Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

syllogisme (suite)

On peut énoncer alors les lois suivantes.
(α) Dans a et e, propositions universelles, le sujet est universel.
(β) Dans i et o, propositions particulières, le sujet est particulier.
(γ) Dans a et i, propositions affirmatives, le prédicat est particulier.
(δ) Dans e et o, propositions négatives, le prédicat est universel.


Les figures du syllogisme (catégorique)

Un syllogisme est constitué par trois propositions dont chacune prédiqué catégoriquement quelque chose d’un sujet. Les deux premières sont posées et constituent les prémisses du syllogisme. La troisième est inférée et constitue la conclusion (C) du syllogisme. Indépendamment de sa fonction sujet ou prédicat, chaque prémisse doit contenir un terme commun, dit moyen terme (t). L’inférence se fait en éliminant t, de sorte que la conclusion est formée des deux termes non communs des prémisses, dits termes extrêmes. Le terme extrême qui est prédicat dans la conclusion est appelé le grand terme (g), et celui qui est sujet le petit terme (p). Enfin, par convention, la prémisse à laquelle est emprunté le grand terme est appelée la majeure (M), et celle à laquelle est emprunté le petit terme la mineure (m).

Comme le moyen terme figure dans les deux prémisses et qu’il peut être soit sujet, soit prédicat dans chacune, on a quatre combinaisons, qui constituent les quatre figures du syllogisme :


Les modes du syllogisme

Chacune des trois propositions d’un syllogisme peut être d’une des formes a, e, i ou o, de sorte que chaque figure peut donner lieu à 43 = 64 réalisations, dont chacune est appelée un mode. Puisqu’il existe quatre figures, le nombre total des modes à considérer est donc 256. Il est toutefois évident que tous les modes ne constituent pas des raisonnements valides. Par exemple :
M Les baleines sont des mammifères a
m Quelques animaux marins sont des baleines i
C Les animaux marins sont des baleines a
est un raisonnement incorrect. Le mode aia n’est pas concluant : on ne saurait conclure universellement en présence d’une prémisse particulière.

Les cinq règles suivantes permettent d’éliminer 52 des 64 combinaisons possibles pour une figure.

Règle 1. Les deux prémisses ne peuvent être négatives. Sont donc exclues les combinaisons de la forme eex, eox, oex, oix et oox, soit 16 modes.

Règle 2. Les deux prémisses ne peuvent être particulières. Sont donc exclues les combinaisons de la forme iix, iox, oix et oox déjà exclues, soit 12 nouveaux modes.

Règle 3. Si les deux prémisses sont affirmatives, la conclusion ne peut être négative. Sont donc exclues les combinaisons aae, aao, aie, aio, iae, ioa et iie, iio qui le sont déjà, soit encore 6 modes.

Règle 4. Si une prémisse est négative, la conclusion ne peut être affirmative. On exclut donc, parmi les modes restants qui se terminent par a ou i, tous ceux qui contiennent un e ou un o, soit 12 modes.

Règle 5. Si une prémisse est particulière, la conclusion ne peut être universelle. On exclut ainsi, dans ce qui reste encore, parmi les modes qui se terminent par a ou e, tous ceux qui contiennent un i ou un o, soit 6 modes.

Il reste donc finalement
64 – (16 + 12 + 6 + 12 + 6) = 64 – 52 = 12
modes, que nous numérotons de 1 à 12 (tableau 1).

Le dernier pas consiste à étudier, en fonction de la position des termes dans chaque figure, lesquels de ces 12 « candidats » sont valides. Pour cela, nous posons la loi générale suivante : le moyen terme doit être universel dans une des prémisses au moins. On obtient les résultats du tableau ci-après en notant + les modes concluants, (+) les modes concluants mais impliqués par les précédents et – ceux qui ne le sont pas.

Montrons, sur l’exemple de la première figure, la façon de raisonner pour parvenir à ces résultats. Si m était négative, C le serait aussi (Règle 4) et g serait universel (δ). Donc, g serait universel dans M (définition de g) et M serait négative (δ). Cela contredit la Règle 1. Donc, m ne peut être que a ou i, ce qui élimine les modes 3, 5, 6 et 11. D’autre part, dans m, t est particulier (γ). La loi générale impose qu’il soit universel dans M, où il est sujet. Donc, M ne peut être que a ou e (α), ce qui élimine les modes 10 et 12. Enfin, « tout p est g » implique « quelques p sont g » ; donc aaa implique aai. D’une manière analogue, eae implique eao. Les modes 2 et 8 sont superflus.

Pour des raisons mnémotechniques, la tradition a donné un nom à chacun des 19 modes et les a arrangés dans un ordre canonique. Le tableau 2 reproduit cette liste et fournit un équivalent dans le symbolisme de la logique des prédicats.

L’adjonction d’une prémisse supplémentaire pour aai et eao résulte de ce que les Anciens n’utilisaient jamais une proposition de la forme « tous les a sont b » lorsque l’extension du terme a était vide, mais que l’expression (∀x)(ax ⊃ bx) est trivialement vraie s’il n’existe pas de x tel que a.

Le sens des voyelles dans la nomenclature est évident. Quant aux consonnes, tout au moins à certaines d’entre elles, elles résultent de l’idée que les modes de la première figure sont immédiatement fondés et que ceux des autres figures se justifient en les y réduisant. C’est ainsi que la consonne initiale est toujours celle du mode auquel peut se faire la réduction : Darapti, Disamis, Datisi et Dimatis se réduisent à Darii. La consonne « s » indique qu’il faut procéder en permutant le sujet et le prédicat dans la proposition qui précède (conversion simpliciter). Ainsi Cesare se réduit à Celarent en convertissant simplement sa majeure
(∀x)(gx ⊃ ~ tx) en (∀x)(tx ⊃ ~ gx).
La consonne « p » indique qu’il faut permuter le sujet et le prédicat de la proposition qui précède, et, dans le symbolisme moderne, changer le quantificateur et l’opérateur (conversion per accidens). On passe ainsi de Darapti à Darii en transformant la mineure
(∀x)(tx ⊃ px) en (∃x)(px ⋀ tx).
La consonne « m » conduit à permuter les deux prémisses (mutare), donc à prendre p pour g et réciproquement. Ainsi passe-t-on de Dimatis à Darii. La consonne « c » indique la nécessité d’un raisonnement par l’absurde (per contradictionem). Ainsi, si Baroco n’était pas valide, on aurait
~ (∃x)(px ⋀ ~ gx),
soit
(∀x)(px ⊃ gx).
En présence de la prémisse qui n’est pas suivie d’un « c » ici, la majeure (∀x)(gx ⊃ tx), et en appliquant Barbara (commence par « B »), on conclut à (∀x)(px ⊃ tx), soit à
~ (∃x)(px ∧ ~ tx),
ce qui est incompatible avec la mineure. Les autres consonnes, enfin, n’ont pas de signification particulière.

J.-B. G.

➙ Aristote / Logique.

 W. V. O. Quine, Elementary Logic (New York, 1941, nouv. éd. Cambridge, Mass., 1966 ; trad. fr. Logique élémentaire, A. Colin, 1972). / A. Sesmat, Logique (Hermann, 1950-51 ; 2 vol.). / J. Dopp, Notions de logique formelle (Nauwelaerts, Louvain, 1965).