Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Ledru-Rollin (Alexandre Auguste Ledru, dit) (suite)

George Sand, dans le Bulletin de la République du 15 avril, organe officiel, agite la menace d’une intervention populaire au cas où les résultats du scrutin ne répondraient pas au vœu des masses. Son article, d’une rare maladresse, passe pour refléter l’opinion du ministre de l’Intérieur. Ledru-Rollin doit alors rallier le camp de l’ordre. Le 16 avril, il collabore activement avec Lamartine et Marrast à l’« étouffement pacifique » de la manifestation ouvrière. Il n’est pas blanchi pour autant. L’Assemblée constituante élue le 23 avril lui manifeste son hostilité, et peu s’en faut que Ledru-Rollin ne soit écarté de la Commission exécutive, qui, le 10 mai 1848, remplace le gouvernement provisoire. Le 15 mai, c’est un nouveau coup de force des clubs.

Ledru-Rollin et Lamartine marchent à la tête des gardes nationaux contre l’Hôtel de Ville, où Barbès et Albert ont formé un éphémère gouvernement. C’en est trop. L’Exécutif est discrédité, et, le 17 mai, le général Cavaignac arrive d’Alger. Lors des journées de Juin, qui manifestent le désespoir des ouvriers, Ledru-Rollin doit, comme ses collègues, abandonner ses pouvoirs au général dictateur. Mais il se range à contrecœur du côté de la légalité.


Le retour à l’opposition

La réaction qui s’accélère après juin 1848 trouve en Ledru-Rollin un adversaire déterminé. Mais aux élections présidentielles du 10 décembre il peut mesurer son influence réelle : 370 000 voix. Louis Napoléon en a 5,5 millions. Un redressement s’opère aux élections législatives du 13 mai 1849. Unis, démocrates et socialistes remportent un certain succès. Ledru-Rollin, pour sa part, est élu dans cinq départements. Grisé par sa victoire, il oublie la leçon du printemps 1848. Menant campagne contre l’intervention en Italie, il met en accusation le président et ses ministres, et menace de défendre la Constitution au besoin par les armes.

Le 13 juin, il tente avec quelques clubistes d’organiser une « journée » contre la Chambre. La manifestation est brisée, et Ledru-Rollin, qui a tenté de former une Convention révolutionnaire au Conservatoire national des arts et métiers, échappe de peu à l’arrestation. Il s’enfuit en Belgique, puis gagne l’Angleterre. Le second Empire le considérera comme un dangereux adversaire, et Ledru-Rollin ne pourra rentrer en France qu’en 1870, sous le gouvernement Émile Ollivier. Élu à l’Assemblée nationale en février 1871, le vieux chef du radicalisme n’est plus qu’un personnage de second plan. Il demeure neutre dans le conflit entre Versailles et la Commune, mais toujours suspecté par les conservateurs irréductibles. À la veille de sa mort, le Vaucluse républicain lui confie un dernier mandat.

J. L. Y.

➙ Révolutions de 1848.

 R. Schnerb, Ledru-Rollin (P. U. F., 1948). / G. Duveau, 1848 (Gallimard, 1965). / L. Girard, Naissance et mort de la IIe République (Calmann-Lévy, 1968).

Leeds

V. de Grande-Bretagne.


Leeds est la ville principale d’une conurbation de 1 726 000 habitants, de beaucoup la plus importante de la région Yorkshire et Humberside, l’une des dix régions économiques de Grande-Bretagne.

Cette conurbation s’est développée à la lisière orientale de la chaîne Pennine, en partie au pied de celle-ci, en partie dans les vallées qui en débouchent. Dans la vallée de l’Aire et de ses petits affluents, on traverse successivement Leeds, Morley, Bradford, Shipley, Bingley, Keighley ; dans celle du Calder et de ses affluents, Wakefield, Horbury, Dewsbury, Batley, Brighouse, Halifax, Hebden Bridge, Todmorden. Leeds s’étale largement dans la vallée de l’Aire et sur les derniers éperons de la montagne, mais plus on avance vers l’ouest, plus l’habitat se resserre, faute de place, au fond d’étroites vallées encaissées, et l’on passe sans transition de vallées densément peuplées aux interfluves couverts de landes et de déserts.

Leeds se trouve donc non pas au centre de sa conurbation, mais à son extrémité nord-est, dans une remarquable situation de contact entre la riche région agricole qui s’étend au nord et à l’est, le bassin houiller qui commence au sud à Wakefield et les vallées industrielles à l’ouest.

La conurbation est toujours dominée par les industries du textile et de la confection ; 70 p. 100 de l’industrie lainière britannique s’y rassemblent. C’est la plus grosse concentration mondiale pour l’industrie de la laine et la seconde, après New York, pour celle de la confection.

La prééminence nationale de Leeds dans l’industrie de la laine ne date que du début du xixe s. Certes, dès le Moyen Âge, on travaillait la laine des troupeaux de la chaîne Pennine, troupeaux qui appartenaient en grand nombre aux monastères cisterciens, mais, au xviiie s., le Yorkshire n’était encore que la troisième région anglaise pour l’industrie lainière. L’utilisation de la machine à vapeur et l’abondance de la houille aux portes mêmes de la conurbation lui donnèrent l’avantage décisif sur les régions rivales.

La concentration technique et financière de l’industrie est peu avancée : 800 firmes, la plupart petites, se spécialisent souvent dans un seul stade du travail de la fibre. De même, la dispersion géographique reste la règle. L’est de la conurbation (Leeds, Morley, Wakefield) travaille les laines cardées pour la fabrication des draps et des couvertures. Le nord-ouest (Keighley, Shipley, Bradford) pratique surtout la filature des laines peignées, et le sud-ouest (Huddersfield, Batley, Dewsbury) le tissage des laines peignées. Halifax et Batley ont une prospère industrie du tapis. Bradford est le centre commercial de l’industrie lainière, tandis que Leeds a l’essentiel de l’industrie de la confection, elle aussi morcelée en firmes nombreuses et petites. L’industrie utilise maintenant autant de fibres acryliques et polyesters que de laine véritable et a su renouveler ses techniques (progrès du tricotage aux dépens du tissage).

Leeds a une gamme industrielle plus large que les autres villes : outre la laine et la confection, l’industrie mécanique (matériel pour l’industrie textile, machines-outils, pièces d’automobile) et l’industrie chimique (colorants).