Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bosch (Jheronimus ou Hiëronymus, en fr. Jérôme) (suite)

Interpréter l’œuvre de Bosch d’une façon scientifique ou simplement objective est assurément une entreprise difficile. Le prétendu Enfant prodigue, que d’aucuns appellent actuellement le Vagabond, était sans doute parfaitement intelligible à l’époque. La diversité des interprétations modernes montre à quel point le message de ce panneau — pourtant universellement reconnu comme un chef-d’œuvre — nous est devenu incompréhensible. D’autre part, nous avons tendance à prêter aux génies du passé des intentions et des connaissances qu’ils n’ont jamais pu avoir. Il est en effet surprenant de trouver dans les tableaux de Bosch des reptiles à têtes multiples, monstres que nos biologistes créent actuellement en laboratoire, mais peut-on imaginer que le peintre avait prévu la parabiose ? Est-il permis de dire qu’il connaissait d’une façon ou d’une autre les secrets du subconscient dévoilés par nos psychologues ?

Henri Focillon ne disait-il pas qu’avec Bosch tout le dessous du Moyen Âge s’est vidé ? Le bestiaire fantastique, l’imagerie populaire, la mystique, l’hagiographie et la littérature pieuse ou moralisante, les mystères, le théâtre, les travestis des processions, les Évangiles apocryphes, le charlatanisme, la « vauderie », les calembours et la langue verte, les us et coutumes du peuple brabançon, l’exotisme des récits de voyage, sans oublier l’abracadabra de l’astrologie, de la superstition, de la sorcellerie et de l’alchimie..., voilà les sources possibles de Bosch, qui fut avant tout — on l’oublie trop souvent — un artiste incomparable. Bosch est en effet un personnage trop complexe pour que les exégèses qui tendent à le ravaler au rang d’un esprit délirant, d’un drogué ou d’un inventeur de rébus puissent paraître tant soit peu admissibles. Que son œuvre reflète les courants et les conflits spirituels qui se manifestaient à son époque dans le nord de l’Europe occidentale, nul ne le conteste ; mais il convient d’insister aussi sur le profond enracinement de cet œuvre dans son terroir.

R. H. M.

 P. Lafond, Hieronymus Bosch. Son art, son influence, ses disciples (Van Œst, 1914). / M. J. Friedländer, Die altniederländische Malerei, Geertgen von Haarlem und Hieronymus Bosch (Berlin, 1927 ; nouv. éd., Leyde-Bruxelles, 1969) ; Hieronymus Bosch. Ein Vortrag (La Haye, 1941). / C. de Tolnay, Jérôme Bosch (Bâle, 1937 ; nouv. éd., Laffont, 1967). / M. Brion, Hieronymus Bosch (Plon, 1938). / X. de Salas, El Bosco en la literatura española (Barcelone, 1943). / L. von Baldass, Hieronymus Bosch (Vienne, 1945 ; nouv. éd., 1959). / J. Combe, Jérôme Bosch (Tisné, 1946). / J. De Boschère, Jérôme Bosch (Éd. du Cercle d’art, Bruxelles, 1947) ; Jérôme Bosch et le fantastique (A. Michel, 1962). / W. Fraenger, Hieronymus Bosch, das tausendjährige Reich (Cobourg, 1947 ; trad. fr. le Royaume millénaire de Jérôme Bosch, Denoël, 1966). / J. Mosmans, Jeronimus Anthoniszoon van Aeken alias Hieronymus Bosch (Bois-le-Duc, 1947). / J. V. L. Brans, Hieronymus Bosch, el Bosco, en el Prado y en el Escorial (Barcelone, 1948). / D. Bax, Ontcijfering van Jeroen Bosch (La Haye, 1949) ; Beschrijving en poging tot verklaring van het Tuin der Onkuisheiddrieluik van Jeroen Bosch, gevolgd door kritiek op Fraenger (Amsterdam, 1956). / J. Leymarie, J. Bosch (A. Somogy, 1949). / J. R. Teixeira Leite, Jheronimus Bosch (Rio de Janeiro, 1956). / C. A. Wertheim-Aymès, Hieronymus Bosch (Amsterdam, 1957) ; Die Bildersprache des Hieronymus Bosch (La Haye, 1961). / R. L. Delevoy, Bosch (Skira, Genève, 1960). / A. Bosman, Hieronymus Bosch (Berlin-Munich, 1962 ; trad. fr. Jérôme Bosch, Gérard, Verviers, 1964). / M. Gauffreteau-Sévy, Jérôme Bosch (Éd. du Temps, 1965). / M. Cinotti, L’Opera completa di Bosch (Milan, 1966 ; trad. fr. Tout l’œuvre peint de Jérôme Bosch, Flammarion, 1967). / P. Robin, Ambiguïté de Jérôme Bosch (Gand, 1967). / C. Linfert, Jheronimus Bosch (Cologne, 1970 ; trad. fr.. Cercle d’art, 1972).
— Catalogues d’expositions : Jeroen Bosch. Noordnederlandsche Primitieven (Rotterdam, 1936). / Jheronimus Bosch (Bois-le-Duc, 1967).

