Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
E

écholocation

Mode très particulier d’orientation, fondé sur le principe de l’écho (sons ou ultrasons), qui permet à certains animaux de se mouvoir dans l’obscurité et d’y capturer leurs proies.


L’écho, provenant de la réflexion d’ondes sonores sur un obstacle, permet d’en mesurer l’éloignement. Si on place côte à côte émetteur et récepteur, connaissant la vitesse V de propagation des ondes et le temps t séparant l’émission du son de la réception de l’écho, la distance de l’obstacle est donnée par la formule


Histoire d’une découverte

Paul Langevin utilise les propriétés de l’écho à la fin de la Première Guerre mondiale pour détecter les sous-marins, et cela en utilisant les ultrasons. Un peu plus tard, on met au point un procédé de détection analogue (radar*) grâce à des ondes électromagnétiques très courtes (3 cm).

À la fin du xviiie s., Lazzaro Spallanzani montre que ni la vue, ni l’odorat, ni le toucher n’interviennent dans l’orientation du vol des Chauves-Souris. À la même époque, le Genevois Jurine confirme ces résultats et montre que ces animaux ne peuvent plus s’orienter si on leur crève le tympan. En 1900, Rollinat et Trouessart démontrent le rôle primordial de l’oreille interne. En 1920, le physiologiste anglais H. Hartridge émet l’hypothèse que les Chauves-Souris peuvent émettre en vol des sons de haute fréquence et de courte longueur d’onde, dont la réflexion sur les obstacles serait perçue par l’animal, ce qui lui permettrait de se diriger.

L’émission d’ultrasons est prouvée en 1938 par G. W. Pierce et D. R. Griffin, et, trois ans plus tard, Griffin et R. Galambos montrent que ces émissions sont utilisées par l’animal pour se diriger dans l’obscurité.

Griffin, en 1944, donne le nom d’écholocation à ce mode d’orientation.


Modalités et distributions zoologiques

Les Chauves-Souris émettent à la fois des cris perceptibles par l’oreille humaine (fréquence des vibrations : environ 7 000 par seconde) et qui n’interviennent pas dans l’orientation, et des ultrasons (20 000 vibrations et plus par seconde) dépassant la fréquence perçue par l’oreille humaine. Ces cris ultrasoniques très brefs (de 1 à 5 ms) sont coupés d’intervalles. Leur nombre émis par unité de temps est plus ou moins grand suivant que l’animal se rapproche ou s’éloigne de l’obstacle. Au repos, il n’y a jamais plus de 10 cris ultrasoniques par seconde et, en vol, de 30 à 60, parfois 100.

Toutes les Chauves-Souris n’utilisent pas l’écholocation. Chez les Mégachiroptères, seules les Roussettes la possèdent, et l’ultrason semble produit par la langue, qui reçoit l’impulsion nerveuse par le nerf hypoglosse. La section de ce nerf supprime l’émission. Mais, en général, les sons et les ultrasons sont émis par le larynx, la bouche restant ouverte pendant le vol. Les Rhinolophidés émettent les ultrasons par le nez (F. P. Möhres).

L’écholocation implique un appareil récepteur très sensible ; d’où l’importance des bulles auditives chez les Rhinolophes. Aussi la Chauve-Souris est-elle sensible aux vibrations comprises entre 20 000 et 100 000 par seconde, tandis que l’Homme ne perçoit que les sons de fréquence comprise entre 16 et 10 000 vibrations.

Les Oiseaux Guacharos (Steatornis caripensis) s’orientent aussi par écholocation (Griffin, 1953). Ils nichent au fond des grottes des régions tropicales de l’Amérique du Sud. Ils s’y dirigent sans heurter les parois, bien que leur envergure dépasse parfois le mètre. Ils utilisent non des ultrasons, mais des cris perceptibles par l’oreille humaine (de 6 000 et 8 500 vibrations par seconde), chaque cri étant séparé du suivant par quelques millisecondes. À l’air libre, ces Oiseaux se dirigent à la vue.

Les Salanganes, en particulier l’espèce qui fournit les « nids d’Hirondelles » (Collacalia fucifaga), nichent par centaines de milliers dans les grottes de l’Asie du Sud-Est ; très loin de l’entrée, elles s’y dirigent par écholocation (A. Novick et Medway, 1959). À l’air libre, elles se dirigent à la vue.

Certains Mammifères de l’ordre des Cétacés s’orientent aussi par écholocation, notamment trois genres de Dauphins (Evans et Dreher, 1960). Les Marsouins utilisent également ce mode d’orientation et peuvent, malgré leur taille, éviter par ce moyen des obstacles monofils métalliques d’un tiers de millimètre de diamètre (Andersen, R. G. Busnel et Dzeidzic, 1963).

Il semble donc qu’il n’y ait pas de liaison constante et obligatoire entre écholocation et vie souterraine.

R. H.

 D. R. Griffin, Listening in the Dark (New Haven, 1958). / R. G. Busnel (sous la dir. de), Acoustic Behaviour of Animals (New York, 1964) ; les Systèmes sonars animaux, biologie et bionique (I. N. R. A., Jouy-en-Josas, 1967 ; 2 vol.). / A. Brosset, la Biologie des Chiroptères (Masson, 1966). / E. Ajrapetjantz et A. I. Konstantinov, Echolocation in Nature (Leningrad, 1970). / D. Pye, Bats (New York, 1970).

Eckart (Johann, dit Maître)

Dominicain et philosophe allemand (Hochheim, Thuringe, v. 1260 - en Avignon (?) v. 1327).



La vie d’Eckart

À quinze ans, Johann Eckart entre dans l’ordre des Dominicains. Peut-être est-il à Cologne l’élève d’Albert* le Grand ; en tout cas, la pensée de celui-ci exerce sur lui une influence décisive. Vers trente ans, Eckart devient prieur du couvent d’Erfurt et vicaire général des dominicains de Thuringe. Avant et après cette charge, il enseigne la théologie au couvent de Saint-Jacques à Paris ; c’est là aussi qu’il obtient le titre universitaire de « Maître ». Il est élu provincial de Saxe en 1303, et nommé vicaire général de Bohême en 1307 ; sa tâche principale consiste, surtout à partir de 1314, à prêcher aux moniales établies nombreuses dans la vallée du Rhin. Sans renoncer à son professorat de Paris et de Cologne, il réside généralement à Strasbourg.

À partir de 1325, son orthodoxie est mise en cause. Traduit devant le tribunal épiscopal de Cologne (sept. 1326), puis transféré sur sa demande devant la cour papale d’Avignon, il est sommé de se justifier de deux séries de propositions tirées de ses écrits et de ses sermons. C’est en Avignon probablement qu’il meurt, après avoir élevé une protestation : « Je peux être dans l’erreur, mais je ne peux pas être dans l’hérésie, car la première est de l’ordre de l’intelligence, tandis que la seconde est de l’ordre de la volonté. » Eckart sera mort quand, le 27 mars 1329, le pape Jean XXII publiera la bulle In agro dominico, condamnant vingt-huit de ses propositions.