Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hanse (suite)

Les villes sont reconnues membres de la Hanse soit dès l’origine, vers 1350, soit par admission officielle sur demande, ou encore par intrusion semi-clandestine (cas des petites agglomérations) ; elles n’en sortent que par exclusion, par démission ou, beaucoup plus fréquemment, par renonciation tacite. N’admettant en son sein qu’un seul prince, le grand maître de l’ordre Teutonique, dont dépendent étroitement les bourgeois des six principales villes prussiennes, la Hanse en retire un incontestable prestige et une puissance militaire et navale particulièrement précieuse en cas de guerres, auxquelles elle ne participe qu’à seule fin de maintenir son système économique, fondé sur « une situation de monopole considérée comme immuable et légitime » (Pierre Jeannin). Il en est ainsi lors du conflit avec la Flandre (1351-1360) et surtout lors de la guerre danoise (1361-1370), dont l’issue victorieuse, concrétisée par la paix de Stralsund, marque en 1370 l’apogée de la Hanse, qui se fait céder les quatre places fortes ou lieux de pêche du Sund : Elseneur (Helsingør), Malmö, Skanör et Falsterbo, ainsi que les deux tiers des revenus attachés à leur péage.


Faiblesse structurelle et difficultés conjoncturelles

Contrainte de devenir une puissance politique et militaire internationale, la Communauté ne dispose pourtant que d’une seule institution qui lui soit propre : le Hansetag. Cette assemblée générale de villes membres joue un rôle décisif en matière diplomatique, militaire, économique et judiciaire, puisqu’elle arbitre les conflits entre villes membres. Pourtant, ses réunions se tiennent sans aucune périodicité. D’ailleurs rares sont celles où sont représentées les villes des trois « tiers », entre lesquels ses membres sont régionalement répartis. Le Hansetag se tient généralement à Lübeck, dont le Conseil de ville joue un rôle essentiel au sein de la Hanse à côté des « diètes de tiers » (ou de quartier) et des « diètes régionales ». Il émet ses décisions sous forme de « recès », théoriquement applicables par tous, mais qui ne s’imposent en fait qu’aux villes qui ont envoyé des délégués à la Diète générale — et encore pas toujours. « Ne présentant aucun des traits caractéristiques d’un État » (Philippe Dollinger), la Hanse doit, en cas de crise grave, se résoudre à constituer des ligues soumettant leurs membres à des obligations financières et militaires très précises. Il en est ainsi de la ligue de Cologne, constituée en 1367 contre le Danemark, et des « tohopesate » (se tenir ensemble) du xve s., dont la plus célèbre est celle qui est organisée par Lübeck en 1418, lorsque la prééminence de cette ville est officiellement reconnue sur la Hanse.

Cette faiblesse structurelle de la Hanse rend celle-ci plus sensible aux aléas de la conjoncture. Encore capable d’imposer à l’Angleterre la paix d’Utrecht de 1474, la Hanse ne peut prétendre traiter éternellement d’égal à égal avec les États nationaux ou les principautés territoriales en voie de constitution tant à l’étranger qu’en Allemagne ; encore moins peut-elle pallier les conséquences, pour son commerce, de la substitution d’un axe Francfort-Nuremberg-Leipzig-Poznań à l’axe Londres-Bruges-Lübeck-Reval et celles de l’essor du trafic hollandais, qui s’accentue à l’extrême fin du xve s.

Marqué par la fermeture des comptoirs de Novgorod en 1494 et de Londres en 1598, par la défaite infligée par le Danemark aux Lübeckois en 1534-35, par les conquêtes suédoises autour de la Baltique, le xvie s. est pour la Hanse une période de déclin irrémédiable, les villes membres ne parvenant à participer à la prospérité générale que dans la mesure où elles reviennent à un « système de privilèges partagés et d’étapes imposées » reposant sur « l’idée qu’un monopole acquis [peut] être maintenu par des contraintes juridiques » (Pierre Jeannin). Cruellement atteinte par cette évolution de la conjoncture, la Hanse ne survit pas aux effets de la guerre de Trente Ans, puisque l’on date son décès de 1630, année de la conclusion d’une alliance restreinte entre Lübeck, Hambourg et Brême, ou de 1669, année de la réunion de la dernière diète hanséatique.

P. T.

➙ Brême / Bruges / Champagne / Cologne / Commerce international / Flandre / Foire / Gdańsk / Hollande / Londres / Lübeck / Novgorod / Paris / Pays-Bas.

 W. Vogel, Kurze Geschichte der Hanse (Halle, 1915). / J. Denuce, la Hanse et les Compagnies commerciales anversoises aux pays baltiques (De Sikkel, Anvers, 1938). / K. Pagel, Die Hanse (Berlin, 1942 ; 4e éd., 1965). / Hansische Studien (Berlin, 1961). / P. Dollinger, la Hanse, xiie-xviie siècle (Aubier, 1964). / K. Fritze, Am Wendepunkt der Hanse (Berlin, 1967).

Han Yu

Confucianiste et lettré chinois du milieu de la dynastie Tang (Tengzhu [T’eng-tchou], Henan [Ho-nan], 768 - Chang’an [Tch’ang-ngan], 824), grand maître de la prose classique chinoise.


Né dans une famille simple de Nanyang (Henan), il est orphelin très jeune et se consacre avec passion à ses études classiques. À vingt-cinq ans, il est reçu docteur (jinshi [kin-che]) et occupe son premier poste en province. À trente-cinq ans, il est nommé professeur à l’Académie impériale (Guozi dian [Kouo-tseu-tien]) et poursuit une honorable carrière de fonctionnaire qui le mène jusqu’à la vice-présidence du ministère de la Fonction publique. En 819, son célèbre pamphlet À propos d’une relique de Bouddha, qui attaque directement l’empereur, lui vaut d’être envoyé en exil dans le sud de la Chine.

Il en revient à la mort de l’empereur et meurt à l’apogée de sa célébrité.

Chef de file du Mouvement de la prose antique (guwen yundong [kou-wen yun-tong]), on doit à son dynamisme et à sa persévérance la renaissance de l’essai en prose. Au cours de la période précédente, le style guindé, précieux et finalement obscur à force de recherche de la « prose parallèle » (pianwen [p’ien-wen]) avait envahi la littérature et étouffé l’inspiration. Han Yu s’inspire des modèles fournis par l’Antiquité, principalement les œuvres des Han et des Royaumes combattants, pour renouveler le style des dissertations et des narrations. C’est pourquoi ce nouveau style littéraire s’appelle prose antique. Simplicité de la présentation, sobriété de l’expression, clarté du style et de la pensée, telles sont les qualités maîtresses de la réforme littéraire de Han Yu.