Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

explosif (suite)

Les explosifs antigrisouteux

En France, comme dans tous les pays producteurs de charbon, on reconnut, vers 1875, que, pour éviter dans les mines de houille les explosions de grisou ou de poussière de charbon, il était nécessaire de ne tirer que certains explosifs mis au point à cet effet. Entre 1884 et 1888, les travaux classiques d’Ernest Mallard (1833-1894) et d’Henry Le Chatelier (1850-1936) montrèrent que divers explosifs à forte teneur en nitrate d’ammonium ont, grâce à leur température d’explosion peu élevée, des qualités antigrisouteuses ; en 1908, Henri Dautriche (1876-1915) découvrit le rôle favorable qu’exercent sur les explosifs dans lesquels ils sont introduits les composés fournissant des ions alcalins dans la flamme. Lorsque, vers 1930, on reconnut que plus la vitesse de détonation est basse moins grandes sont les chances d’allumer le grisou, on chercha à faire des explosifs dont la faible densité limitait à 1 800 à 2 500 m/s la vitesse de détonation. On fut ainsi conduit à employer dans ces explosifs du nitrate d’ammonium dit « allégé », c’est-à-dire à faible densité apparente — comprise entre 0,7 et 0,9 —, et des matières combustibles très légères. Tous les explosifs antigrisouteux actuellement employés renferment du chlorure de sodium à un taux plus ou moins élevé (55 p. 100 dans l’explosif N no 66) et un combustible léger, comme la farine de bois de balsa ou la poudre de roseau broyé.


Explosifs préparés au moment de l’emploi

Divers explosifs peuvent être préparés juste avant leur emploi, en mélangeant deux constituants qui, pris séparément, ne sont pas explosifs ; l’un est un comburant, l’autre un combustible.

Le premier exemple fut celui que décrit un brevet de 1871 de Hermann Sprengel (1834-1906) et que l’on obtient en mélangeant de l’acide nitrique avec un liquide combustible approprié. En 1881, Eugène Turpin (1848-1927) proposa de mélanger du peroxyde d’azote avec un liquide combustible, comme le sulfure de carbone ou le nitrobenzène ; ce sont des liquides qui constituaient l’explosif à liquides séparés des bombes d’avion : le liquide comburant et le liquide combustible, logés dans des réservoirs différents dans la bombe, se mélangeaient après le largage de l’engin, au cours de sa chute.

Les explosifs à l’oxygène liquide, qui apparurent en 1898, sont obtenus en imbibant d’oxygène liquide des matières combustibles pulvérulentes ; celles-ci, comme la farine de bois ou de liège, le noir de carbone, sont mises sous forme de cartouches à enveloppe en papier ; sur le lieu de l’emploi, ces cartouches d’absorbant sont mises à tremper dans des récipients spéciaux d’oxygène liquide. Dès qu’elles sont extraites de ces bacs de trempage, elles doivent être chargées dans le trou de mine et tirées dans un délai assez court. En France, on les a employées principalement dans les mines de fer ; on les emploie à grande échelle en Inde et aux États-Unis dans les travaux à ciel ouvert.

Depuis 1955 s’est beaucoup développé un explosif au nitrate d’ammonium qui se fabrique au moment de l’emploi ; il utilise le nitrate obtenu sous forme de sphérules poreuses, de 2 à 3 mm de diamètre, dans les tours de solidification du nitrate fondu lors de la fabrication des engrais au nitrate d’ammonium ; ce produit a de bonnes qualités absorbantes ; quand on ajoute de 5 à 7 p. 100 d’hydrocarbure liquide visqueux, celui-ci se répartit de façon homogène dans le nitrate solide. On obtient ainsi l’explosif au nitrate d’ammonium et mazout, appelé également nitrate-fuel ; c’est un explosif peu coûteux et peu sensible aux chocs, qu’il faut amorcer avec une cartouche-relais d’un explosif plus sensible.


Importance économique des explosifs

La production annuelle française d’explosifs de mine est de 50 000 t environ, à quoi il faut ajouter un millier de tonnes de poudres à usages divers. On ne saurait se passer des explosifs dans l’industrie minérale extractive, et les percements de grands tunnels, comme celui du Saint-Gothard ou du Mont-Cenis, auraient été impossibles sans les explosifs.

L. M.

➙ Déflagration / Détonation / Explosion / Poudre / Sensibilité.

 L. Vennin, E. Burlot et H. Lecorché, les Poudres et explosifs (Béranger, 1932). / J. Calzia, les Substances explosives et leurs nuisances (Dunod, 1969). / P. Tavernier, Poudres et explosifs (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1969).

explosion

Phénomène qui produit ou qui libère, en un temps très court, des gaz sous pression.


Toute explosion comporte des effets mécaniques et en particulier la production éventuelle d’un bruit souvent très fort. Regardé autrefois comme un caractère essentiel des explosions, le bruit, simple enregistrement par l’oreille de l’onde de choc lancée dans l’air par l’explosion, n’est plus considéré maintenant que comme une manifestation accessoire de l’explosion.


Classement

Les explosions peuvent être classées selon leur nature.


Explosions pneumatiques

Elles libèrent un fluide préexistant, enfermé, sous une pression plus ou moins élevée, dans une enceinte dont la paroi cède ; l’éclatement d’un réservoir d’air comprimé dont la paroi est insuffisamment résistante est une explosion pneumatique ; il en est de même de celui d’une bouteille d’un gaz liquéfié sous pression ou de celui d’une chaudière à vapeur. Dans les engins Cardox, servant à l’abattage du charbon ou à la désagrégation de matières agglomérées, c’est une explosion pneumatique que l’on produit ; ces engins sont constitués par des tubes à forte paroi, munis d’un disque de rupture, chargés en dioxyde de carbone et renfermant un élément chauffant ; la chaleur produite par celui-ci après la mise de feu élève la température et la pression du fluide jusqu’à la rupture du disque.