Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chameau (suite)

Le Chameau de la Bactriane

Il a deux bosses, l’une sur le garrot, l’autre sur le sacrum. Il est trapu, beaucoup plus long que le Dromadaire, mais avec des jambes plus courtes. C’est surtout un animal de trait lent et de bât ; il est inutilisable pour les déplacements rapides. Son poil est long, épais et foncé, abondant sur le cou, les épaules, les bosses et le long de la ligne dorsale. Ses pattes ont des soles plus dures et plus résistantes que celles du Dromadaire à la marche sur terrain caillouteux. Quand il marche (l’amble également), il porte la tête relativement basse, la nuque se trouvant à peu près au même niveau que le garrot.

Sa voix est plus aiguë que celle du Dromadaire. Quand il est en colère, il crache une partie du contenu de sa panse à la face de son adversaire, mais on ne voit pas de protrusion du voile du palais chez le mâle en rut.


Aire de dispersion

Il vit en Asie, où on le trouve encore à l’état sauvage dans le désert de Gobi et dans une partie du Sin-kiang. À l’état domestique, on le rencontre dans une vaste zone s’étendant de la Crimée jusqu’à Pékin. On en fait l’élevage dans les régions à steppes de la Russie d’Europe, du Caucase, du Kurdistān et de la Crimée, en Afghānistān, au Sin-kiang, en Sibérie méridionale, dans le nord de la Chine, en Mongolie et dans les contrées où les températures minimales atteignent couramment 20 °C au-dessous de zéro. On ne le rencontre pas dans les régions élevées du Tibet, où il est remplacé par un Bovidé : le Yack de Mongolie, bête de somme beaucoup plus résistante.

Dans les régions où les deux espèces se rencontrent (Turquie, Perse), il a été pratiqué des hybrides par croisement du Chameau et de la femelle du Dromadaire. Le produit obtenu ainsi est un animal puissant, utilisé pour le bât et plus élancé que le père ; sa tête est petite, ses extrémités sont fines, son encolure et sa queue sont courtes. Son pelage rappelle celui du Chameau à longs poils frisés.


Biologie

Le Dromadaire peut vivre dans les régions les plus arides et les plus chaudes du globe. Il est domestiqué depuis des millénaires, et c’est en partie grâce à lui que les peuples des déserts peuvent subsister ; aussi est-il l’objet d’une grande vénération. Il est intelligent, mais très rancunier et vindicatif, occasionnant quelquefois de cruelles morsures. Cependant, les Arabes le soignent avec amour, car ils en connaissent mieux que personne l’utilité, pour la bonne raison qu’il leur fournit tout : viande, graisse, lait, cuir, laine ; ils en utilisent même les excreta. De plus, le Dromadaire est le seul moyen de transport du désert. C’est l’animal de bât par excellence et très souvent il sert comme animal de selle pour des liaisons rapides.

C’est sa résistance légendaire à la soif qui permet cette utilisation. On a voulu l’expliquer par la structure interne de la paroi de la panse. Ce vaste réservoir présente de petits compartiments appelés cellules aquifères, dans lesquels le Dromadaire, croyait-on, emmagasine de l’eau. On a découvert aussi que sa bosse de graisse n’est pas seulement une réserve nutritive, mais qu’elle peut lui fournir de l’eau par oxydation. Mais, avec une bosse bien garnie, cela ne donnerait qu’une trentaine de litres en tout à son propriétaire. Or, le Dromadaire a besoin en moyenne de 18 litres par jour !

En fait, le Dromadaire a une thermorégulation toute spéciale. Elle est favorisée par une peau mince et sans graisse dermique isolante, ce qui favorise les échanges de calories entre le milieu interne et l’extérieur. La fourrure laineuse, son épaisseur et sa couleur jouent aussi un grand rôle pour limiter l’évaporation cutanée. Il est bien connu que la température baisse la nuit au désert et atteint son minimum peu avant le lever du soleil. Or, on a constaté que la température interne du Dromadaire, prise de très bonne heure, s’abaisse souvent jusqu’à 34 °C, avec un minimum qui, chez certains sujets, serait de 31 °C et même, dans certains cas, de 29 °C. Au fur et à mesure que la température ambiante monte au cours de la journée, celle du Dromadaire augmente lentement pour arriver, au moment des plus fortes températures extérieures, à une température limite qui est proche de 41 °C et qu’il ne peut dépasser sous peine de mort. Il se protège alors par le mécanisme de la sudation, qui provoque par évaporation l’abaissement de sa température interne.

On estime que le retard apporté au mécanisme de la sudation lui permet d’économiser une quantité d’eau évaluée à 8 litres par jour, ce qui est énorme. D’autre part, et c’est là un phénomène d’adaptation extraordinaire, le Dromadaire peut perdre sans dommage de 25 à 32 p. 100 de la teneur en eau de son organisme, ce qui correspond environ à 100 kg ou au tiers du poids total. Aucun autre Mammifère n’en est capable. Les hommes du désert ne supportent que très difficilement une perte d’eau de 10 p. 100.

La circulation sanguine joue aussi un grand rôle dans la résistance à la sécheresse. Le sang reste fluide et garde un volume et une composition plasmatique à peu près constants. C’est la quantité d’urine évacuée qui est diminuée (elle peut s’abaisser de 7 litres par jour à un demi-litre seulement).

Une fois arrivé à l’étape, le Dromadaire est capable de reconstituer presque instantanément son stock de liquide. Il absorbe couramment 100 litres d’eau en dix minutes, mais on cite des animaux qui, à leur arrivée à l’oasis, absorbent jusqu’à 150-180 litres d’eau. On a même vu un Dromadaire en absorber en une seule fois 200 litres. Il s’ensuit une réhydratation immédiate des tissus de l’animal, qui reprend alors toute sa vigueur.

Le Dromadaire est un bon instrument de transport. Il peut être chargé à 200 kg. Avec cette charge, il peut faire des étapes journalières de 40 km sur terrain moyennement accidenté, dans les caravanes.

Le Chameau de la Bactriane est aussi un excellent moyen de transport, mais il est plutôt adapté aux pays froids. Il n’a pas de résistance à la grande chaleur des déserts, mais il supporte des froids de – 20 °C.