Bosnie-Herzégovine

En serbo-croate Bosna i Hercegovina, une de six républiques de la Fédération yougoslave.


Elle s’étend sur le cinquième du territoire yougoslave (51 129 km2) et regroupe le sixième de la population du pays (3 872 000 hab.). Capit. Sarajevo.

La population est très inégalement répartie en raison de la diversité des milieux naturels : les densités (75 hab. au km2 en moyenne) varient de 20 à 200 habitants au kilomètre carré. La République se compose de 106 communes (Općine), comportant chacune de 9 à 130 habitats. Deux communes seulement ont plus de 100 000 habitants ; quatre (les plus petites) en ont de 5 000 à 10 000 ; la superficie de ces communes varie de quelques dizaines de kilomètres carrés à plus de 1 200 km2. 66 communes ont moins de la moitié de leur population active dans l’industrie ; 40 en ont plus de la moitié (dont 14 plus de 70 p. 100).


Le milieu

Le territoire de la République a la forme d’une amande ou d’un triangle dont la pointe est tournée vers le nord-ouest, en direction de la Croatie, et dont la base, à l’est, se confond à peu près avec le cours de la Drina, qui forme la frontière avec la république de Serbie. Vers le nord, la Bosnie est limitée par la Save, dont la rive gauche se trouve en Croatie ; au sud, la République n’accède qu’à une portion minime (quelques kilomètres) du littoral adriatique, sans port, les villes de l’embouchure de la Neretva, Ploče et Metković, étant en Croatie. Ce territoire correspond aux régions occupées par l’Autriche-Hongrie en 1878 et annexées en 1908 ; les frontières historiques ont été respectées lors du découpage de la Fédération yougoslave.

Le milieu comprend des montagnes et des vallées, peu de plaines. Les montagnes appartiennent à l’ensemble dinarique et se composent de deux domaines.

Les chaînes du Karst prolongent celles de Dalmatie et de Croatie : hautes échines s’élevant à plus de 2 000 m d’altitude, généralement boisées et dont les pentes et les sommets offrent des pâturages d’été aux troupeaux transhumants, composant le paysage de Bilo (montagne). Des poljés karstiques s’allongent du nord-ouest au sud-est, à des altitudes variant entre 500 et plus de 1 000 m : le fond, en partie alluvial et inondé chaque hiver, porte des cultures céréalières. Les bourgs, marchés et centres d’artisanat, ont donné leurs noms à ces poljés : à l’ouest de la Neretva, Glamoč, Kupres-Vukovo, Livno, Duvno ; à l’est, Nevesinje, Dabar-Fatnica. Les poljés les plus proches du littoral et le réseau de la Neretva, seul fleuve s’écoulant vers l’Adriatique, forment les paysages de Rudine (montagnes et plateaux de moyenne altitude, lieux d’étape au printemps et en automne des transhumants) et des Humine (plaines semées de petites collines, terrains de parcours d’hiver). Le fond de la vallée de la Neretva est tapissé de cultures de maïs, de vergers et d’un peu de vigne ; la seule production importante est le tabac.