Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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bronze (âge du) (suite)

L’âge du bronze apparaît précocement au Moyen-Orient, au cours du IIIe millénaire. Il gagne ensuite le secteur de la mer Égée, où s’épanouissent de brillantes civilisations, dont certaines sont déjà historiques. En Europe, il connaît un développement original entre 1800 et 700 av. J.-C., s’attardant quelques siècles de plus dans les régions nordiques. En Afrique, ses manifestations sont plus sporadiques, mais on connaît des gravures rupestres (Haut-Atlas) et des centres de métallurgie du cuivre (Mauritanie). En Extrême-Orient, cuivres et bronzes sont fabriqués quelques siècles avant l’ère chrétienne. Mais, en Chine notamment, il s’agit de périodes parahistoriques liées à la tradition de dynasties légendaires (Shang [Chang]). Dans les autres parties du monde, l’âge du bronze est inconnu à l’heure actuelle, bien que des outils de cuivre primitifs aient été signalés en Amérique centrale.


Les éléments de datation


Typologie comparée

La typologie comparée permet de suivre l’évolution chronologique et géographique des différents objets. Dans les régions occidentales, les haches sont d’abord simples, dérivées des haches en pierre. À ces haches plates succèdent les haches à rebords, munies de saillants empêchant le glissement latéral du manche. Avec les haches à talon, une butée médiane bloque l’extrémité du manche. Les haches à ailerons sont caractérisées par le rabattement des saillants latéraux. Enfin, au bronze final, les haches à douille creuse sont d’usage courant. Dans les régions méditerranéennes, d’autres variétés de haches à emmanchement vertical, comme nos modernes haches, existent très tôt, dérivées de modèles inventés en Iran. Elles seront peu en usage sur le continent, excepté dans les régions danubiennes (Roumanie, Hongrie), où de magnifiques haches de combat ou des haches-marteaux décorées succéderont aux premières haches en cuivre (région de la Tisza). L’armement suit une évolution constante : au bronze ancien, les poignards triangulaires et les hallebardes complètent l’arc du guerrier. Au bronze moyen, les épées, ou rapières, sont effilées et destinées à frapper d’estoc, tandis qu’au bronze final sont fabriquées des lames parfois élargies, permettant de frapper de taille et d’estoc. On pourrait multiplier ces exemples à propos des types de poteries ou des parures, des épingles en particulier, dont la variété et l’évolution réjouissent les typologistes.


Stratigraphies

Les stratigraphies, fournies par les habitats, en grottes notamment, permettent de retrouver les séries de tessons de poterie ou de bronzes déposés successivement. De même, la dissection attentive d’un tumulus a pour objet de reconnaître les sépultures anciennes et des inhumations secondaires ou tardives, ou des apports de matériaux de périodes différentes.


Synchronismes

Les synchronismes avec les civilisations historiques sont rares et particulièrement précieux, bien que souvent difficiles à préciser. Toutefois, des échanges eurent lieu entre l’Europe continentale et les empires méditerranéens. Un exemple intéressant en est fourni par de petites perles en pâte vitreuse colorée en bleu et en vert par des sels de cuivre. Une variété en tube annelé, fabriquée en Méditerranée orientale et en Égypte de 1600 à 1300, fut exportée en France (Midi et Bretagne), en Europe centrale et dans les îles Britanniques, où on la retrouve dans des tombes de l’âge du bronze. D’autres variétés de bijoux, en ambre ou en coquillages, ont fait l’objet de trafics similaires permettant ces « cross-dating ».


Systèmes chronologiques

Les systèmes chronologiques fondés sur les études typologiques du matériel ont proposé des classifications schématiques des industries. L’un des plus anciens est celui du Suédois Oscar Montelius (1843-1921), qui divisa le bronze nordique en six périodes (Mont. I à VI). Un autre système fut créé par l’Allemand Paul Reinecke, qui divisa le bronze du sud de l’Allemagne en quatre périodes (Reinecke A, B, C, D), suivi des périodes Hallstatt A-D (Hallstatt étant une nécropole de l’âge du fer d’Autriche). En réalité, les périodes Hallstatt A et B de Reinecke correspondent au bronze final. Ces systèmes sont encore utilisés par les chercheurs scandinaves et allemands. En France, à la fin du siècle dernier, Gabriel de Mortillet (1821-1898) distingua une phase ancienne, ou Morgien (de Morges, station lacustre de Suisse), et une phase récente, ou Larnaudien (du nom du dépôt de Larnaud, Jura). Plus tard, Joseph Déchelette (1862-1914), s’inspirant de Montelius, distingua quatre phases du bronze (I à IV). Actuellement, on emploie plus volontiers, à la suite des travaux de J. J. Hatt entre autres, les termes de bronze ancien, moyen et final, avec des correspondances avec les classifications de Montelius ou de Reinecke.


Procédés modernes d’analyse

Les procédés modernes d’analyse apportent des moyens de datation nouveaux. La méthode du radiocarbone, fondée sur la mesure de la radio-activité qui subsiste dans les matières organiques, a fourni de nombreuses dates absolues pour l’âge du bronze. On ne saurait non plus négliger l’apport de l’analyse pollinique, qui permet de restituer végétations et climats. Mais, parmi les techniques modernes, les analyses métallurgiques, et en particulier spectrographiques, sont de première importance. Elles ont montré que les premiers cuivres étaient souvent alliés à des impuretés notoires, comme l’arsenic, et que les compositions chimiques évoluaient. Des bronzes mixtes à arsenic et à étain faible sont communs au bronze ancien, concurremment à des armes en cuivre, à des hallebardes et à des haches plates. Au bronze moyen les teneurs en étain augmentent, et au bronze final vient presque régulièrement s’ajouter le plomb. La recherche des sources de minerais à partir des impuretés reste aléatoire. Tout en demeurant hypothétique, l’origine de certains cuivres à arsenic pourrait être ibérique ; celle de cuivres à nickel serait alpine, tandis que les cuivres chalcolithiques de Hongrie seraient en cuivre très pur.