Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

intensité (suite)

Cette relation, toute qualitative, permet de comprendre cependant quelques conséquences pratiques concernant la transmission du son à distance. Soit une source ponctuelle dissipant une puissance W sous forme sonore. À la distance R de la source d’où émane une onde sphérique, on retrouve, s’il n’y a pas d’absorption par l’air, cette puissance W également répartie sur toute la surface S = 4 π R2 de la sphère de rayon R. L’intensité acoustique vaut donc à cette distance W/4 π R2. On voit que l’intensité acoustique décroît, lorsqu’on s’éloigne de la source, suivant l’inverse carré de la distance. Pour améliorer le rendement de l’opération qui consiste à transmettre le son au loin, on est donc conduit :
a) soit à canaliser l’onde sonore émise par la source de manière à répartir la puissance sonore non plus uniformément dans tout l’espace, mais dans la direction privilégiée qui joint la source à l’auditeur, d’où l’usage de porte-voix, de haut-parleurs directionnels, etc. ;
b) soit à augmenter la surface qui capte les ondes sonores, par exemple grâce au cornet acoustique, qui autrefois soulageait des surdités partielles ; le pavillon de l’oreille joue dans une certaine mesure ce rôle quand on le roule en cornet pour « prêter l’oreille ».


Champ d’audibilité

Un son ne peut être perçu que si son intensité acoustique est suffisante. On appelle seuil d’audibilité la limite d’intensité au-dessous de laquelle l’oreille n’entend plus rien. À titre d’exemple, pour un son de fréquence 1 000 cycles par seconde, le seuil d’audibilité correspond, pour une oreille normale, à une intensité acoustique de 10–16 W/cm2 et à une pression acoustique de 2.10–5 pascal. Ces valeurs montrent que l’oreille est, au moins pour des sons de cette fréquence, un détecteur d’une sensibilité remarquable : 2.10–5 pascal représente à peu près la pression équivalant à 2 dixièmes de microgramme par cent mètre carré ; 10–16 W/cm2, le flux lumineux qu’envoie une lampe de poche à 300 km.

Si l’on augmente l’intensité acoustique d’un son à partir du seuil d’audibilité, la sensation d’intensité augmente jusqu’à un niveau où l’audition n’est plus supportable. On a alors atteint le seuil de douleur. À 1 000 cycles par seconde, ce seuil correspond à peu près à une intensité acoustique de 10–4 W/cm2 et à une pression acoustique de 20 pascals.

L’oreille ne peut donc entendre et supporter un son que si son intensité est comprise entre ces deux seuils. Or, les intensités acoustiques correspondant à ces seuils dépendent de la fréquence du son. On appelle champ d’audibilité l’ensemble des sons que l’oreille peut percevoir en tant que tels, c’est-à-dire ceux dont la fréquence est comprise entre 20 et 20 000 cycles par seconde approximativement (v. hauteur) et dont l’intensité est comprise entre les seuils d’audibilité et de douleur. La figure 1 montre dans quelle région se situe le champ d’audibilité.


La sensation d’intensité

Il est bien évident que l’intensité acoustique ne mesure pas la sensation d’intensité : si nous entendons deux sons dont les intensités acoustiques sont 10–12 et 10–13 W/cm2, c’est-à-dire dans un rapport 10, nous n’avons pas le droit de dire que le premier son est 10 fois plus intense que le second du point de vue de la sensation. Ce qu’il faut, c’est rechercher une échelle qui puisse faire correspondre aussi étroitement que possible l’intensité acoustique, grandeur mesurable, à la sensation d’intensité. On rencontre tout de suite une première difficulté dans le fait que chacun de nous a sa propre sensibilité à la sensation d’intensité. Toutefois, pour des personnes douées d’une audition normale, on constate que les variations, d’un individu à l’autre, sont minimes. On peut donc raisonnablement espérer pouvoir établir une échelle d’intensité caractéristique d’une oreille « moyenne » normale. Il existe par contre une autre difficulté beaucoup plus sérieuse : l’intensité d’un son n’est pas uniquement fonction de son intensité acoustique, mais aussi de sa fréquence. Il suffit, pour s’en convaincre, de se reporter à la figure précédente pour constater qu’un son correspondant à une intensité acoustique de 10–14 W/cm2 sera bien au-dessus du seuil d’audibilité si sa fréquence est 1 000 cycles par seconde, bien au-dessous si elle est 50 cycles par seconde. À intensité acoustique égale, on perçoit nettement le son dans le premier cas, on ne l’entend pas dans le second. On est donc conduit :
1o pour une raison évidente de simplicité, à étudier d’abord la sensibilité de l’oreille aux variations d’intensité de sons de même fréquence ;
2o à rechercher ensuite comment l’on peut comparer les intensités de sons de fréquences différentes.


Niveau physique d’intensité sonore

La solution du premier problème est fondée sur le fait expérimental que, pour des sons de même fréquence, la loi générale de Weber-Fechner s’applique. Cette loi exprime que toute sensation physiologique varie approximativement comme le logarithme de l’excitat on physique qui l’a provoquée. On pose donc que la différence d’intensité I2 – I1 de deux sons de même fréquence est liée à leurs intensités acoustiques respectives P1 et P2 par une relation de la forme :

k étant une constante (qui dépend de la fréquence) dont le choix fixera évidemment l’unité d’échelle d’intensité.

Or, l’expérience montre que, entre 1 000 et 5 000 cycles par seconde, région où l’oreille est la plus sensible, on ne perçoit deux sons comme distincts en intensité que si le rapport de leurs intensités acoustiques est au moins égal à 1,1 en moyenne. On convient donc de choisir k de telle sorte que l’unité de différence d’intensité corresponde à peu près à un tel rapport d’intensités acoustiques. On est donc conduit à choisir k tel que
1 = k log (1,1).
Dans le système à base 10,
log (1,1) = 0,0414,
d’où k = 24. Pour des raisons de simplicité évidentes, on prend le multiple de 10 le plus voisin, c’est-à-dire 10 lui-même. L’unité de différence d’intensité résultant de ce choix s’appelle décibel (db).