Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Laennec (René)

Médecin français (Quimper 1781 - Kerlouarnec 1826).


René Théophile Hyacinthe Laennec peut être considéré, ainsi que l’ont écrit M. Bariéty et Ch. Coury, comme « le véritable fondateur de la médecine moderne et scientifique ».

Nourri d’humanités, il étudie à l’école de médecine de Nantes d’abord, puis à partir de 1801 à Paris dans le service de Jean Nicolas Corvisart des Marets (1755-1821) [v. médecine]. Il y est très vite remarqué par ses aptitudes à l’observation systématique et est nommé rapidement chef de service dans les plus grands hôpitaux parisiens : Beaujon, la Salpêtrière, Necker, où, à partir de 1806, il enseigne l’anatomie pathologique, la Charité, où il est titulaire de la chaire de clinique interne. Partout, il dispense un enseignement véritablement socratique au lit du malade, celui-là même qu’a fondé son maître Corvisart. Mais, surtout, Laennec se distingue par l’objectivité de ses raisonnements scientifiques : confrontant avec rigueur les signes et les lésions des maladies qu’il côtoie chaque jour à l’hôpital, il établit les bases d’une nosologie (classification des maladies).

Dès 1804, il a démontré d’une manière irréfutable que les kystes hydatiques sont des parasites vivants et les a rattachés à la classe des vers. Cette année-là est également parue sa thèse Propositions sur la doctrine d’Hippocrate relativement à la médecine pratique, où il a exprimé les idées directrices de ses recherches ultérieures.

En 1815, il communique à ses élèves les premiers résultats obtenus par l’application de l’acoustique à la connaissance des maladies de poitrine. Il a inventé à cet effet le stéthoscope, et donné le nom d’auscultation* médiate à celle qu’il pratique à l’aide de cet instrument, par opposition à l’auscultation immédiate, pratiquée à l’oreille nue.

En 1819, il publie le Traité de l’auscultation médiate, ouvrage capital qui marque la fin de trente siècles de doctrines empiriques et non vérifiables, et qui ouvre la voie à la médecine contemporaine. Ce traité renouvelle les connaissances sur les affections pleuro-pulmonaires, aussi diverses que la dilatation des bronches, l’infarctus pulmonaire, le pneumothorax, les pleurésies, l’œdème aigu du poumon, l’emphysème, l’asthme, la pneumonie, la gangrène pulmonaire, bref presque toute la pathologie pleuro-pulmonaire identifiable à cette époque. Grâce à une précision sémiologique hors de pair, ces diverses affections sont aujourd’hui encore reconnaissables cliniquement par les signes qui en ont été donnés, même si les examens radiologiques permettent une définition plus précise de certaines d’entre elles.

En 1822, Laennec remplace Jean Noël Hallé (1754-1822), dont il a été l’élève, à la chaire de médecine du Collège de France. C’est là, puis à la clinique médicale de la Charité, qu’il poursuit inlassablement son œuvre. De nombreux médecins étrangers viennent recueillir son enseignement et apprendre sa méthode, qui devient rapidement universelle. Celle-ci est particulièrement applicable au domaine, alors très confus, de la tuberculose*. Laennec a bénéficié des observations prises par Gaspard Laurent Bayle (1774-1816) et publiées en 1810. Sans l’appui de l’histologie ni de la bactériologie, sans radiologie, Laennec affirme l’unicité du processus tuberculeux, en dépit du polymorphisme clinique apparent de la maladie. S’il distingue des infiltrations informes grises ou jaunes, des tubercules miliaires, crus ou enkystés, des granulations miliaires, des lésions pleines ramollies ou excavées, il ne les considère pas moins comme le résultat du même processus. De même, après avoir isolé les signes physiques, il peut reconnaître les différents stades de la « phtisie ». Il distingue des formes régulières, irrégulières, latentes, aiguës et chroniques, et identifie les modalités évolutives des cavernes.

Atteint lui-même de tuberculose, il meurt à quarante-cinq ans en pleine gloire, quelque temps après avoir fait paraître la deuxième édition de son traité. S’il fallait encore prouver le génie de Laennec, il suffirait de rappeler qu’il n’avait quasiment pas eu de précurseur dans cette confrontation stricte entre l’altération des organes sur le cadavre et les signes physiques présentés par le vivant. Il conviendrait aussi de rappeler la solidité de sa nosologie, si l’on songe aux termes qu’il a créés et dont la signification n’a guère changé : bronchophonie (retentissement de la voix dans les bronches), pectoriloquie (voix semblant venir de la poitrine, à l’auscultation), égophonie (voix nasillarde entendue à l’auscultation), râles sibilants, ronflants, crépitants, bourdonnements ampho-amphoriques, succussion hippocratique, bruits de cuir, de frottement, de râpe, frémissement cataire (analogue à celui du chat qu’on caresse). Enfin, l’homme semble avoir mérité, autant par ses vertus charitables que par ses qualités intellectuelles, l’estime universelle.

En son honneur, l’hospice des Incurables, créé en 1633, reçut son nom en 1878. Cet établissement, situé rue de Sèvres à Paris, comporte, outre diverses consultations spécialisées, des services de médecine et de chirurgie. Le dispensaire Léon-Bourgeois, consacré au dépistage en pneumophtisiologie, y est rattaché.

M. R.

 R. T. H. Laënnec, De l’auscultation médiate (Brosson et Chaudé, 1819). / R. Kervran, Laennec médecin breton (Hachette, 1955). / E. Rist, la Jeunesse de Laennec (Gallimard, 1955). / C. et S. Malard, Laennec (Letouzey et Ané, 1960).

La Fayette (Marie-Madeleine Pioche de La Vergne, comtesse de)

Femme de lettres française (Paris 1634 - id. 1693).



La femme

Quand elle mourut, en 1693, le Mercure galant qualifia Mme de La Fayette de « personne considérable ». L’éclat, en effet, de la Princesse de Clèves laisse dans l’ombre l’existence de son auteur, qui fut un personnage marquant du règne de Louis XIV. Témoin attentif des affaires de l’État, Mme de La Fayette fut une conseillère écoutée des grands et des ministres, et son rôle ne fut pas négligeable, par exemple, dans les intrigues ourdies à Versailles en vue d’annexer le Piémont.