Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

absorption (suite)

L’absorption intestinale dans le règne animal

Il en est traité à l’article digestion.


Les mécanismes de l’absorption cellulaire


Absorption passive

Une différence de concentration tend à disperser uniformément les molécules par diffusion à partir des sites de concentration supérieure. Si le corps dissous est plus concentré à l’extérieur de la cellule, par exemple dans le sang ou dans la sève qui irrigue cette cellule, et si la membrane cellulaire lui est perméable, ce corps diffuse vers l’intérieur et est absorbé. Si le corps dissous est plus concentré à l’intérieur de la cellule et si la membrane est perméable à l’eau, mais non au corps dissous, l’eau diffuse de l’extérieur (où sa concentration est supérieure, puisque celle du corps dissous est inférieure) vers l’intérieur et est absorbée. C’est le phénomène de l’osmose.

La différence de potentiel électrique qui existe généralement entre les deux faces de la membrane cellulaire, l’intérieur étant polarisé négativement par rapport à l’extérieur, contrôle strictement l’absorption des ions, porteurs d’une charge électrique.

L’entraînement par l’eau pénétrant dans une cellule est un dernier facteur d’absorption passive des substances dissoutes, considérable dans le cas de membranes pourvues de « pores » (l’existence permanente de ces pores est douteuse).


Absorption active

Très généralement, la cellule met en jeu des transporteurs spécifiques, mobiles de façon cyclique entre la face externe et la face interne de sa membrane, l’énergie nécessaire étant fournie par le métabolisme cellulaire. On interprète ainsi le transfert sélectif des ions (K+, Na+) et de nombreuses molécules en sens inverse de ce qu’appellerait leur gradient de concentration. Certaines substances sont ingérées par la cellule grâce à un mouvement de la membrane plasmique, qui enveloppe progressivement les substances étrangères, solides ou liquides, jusqu’à former une vésicule mobile dans le cytoplasme. Le mécanisme en jeu est la phagocytose à l’égard de substances solides, telles les proies digérées par les amibes, ou la pinocytose vis-à-vis de solutions liquides. Mettant en jeu une synthèse rapide de membrane au site d’ingestion, ces phénomènes actifs consomment de l’énergie.

M. P., J.-M. T., F. T., H. F.

abstraction

L’une des tendances les plus caractéristiques des arts plastiques du xxe s., marquée par le refus de représenter le monde extérieur et parfois d’y faire même allusion.


Si le mot abstraction (plus rarement abstractivisme) et l’expression art abstrait désignent le plus fréquemment cette tendance, on emploie encore couramment les termes d’art non figuratif (ou non-figuration), d’art non objectif (ou non-objectivisme) et, paradoxalement, celui d’art concret. On s’en tiendra ici à la seule peinture. (V. par ailleurs sculpture du xxe s.)


Qu’est-ce que l’art abstrait ?

La querelle terminologique entre les tenants de ces diverses appellations recouvre évidemment autre chose que de simples divergences lexicales. Née presque simultanément en divers points du globe — et d’ailleurs du fait d’acheminements individuels délicats à ramener à un commun dénominateur —, l’abstraction allait se trouver ensuite diffusée à l’échelle internationale, concernant dès lors des centaines d’artistes appartenant à plusieurs générations et, de surcroît, ayant reçu des formations aussi dissemblables que possible. En même temps que le nombre de ses adeptes croissait celui des écoles et des sectes, certaines séparées par de violents dissentiments. On croirait, à cette description, reconnaître l’histoire de l’une des grandes religions de la planète, l’évocation de ses conquêtes spirituelles et de leur revers, la prolifération des clergés et des hérésies ! Ici, la révélation, bien que dispensée en même temps par plusieurs prophètes, tient à l’éloignement communément manifesté à l’égard des apparences physiques. Mais si certaines sectes abstraites estiment qu’il n’y a point de mal à ce que les souvenirs du monde visible subsistent, à condition qu’ils soient suffisamment élaborés, d’autres contestent ce point de vue avec force et font jouer en leur laveur la terminologie. « Est abstrait ce qui n’est pas matérialisé, ce qui est conceptuel, purement intellectuel », déclare l’architecte et plasticien suisse Max Bill (né en 1908), qui ajoute : « Tout objet qui existe dans la réalité, qui n’est pas simplement pensé, qui n’est pas simplement conçu, est concret. »

Abstraite serait, dans cette perspective, l’œuvre qui part de la nature et, chemin faisant, « fait abstraction », intellectuellement, de tels détails, de telles qualités secondaires ; concrète, au contraire, serait l’œuvre qui n’emprunte à la nature aucun prétexte formel et ne doit rien qu’à son auteur, celui-ci matérialisant des idées abstraites. Jean Arp* écrit : « Je comprends qu’on nomme abstrait un tableau cubiste, car des parties ont été soustraites à l’objet qui a servi de modèle à ce tableau. Mais je trouve qu’un tableau ou une sculpture qui n’ont pas eu d’objet pour modèle sont tout aussi concrets et sensuels qu’une feuille ou qu’une pierre. » Max Bill conteste également les appellations d’art non figuratif et d’art non objectif, car, dit-il, « toute œuvre d’art véritable représente quelque chose, qui est l’idée qui la fonde ; cette idée est le contenu de l’œuvre, qu’il soit naturaliste, abstrait ou concret ». S’il n’est pas question de substituer aux termes d’abstraction ou d’art abstrait, qui ont finalement prévalu, celui d’art concret, les commentaires passionnés d’Arp et de Bill permettent d’apprécier les efforts des créateurs et des théoriciens de cet art pour le défendre de l’accusation de gratuité et de décoration encore si fréquemment portée contre lui. Aussi, la définition initiale que nous en avons donnée apparaît-elle trop exclusivement négative. Il serait souhaitable de lui en substituer une autre à la lumière de cette indication du peintre Josef Albers, par exemple : « Le but de l’art : la révélation et l’évocation de la vision intérieure », renforcée par une réflexion du philosophe Maurice Merleau-Ponty : « La peinture moderne, comme en général la pensée moderne, nous oblige à admettre une vérité qui ne ressemble pas aux choses, qui soit sans modèle extérieur, sans instruments d’expression prédestinée, et qui soit cependant vérité. » À partir de là, comment ne pas faire le rapprochement avec cette autre déclaration, qui est d’André Breton (1925) : « L’œuvre plastique, pour répondre à la nécessité de révision absolue des valeurs réelles sur laquelle aujourd’hui tous les esprits s’accordent, se référera donc à un modèle purement intérieur ou ne sera pas » ?