie, Rhizobium leguminosarum, et la plupart des Légumineuses est réelle : sans Bactérie, la Légumineuse reste chétive et se développe mal ; sans la Légumineuse, la Bactérie ne fixe pas d’azote. Elle se trouve alors le plus souvent dans la gaine de mucilage des Azotobacter et utilise l’azote qu’ils ont combiné. Grâce, semble-t-il, à leur production de biotine, facteur de croissance bactérien, le Rhizobium prolifère au voisinage des racines des Légumineuses. La Bactérie pénètre entre les fibrilles de cellulose de l’extrémité des poils absorbants, dont elle accroît la plasticité par sécrétion d’acide β indolylacétique. Elle se multiplie alors activement, créant dans les tissus corticaux une traînée infectieuse. Cette traînée, mucilage dans une gaine d’hémicellulose, se ramifie ; ses digitations atteignent le cytoplasme cellulaire de l’hôte, qui est alors infecté par la Bactérie. La cellule parasitée réagit par une division qui tend à l’isolement de la Bactérie, mais celle-ci se divise à son tour. Ces divisions réciproques conduisent à la formation de la nodosité, galle bactérienne, d’autant plus grosse que les cellules de l’hôte deviennent souvent polynucléées et tétraploïdes. Puis la division des Bactéries cesse, et le Rhizobium acquiert alors une forme d’involution dite « bactéroïde ». À partir des cellules infectées de la nodosité se forme un tissu vasculaire qui se relie à celui de la plante hôte. Ainsi s’établit la symbiose : la Légumineuse alimente la Bactérie en glucides, fixés par la chlorophylle ; la Bactérie alimente la plante en azote combiné, fixé par un pigment voisin de l’hémoglobine, la léghémoglobine.

La nodosité doit atteindre le stade bactéroïde pour que débute la fixation. Elle continue alors à grossir par croissance des cellules. Elle devient sénescente quand sa taille entraîne un ralentissement de la diffusion de l’azote et de l’oxygène. Il faut donc un renouvellement régulier de l’infection.

La léghémoglobine est synthétisée par le cytoplasme de l’hôte, en présence de la Bactérie ; c’est pourquoi les formes libres du Rhizobium sont hétérotrophes pour l’azote.

Bien que la lyse du Bactéroïde fournisse des acides aminés à l’hôte, c’est surtout l’excrétion régulière hors de la cellule infectée qui alimente en azote la Légumineuse. Celle-ci rejette autour d’elle de 10 à 50 p. 100 de l’azote fixé pendant la période active, sous forme d’acides glutamique et aspartique. Ces acides sont absorbables en l’état par les plantes voisines, bien qu’en fait, par l’action de diverses Bactéries, l’essentiel se retrouve sous forme ammoniacale, puis nitrique. Par contre, lors de la floraison et de la croissance des graines, le rejet cesse, et une partie de ce qui a été excrété peut être réabsorbé, la fixation étant alors insuffisante.

Il semble qu’il n’y ait qu’une espèce de Rhizobium, avec des races très nombreuses, plus ou moins spécifiques de certains genres de Légumineuses. Aussi, le rendement en azote de la symbiose est-il relativement dépendant des espèces et du milieu de culture, d’autant plus que les exigences écologiques ne sont pas identiques.