Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Córdoba

V. d’Argentine, capit. de la province de Córdoba.


Fondée en 1573 par Jerónimo Luis de Cabrera (1528-1574), Córdoba est la deuxième ville de l’Argentine, avec 782 000 habitants.


Le développement des fonctions urbaines

Située aux confins de la Pampa et des sierras andines, la ville primitive est construite sur la rive droite du Primero. Entourée des deux côtés par le fleuve, qui, à cet endroit, fait un grand méandre, elle profite du site défensif, mais en même temps d’une situation de carrefour à partir duquel on peut aller facilement au Pérou, à Tucumán et au Chili.

Deux éléments vont permettre à la ville nouvellement créée de se développer. C’est d’abord, au xviie s., la création par les Jésuites d’un collège, transformé peu après en une université, « la Universidad mayor de San Carlos », qui acquiert rapidement une grande renommée et attire des étudiants de tout le pays.

En 1622, d’autre part, la douane de Córdoba est créée et perçoit une taxe sur tous les produits en provenance des régions du Río de La Plata. Córdoba a été choisie comme ville de péage, car c’était un passage obligatoire pour aller de ces régions vers le nord. En 1707, la ville devient le siège du gouverneur de Tucumán ; les villes de Mendoza, de San Juan et de San Luis sont rattachées à la juridiction de Córdoba, qui devient ainsi un centre administratif en plus de ses fonctions culturelles et commerciales.

Dans le courant du xxe s., enfin, Córdoba devient un centre industriel où dominent les industries automobiles, avec des filiales de Fiat et de Renault, et le matériel ferroviaire. On trouve aussi des industries du verre, de la céramique, etc. Cette industrie moderne a remplacé des activités traditionnelles liées aux ressources de la région, en particulier le tissage et la poterie. Actuellement, un dernier élément favorise l’essor de Córdoba : le tourisme, qui se développe dans les montagnes. Tout cela explique que la ville rayonne sur une zone très vaste ; son influence s’étend à l’ouest jusqu’à San Juan, La Rioja et Catamarca, et au nord jusqu’à Tucumán, Salta et Jujuy. Le Sud, par contre, n’a aucun rapport avec Córdoba, tandis que l’influence de la ville est concurrencée à l’est par celle de Santa Fe.


Évolution de l’espace urbain

Jusqu’au xixe s., la ville resta sur la rive droite du fleuve, avec cependant un quartier isolé du centre urbain, le quartier San Vicente.

Au xixe s., elle s’étendit vers le sud et le sud-ouest, puis vers le nord, car la rivière ne représentait plus un obstacle : chemins de fer et routes la franchirent et guidèrent la localisation des zones urbanisées. Actuellement, les quartiers industriels et ouvriers se situent le long de la route qui va à Rosario et à Buenos Aires, car c’est l’axe de transport des produits fabriqués vers les grands centres de peuplement. Les autres quartiers se disposent autour du vieux noyau urbain de la rive droite du Primero, qui reste le centre de la ville.

M. R.

Cordoue

En esp. Córdoba, v. d’Espagne, en Andalousie ; 236 000 hab. (Cordouans).


Située sur la rive droite du Guadalquivir, Cordoue est le centre de la vallée moyenne du grand fleuve andalou. Ville-pont, elle est née du temps des Romains au terminus de la navigation fluviale, au débouché d’une voie d’accès commode à la sierra Morena et à l’aplomb du plus ample ensellement de la cordillère Bétique livrant passage à la Méditerranée. Sa vieille ville conserve le souvenir de sa brillante fonction de capitale du califat cordouan avec ses ruelles tortueuses, ses petites places irrégulières et ses monuments célèbres, au premier rang desquels la Grande Mosquée. Au hasard des promenades, on y découvre derrière de somptueuses grilles en fer forgé des patios parés de verdure et bruissant de jets d’eau où se perpétue un art de vivre d’un autre temps.

La fonction touristique, à laquelle est liée la survie d’un artisanat traditionnel, est de ce fait l’une des activités importantes de la ville. Mais Cordoue est avant tout le centre administratif et commercial d’une riche région agricole ainsi qu’un foyer industriel (industries alimentaires et électromécaniques) bénéficiant des ressources électriques de la sierra Morena.

R. L.


Cordoue, ville d’art


Cordoue islamique

Exception faite de deux bains, sur plus de trois cents que contenait la ville, et de deux minarets annexés aux églises de San Juan de los Caballeros (930) et de Santa Clara (xe s.), il ne reste plus que la Grande Mosquée pour rappeler le souvenir d’une des plus imposantes cités de l’Islām médiéval (occupée par les Arabes en 711). Encore ce sanctuaire fut-il mutilé par l’érection en son sein d’une cathédrale, acte de vandalisme que Charles Quint, d’abord consentant, condamna par ces mots : « Ce que vous exécutez là se trouve partout, ce que vous aviez auparavant n’existe nulle part au monde. »

Témoin en Europe des influences exercées par la Syrie omeyyade* et l’Iran ‘abbāsside, appelée à inspirer à son tour l’Islām maghrébin et l’Occident chrétien, la Grande Mosquée fut commencée en 785-786 par l’émir ‘Abd al-Rahmān Ier et agrandie successivement en 833 et en 961, puis en 987 par le vizir al-Manṣūr. Son minaret, élevé par ‘Abd al-Raḥmān III (912-961), a été encastré au xviie s. dans la tour de la cathédrale. Couvrant plus de 23 000 m2, la Grande Mosquée est une des plus vastes mosquées du monde. Elle est aussi une des plus belles. Mal orientée par rapport à La Mecque (qibla), elle se présente comme un long édifice un peu bas (10,50 m de hauteur environ), ponctué de contreforts et de vingt-trois portes s’ouvrant dans des niches à fond plat richement décorées. Éblouissante à l’intérieur, elle comprend dans sa partie nord une cour rectangulaire entourée de portiques (cour des Orangers) et dans sa partie sud une salle de prière à dix-neuf nefs en profondeur, faites de rangées parallèles de colonnes à chapiteaux corinthiens ou composites, jadis dorés, qui supportent un double étagement d’arcs outrepassés ou polylobés, aux claveaux alternativement de pierres claires et de briques rouges. Le décor, où le floral se mêle au géométrique, à la fois fin et solide, atteint ses plus hautes qualités dans le minbar (chaire), la maqṣūra (loge) et le mihrāb (niche indiquant la qibla). En particulier, le miḥrāb, de taille inusitée et précédé d’une belle coupole sur nervures, offre un riche échantillonnage de techniques décoratives : niches, épigraphie, stucs en méplat, mosaïques à fond d’or réalisées par des artistes byzantins envoyés par l’empereur Nicéphore II Phokas, marbres sculptés, à flore abondante, où la nature est interprétée de façon purement conventionnelle (E. Kühnel s’est plu à y lire la naissance de l’arabesque).