Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Alpes (suite)

Il faut attendre la fin de l’Éocène pour voir apparaître d’importantes modifications paléogéographiques ainsi que les premières manifestations tectoniques des mouvements alpins dans la zone piémontaise. La sédimentation du flysch à Helminthoïdes semble s’être arrêtée au Paléocène ; la sédimentation se poursuit dans les zones briançonnaise et subbriançonnaise par des calcschistes et le flysch noir. Dans le domaine externe, une transgression, marine, amène le dépôt de la trilogie nummulitique : calcaire à Nummulites à la base, marnes bleues à Globigérines, flysch (grès d’Annot, grès du Champsaur). Et c’est à la fin de l’Éocène que le flysch à Helminthoïdes se décolle de son substratum de schistes lustrés et vient recouvrir la partie interne de la zone briançonnaise.

À l’Oligocène, les zones briançonnaise et subbriançonnaise sont à leur tour tectonisées (en même temps d’ailleurs que leur couverture de flysch à Helminthoïdes) et les schistes lustrés sont alors charriés vers l’ouest ; ils seront repris immédiatement après avec la zone briançonnaise dans des mouvements de sens contraire. À l’extérieur de la chaîne, dans la zone rhodanienne, un bassin subsident se creuse : c’est le bassin molassique, qui s’individualise et va édifier les puissantes séries molassiques, lesquelles se sont constituées à partir des produits de démantèlement des Alpes, qui commencent alors à se soulever. Au Miocène, la zone dauphinoise est à son tour tectonisée, et les bassins rhodanien et liguro-piémontais encadrent alors les Alpes, qui se soulèvent ; ce mouvement se poursuit au Quaternaire, tandis que la plaine du Pô continue alors à s’enfoncer.


Dans les Alpes suisses

L’évolution paléogéographique des Alpes suisses est analogue à celle des Alpes franco-italiennes, sous réserve toutefois de quelques modifications. Le serrage des blocs et les décollements de couverture s’accentuent ; dans la zone helvétique, de puissantes nappes de glissement (nappes helvétiques) se mettent en place. D’autre part, dès le Crétacé, un nouveau domaine paléogéographique s’individualise, le bassin valaisan. Les dépôts de ce bassin donneront des sédiments voisins des schistes lustrés. Le schéma des zones paléogéographiques se complique avec la présence de deux bassins de schistes lustrés qui encadrent le prolongement de la zone briançonnaise.


En Autriche

Les zones paléogéographiques se continuent. Au sud s’y adjoignent les bassins sédimentaires où se sont déposées des séries austro-alpines. Les comparaisons de faciès entre l’austro-alpin supérieur et les Alpes méridionales (Dolomites) permettent de rapprocher ces deux domaines paléogéographiques. Dans les Alpes orientales, les mouvements orogéniques sont plus précoces, ils ont débuté dans le Crétacé moyen (phase autrichienne). Le Crétacé supérieur (Turonien : Gosau) est transgressif et discordant sur les grandes nappes des Alpes calcaires septentrionales.


Le métamorphisme alpin

Il est localisé dans les zones internes et considéré classiquement comme un métamorphisme polyphasé. Par exemple, sur un matériel basique et dans des zones bien précises comme le val d’Aoste, il commence par le faciès éclogitique (les minéraux étant l’omphacite et les grenats), se poursuit par le faciès des schistes à glaucophane (glaucophane, épidote, grenat) et se termine par le faciès des schistes verts (actinote, épidote). Naturellement, sur tout autre matériel de départ et dans d’autres zones de la chaîne, l’évolution métamorphique peut être différente.

P. C.


Géographie physique


Le relief

Malgré la complication de détail, un certain ordre géologique marque les Alpes, et le cadre longitudinal détermine bien souvent les caractères du paysage. Il est d’ailleurs souligné par de nombreuses vallées ; d’autres vallées illustrent au contraire la dissymétrie de la chaîne.

Ces vallées s’ordonnent en effet suivant deux directions : longitudinale ou transversale. Les premières sont surtout celles de la Durance et du Sillon alpin en France, du haut Rhône et du haut Rhin en Suisse, les secteurs montagneux de l’Inn, de la Salzach, de l’Enns, de la Mur, de la Drave et du Gail en Autriche, du haut Adige et de la basse Adda en Italie. Les secondes descendent parallèlement de part et d’autre de l’axe des plus hauts sommets, comme l’Adige moyen, la haute Isère ou l’Arc.

Coupées d’étranglements, resserrées souvent en gorges étroites, parfois occupées par des lacs, les vallées ne sont pas toujours d’accès facile. Cependant, leur réseau quadrillé aère la chaîne.

Certes, les mouvements violents subis par les roches alpines sont avant tout la cause du relief alpin, qu’on l’envisage dans son ensemble comme dans ses détails. Même le profane est frappé par les replis tourmentés des roches cristallines. Cependant, ce sont les érosions successives qui ont mis en valeur la dureté variable de ces roches, souligné les contrastes rigoureux entre les escarpements durs et les pentes molles des couches tendres, et aussi mis en évidence leur disposition. Par endroits, on retrouve les traces d’aplanissements anciens, dans les Alpes orientales surtout, peu bouleversées par les mouvements ultérieurs : le paysage ressemble alors à ceux des Vosges ou du Massif central. Mais c’est l’exception : ailleurs, l’énergie architecturale et l’érosion récentes ont été trop violentes pour que soient conservées des formes aplanies, et l’énergie du relief est essentiellement calquée sur les formes dues aux mouvements.

Cette érosion est d’abord celle des glaciers.

Les glaciers actuels occupent environ 4 000 km2, soit seulement 2 p. 100 de la surface alpine, mais ce sont eux qui, avant tout, attirent la curiosité des touristes. On peut distinguer quelques grands ensembles glaciaires, parmi lesquels le plus vaste correspond au secteur le plus élevé des Alpes : c’est celui du groupe du Mont-Blanc, de la chaîne Pennine, de l’Oberland bernois. Ailleurs, quelques glaciers isolés plus petits occupent des régions plus basses, mais froides et humides : par exemple, les glaciers de la Silvretta ou de l’Engadine. Leur forme est variée : calottes glaciaires ou plateaux, glaciers de cirque ou de parois, glaciers de vallée.