Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

végétal (suite)

Chez les végétaux supérieurs existent des tissus, ensembles de cellules bien différenciées, qui assurent des fonctions particulières de protection, de conduction, de soutien, de nutrition (v. tissu végétal). On peut y reconnaître des organes divers : racines, qui arriment la plante dans le sol et assurent l’absorption des aliments minéraux et de l’eau ; tiges souvent aériennes, portant les bourgeons et les feuilles, par où se fait la conduction ; feuilles, dont le limbe est le siège principal de la nutrition carbonée ; des organes reproducteurs enfin, sporanges, anthéridies et archégones, ou fleurs suivant les groupes. Chez les Fougères, on observe l’alternance des deux phases sporophytique et gamétophytique (prothale), mais, outre le fait que la plante feuillée ne représente pas le même stade que chez les Mousses, les tissus sont beaucoup mieux différenciés et les organes bien nettement reconnaissables. Enfin, chez les Phanérogames, on distingue toujours nettement l’appareil radiculaire, les tiges, les feuilles et les fleurs*, organes sexués qui assurent le passage à la génération suivante par l’intermédiaire de la graine* formée dans le fruit* ; même si, dans de nombreuses espèces, des fleurs attirent peu l’œil (Amentifères par exemple), toutes possèdent cette structure, que la plante soit de taille modeste (petite Pâquerette) ou très grande (Séquoia), qu’elle soit dressée ou rampante, aérienne ou aquatique et que la durée de sa vie soit inférieure à un an ou atteigne plusieurs siècles.

J.-M. T. et F. T.

végétation

Ensemble des espèces végétales vivant dans un même lieu.


Cette définition très courante associe des faits de deux ordres. D’une part, il s’agit d’ensembles de végétaux dont il n’est pas indispensable, au moins au premier abord, de connaître les noms et les caractéristiques de chacun des constituants pour les définir et les décrire : on parle de forêt, de prairie, de steppe, de savane, de lande..., et la plupart des langues du monde distinguent ainsi des types de végétation. D’autre part, ces ensembles de végétaux sont localisés dans un espace plus ou moins étendu. L’étude de la végétation est d’abord celle de la forme, de la physionomie des végétaux et des ensembles que ceux-ci constituent (que l’on qualifie en général de formations végétales) sur une certaine portion de l’espace terrestre, ce qui implique l’étude des relations entre ces formations et les conditions du milieu.


Flore et végétation

Il est essentiel de distinguer flore et végétation. La flore est d’abord la totalité des plantes existant sur un territoire donné à un moment donné. Une démarche précise et analytique recense les individus végétaux vivants en tant que représentants d’espèces. La liste de ces plantes est répertoriée dans un catalogue (appelé Flore de ce territoire) auquel on peut se référer pour les identifier. La flore, par ailleurs, représente le potentiel naturel de colonisation végétale d’un pays : si une parcelle d’espace est libérée de sa couverture végétale précédente pour une raison quelconque (incendie, inondation, chute d’un arbre...), ce nouvel espace vivant « découvert » est colonisé avant tout par des plantes déjà présentes aux voisinages immédiats et dans des conditions de milieu analogues. Enfin la flore, stock actuel d’espèces vivantes sur un territoire, ne s’est constituée que progressivement, lentement au gré des conditions d’un passé qui a pu être fort long : création et disparition d’espèces, enrichissement ou appauvrissement, diversification et modification dans leur comportement.

Tandis que la flore est d’abord le produit d’une histoire, la végétation est avant tout l’expression des conditions du milieu actuel. Elle peut être, selon que ces conditions sont favorables ou non, luxuriante ou maigrichonne. La forêt peut être belle, haute et épaisse dans un cas, basse et dégarnie dans l’autre : or, ces deux forêts peuvent comporter beaucoup de plantes identiques : mêmes arbres, mêmes plantes du sous-bois... On voit, par cet exemple, que ce n’est pas d’abord la flore, mais les conditions de milieu qui déterminent la qualité de la végétation.

À certains égards, ces deux notions peuvent même se révéler antinomiques. À une végétation très bien venue peut correspondre une flore très pauvre, par exemple une belle pinède ou une belle pessière : l’abondance d’une espèce qui est édificatrice de la formation (l’espèce Pin, l’espèce Épicéa) est telle qu’elle réduit ou supprime la représentation d’autres espèces végétales. Au contraire, une corniche calcaire à vires et à ressauts peut être colonisée par une flore très riche, constituant une végétation naine, clairsemée et couvrant de façon discontinue ce biotope : tel est le cas des Xerobrometa de l’Europe occidentale sur les rebords bien dégagés des plateaux calcaires de basse altitude.

L’étude de la végétation et des paysages végétaux s’appuie essentiellement sur leur physionomie, et les formes biologiques d’ensemble et de détail sont primordiales. Elles se développent au-dessus du sol, lieu géométrique extraordinairement privilégié, qui marque le contact de deux milieux très différents : dans un sens, la fin du milieu souterrain, lui-même sommet de l’empilement des couches solides de l’écorce terrestre ; dans l’autre sens, le début de la basse atmosphère. Aussi, vivant dans deux milieux, ces formes biologiques sont d’abord sous la dépendance des conditions du sol qui les porte et du climat.

On peut ainsi comprendre leur similitude avec les formations végétales qu’elles créent sur des sols et sous des climats analogues. À l’échelle de la localité, conditions édaphiques et conditions climatiques sont aussi importantes à considérer l’une que l’autre pour rendre compte de ces formes biologiques. Par contre, à l’échelle de la planète, le milieu souterrain, à cause d’abord de la diversité des roches mères, est beaucoup plus diversifié que le milieu aérien. Les grandes formations végétales du globe se disposent selon un plan zonal, qui est d’abord le plan des grandes zones climatiques. Par exemple, dans sa structure et sa physionomie, la forêt tropicale humide amazonienne ressemble beaucoup aux forêts de la cuvette congolaise et à celles de l’Indonésie, bien que les espèces qui les composent soient différentes. Dans le même ordre d’idées, on peut distinguer dans le grand domaine forestier qui s’étend dans l’est de l’Amérique du Nord, entre les Grands Lacs et la Floride, une dizaine de grandes régions naturelles, caractérisées chacune par un climat forestier particulier (chênaie à Hickorys [Carya ovata, C. cordiformis], chênaie à Châtaigniers [Castanea dentata], chênaie à Hêtres [Fagus grandifolia]). Mais toutes ces régions appartiennent à une seule classe de formation végétale, regroupant les divers faciès de la forêt décidue tempérée.