Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bassin sédimentaire (suite)

D’autre part, la persistance de l’affaissement est nécessaire pour maintenir des conditions propices à la sédimentation. Si la subsidence cesse, l’accumulation fait progressivement diminuer la profondeur ; passé un seuil, l’agitation des eaux atteint le fond et empêche le dépôt des sédiments : il en résulte une lacune qui dure tant que la subsidence ne reprend pas. Ainsi, dans le nord du bassin de Londres, l’axe de soulèvement de Market Weighton a joué du Lias au Crétacé inférieur : les dépôts du Lias et surtout du Jurassique y sont insignifiants, ce qui entraîne la disparition de la cuesta jurassique entre la Derwent et la Humber.

Si, temporairement, l’affaissement non seulement s’annule, mais fait place à un soulèvement, il peut y avoir exondation et érosion des sédiments récemment déposés ; lorsque la subsidence reprend, les nouvelles strates sont transgressives : c’est ainsi que, dans le secteur sud-ouest du bassin de Londres, la cuesta crétacée vient déborder la cuesta jurassique dans les Blackdown Hills.


L’individualisation du bassin

Elle peut résulter d’un soulèvement d’ensemble s’accompagnant de gauchissements qui accentuent la forme de cuvette. Mais elle peut aussi dériver d’un simple arrêt de la subsidence conduisant au comblement de l’ombilic, particulièrement dans les bassins continentaux. Le plus souvent, c’est par des mouvements différenciés que se réalise l’émersion : à des secteurs nettement relevés, essentiellement localisés sur les bordures, se juxtaposent des zones de subsidence ralentie, où séjournent des lacs que l’accumulation tend à combler ; telle était la situation du Bassin parisien à l’Oligo-Miocène.

À ces déformations à grand rayon de courbure s’ajoutent des accidents localisés de deux types. Ce sont, d’une part, des ondulations ayant généralement joué à plusieurs reprises au cours même de la phase sédimentaire et s’accentuant lors de l’émersion. Le Bray, dans le Bassin parisien, et le Weald, dans celui de Londres, évidés en « boutonnières » par l’érosion, en sont des exemples classiques. Ce sont, d’autre part, des flexures et des failles, fréquemment liées au jeu différencié de panneaux du socle sous-jacent ; mais il existe aussi de nombreuses failles qui recoupent les accidents antérieurs, telles les failles méridiennes de la Haute-Marne (Wassy), en rapport avec celles qui ont affaissé les plaines de la Saône.

Suivant les modalités de leur individualisation, les bassins sédimentaires peuvent être classés de façon schématique en quelques types.
— Dans un premier type peuvent être groupés les bassins qui s’apparentent le mieux à la forme de cuvette. Le Bassin parisien en est l’exemple le plus achevé, malgré les dissymétries soulignées. Dans l’ensemble, les couches plongent de la périphérie vers le centre de la cuvette, sauf dans la partie méridionale, où s’est localisé le dernier ombilic de la phase sédimentaire. Ce dispositif est d’ailleurs mieux réalisé dans le secteur oriental qu’à l’ouest, où des ondulations N.-O. - S.-E. (Bray, Boulonnais) et des blocs faillés (Perche) compliquent singulièrement les données de la structure.
— Un deuxième type, bien représenté en Europe centrale, regroupe les bassins dans lesquels les déformations ont été à la fois plus énergiques et plus localisées : ce sont les bassins faillés. Le bassin de Thuringe, par exemple, a la forme d’un quadrilatère dominé par les escarpements de faille, ou flexure, des massifs du Harz au nord, du Thüringerwald au sud et de la Bohême à l’est. Des dislocations nombreuses y morcellent le relief et engendrent un certain désordre des lignes directrices, en particulier dans le dispositif des cuestas, qui apparaissent très discontinues.
— Dans un troisième type peuvent être rangés les bassins dont une bordure s’est trouvée incorporée à une chaîne plissée. Il en résulte une profonde dissymétrie du relief, les puissantes accumulations détritiques de piémont masquant une partie importante de la cuvette. Ainsi, le Bassin souabe-franconien, en Allemagne, ne présente les traits d’une cuvette sédimentaire que dans sa moitié septentrionale ; au sud du Danube, les assises secondaires sont recouvertes par 2 500 m de molasse. Il en est de même dans le Bassin aquitain, en France.
— Un quatrième type, enfin, comprend les bassins qui n’ont que partiellement émergé et qui sont donc encore fonctionnels. C’est le cas de la partie septentrionale du bassin de Londres, dont les plateaux crétacés plongent sous la mer du Nord et dont l’ombilic doit se situer approximativement à l’embouchure du Rhin. De la même façon, la cuvette du Mississippi est encore partiellement noyée par les eaux du golfe du Mexique, où 1 200 m de sédiments quaternaires se sont accumulés.


Les modalités de la morphogenèse

La mise en valeur des formes structurales est parfois fort simple : ainsi, dans la partie méridionale du bassin du Mississippi, en bordure du golfe du Mexique, les couches crétacées et tertiaires ont été faiblement basculées vers la mer et tronquées par une surface de régression inclinée dans la même direction. Les rivières se sont établies conformément à cette pente et, en creusant leur vallée, ont mis en valeur les contrastes lithologiques et dégagé des cuestas.

Mais, plus souvent, c’est par une évolution complexe que le relief actuel s’est élaboré. La partie orientale du Bassin parisien en fournit un bon exemple : dès le Jurassique et surtout au Crétacé, les couches triasiques et jurassiques ont été basculées vers le centre du Bassin. Une émersion temporaire s’en est ensuivie et a permis le façonnement d’un aplanissement que la mer transgressive du Crétacé moyen et supérieur a fossilisé de ses dépôts. À l’Éocène, un nouveau gauchissement des couches s’est produit en direction du centre de la cuvette et a déclenché une seconde étape de la morphogenèse : le Crétacé et, plus à l’est, le Jurassique ont été tronqués par une surface polygénique oligo-miocène. Celle-ci fut basculée vers le nord au Miocène, époque à laquelle un golfe marin pénétra jusque sur le flanc méridional de l’Ardenne. C’est alors que la Moselle, la Meuse et la haute Marne établirent leur cours conformément à la pente de la topographie. En creusant leur vallée, ces rivières ont dégagé les reliefs de cuesta avant que d’ultimes déformations ne soulèvent l’Ardenne et ne rétablissent la pente générale en direction de la région parisienne.