Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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tissage (suite)

Les métiers à tisser

Le matériel de tissage peut être classé en quatre grandes catégories.

• Métier à main. Tous les mouvements nécessaires pour réaliser un tissu sont assurés par le tisseur. Ce type de matériel est encore employé pour des articles spéciaux ou qui ne se fabriquent qu’en petits métrages ; c’est le métier d’échantillonnage, d’essais ou d’études par excellence.

• Métier mécanique ou ordinaire. Il comporte un certain nombre de mécanismes synchronisés, mais le changement de canette est effectué à la main.

• Métier automatique. Il ressemble beaucoup au métier mécanique, mais le changement de canette n’est plus manuel.

• Machine à tisser ou métier sans navette. Dans ce métier, l’insertion de la trame n’est pas faite par le moyen classique d’une navette, mais par tout autre dispositif.

Mais quelle que soit la catégorie à laquelle ils appartiennent, deux mouvements importants sont à considérer : le mouvement des fils de chaîne et le mouvement du fil de trame, et chaque métier ou machine à tisser comporte les mêmes éléments essentiels (fig. 13). Les métiers à tisser mécaniques ou automatiques comportent un certain nombre de dispositifs synchronisés placés sur deux bâtis latéraux. Ces deux bâtis reliés par des entretoises supportent les coussinets dans lesquels tournent deux arbres : un arbre supérieur, ou vilebrequin, entraîné par un moteur électrique, commande le mouvement du battant par l’intermédiaire de deux bielles ; un arbre inférieur, entraîné par l’arbre supérieur dans le rapport de 1 à 2, déclenche par l’intermédiaire d’excentriques le mouvement de la navette, la levée des fils de chaîne, etc. Le mouvement de la navette, ou « chasse de la navette », est donné par un sabre, sorte de levier vertical qui la pousse rapidement et lui donne suffisamment de vitesse pour traverser toute la largeur du battant. L’évolution des fils peut se faire par groupes ; les lisses sont alors réunies dans des lames qui sont commandées par excentriques ou par mécanique d’armures, appelée également ratière ; mais les fils peuvent devoir évoluer individuellement ; dans ce cas, la commande de la lisse est assurée par une mécanique du type Jacquard.

Le choix de la commande est dicté par l’armure à réaliser. Pour des armures dont le nombre de fils évoluant différemment ne dépasse pas huit, lesquels peuvent donc être rentrés sur huit lames, on fait appel aux excentriques. Au-delà de huit lames et jusqu’à trente-deux lames, on utilise la mécanique d’armures. Celle-ci comprend toujours un dispositif de sélection des lames agissant par cartons ou cartes perforées et un dispositif de commande des lames. La mécanique de type Jacquard permet la commande individuelle des fils ou la commande par petits groupes réunis par arcades et est utilisée pour les armures pour lesquelles plus de trente-deux fils travaillent différemment. La mécanique Jacquard comprend des organes de sélection des fils agissant par cartes perforées et une commande mécanique pour la levée des arcades sélectionnées.

Les métiers à tisser comportent en outre différents dispositifs de sécurité et de contrôle. Ce sont notamment les casse-fils, casse-trame qui arrêtent le métier dès qu’un fil vient à se rompre, et le tâteur de trame, qui détecte l’épuisement du fil sur la canette afin que celle-ci soit remplacée par une canette pleine. Sur les métiers automatiques, le changement de canettes se fait automatiquement et plusieurs systèmes permettent de les stocker sur le métier. Les principaux sont :
— le système à barillet, qui est un distributeur rotatif comprenant deux plateaux circulaires à encoches sur lesquels les canettes sont posées manuellement ;
— le système à caissettes, qui présente par rapport au précédent l’avantage de contenir jusqu’à 140 canettes contre 18 ou 24 pour le barillet et qui évite la pose manuelle de chaque canette ;
— le système à tête de canetière incorporée sur le métier à tisser, qui supprime toute manipulation et transport de canettes.

Sur les métiers à barillet, à caissettes ou à tête de canetière incorporée, la navette utilisée est évidée. Lorsque le tâteur détecte l’épuisement du fil de trame, un marteau donne une violente percussion à une canette pleine en réserve. Sous ce choc, la canette vide est éjectée de la navette, et la nouvelle canette garnie de fil vient prendre sa place, des pinces spéciales assurant automatiquement la fixation de la canette dans la navette.

Pour le tissage des articles ayant des fils de trame de qualité, de coloris ou de titre différents, on utilise des métiers à plusieurs navettes. À cet effet, le battant est équipé de plusieurs boîtes destinées chacune à recevoir une navette avec une canette d’une trame différente. Un dispositif de sélection commandé par carton perforé amène en position de travail à la hauteur du battant la navette qu’on désire utiliser.

• Dispositifs annexes
Enfin, certains métiers sont équipés de dispositifs annexes permettant le tissage des éponges, des velours, des tapis et des gazes.

• Les tissus éponges présentent sur une ou deux faces des bouclettes et sont obtenus sur des métiers dont le battant possède une course variable. Le tissage est réalisé avec deux chaînes ayant des tensions différentes, ce qui permet aux fils de la chaîne non tendue, lorsque la course du battant est maximale, de former des boucles.

• Les tissus velours présentent à leur surface des pompons ou des aigrettes très serrés les uns contre les autres, maintenus par les fils du tissu. On distingue deux grandes catégories de velours suivant que l’effet de velours est donné par les fils de trame ou par les fils de chaîne.
— Les velours par trame sont obtenus sur des métiers classiques et comprennent une seule chaîne et deux trames ; certaines duites forment l’effet de velours. Après tissage, on coupe alors toutes les brides des duites de velours à l’aide d’une machine qui comprend une série de couteaux triangulaires, et ces brides en s’épanouissant forment l’aspect velouté définitif du tissu. Selon la répartition des points de liage, on peut obtenir des velours unis, des velours à côtes dits « velvets » ou des velours fantaisie. On réalise également certaines fantaisies sur des velours unis en écrasant le poil du velours par passage du tissu entre deux cylindres métalliques chauffés, pressés l’un contre l’autre et dont l’un porte un dessin gravé.
— Les velours par chaîne sont obtenus sur des métiers à verges. Ils comprennent toujours deux chaînes (la chaîne de fond, qui permet de réaliser le liage du tissu, et la chaîne de poil, qui donne l’effet velours) et une trame. Lors du tissage, on insère périodiquement dans la foule, à la place de la navette, une verge, ou sabre, sorte de baguette métallique. Lorsque la foule se referme, les fils de poil qui ont été levés forment ainsi des boucles sur le sabre. Si ce sabre porte à une de ses extrémités une lame tranchante, les boucles du fil de poil seront coupées lors du retrait du sabre et on obtiendra ainsi un velours coupé ; si le sabre ne porte pas de lame on obtient un velours bouclé. La hauteur du velours est commandée par la hauteur du sabre.

La panne est un velours par chaîne à poils couchés.

La peluche est un velours à longs poils ; enfin, on tisse en velours par trame et en velours par chaîne des tissus imitant l’astrakan en utilisant soit en trame, soit en chaîne de gros fils très fortement tordus. Lors de la coupe, les brides produites se détordent régulièrement et forment à la surface du tissu un effet de bouclé caractéristique.

• Les tapis sont également obtenus sur métiers à tisser équipés de sabres.