Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Suffren de Saint-Tropez (Pierre André de) (suite)

La campagne de 1782 étant ainsi achevée avec succès, il emmène son escadre se refaire à Sumatra, au vent de la côte de Coromandel. En janvier 1783, il fait une réapparition foudroyante sur les côtes indiennes et capture un convoi de navires marchands anglais. Entre-temps, Hughes s’est renforcé et dispose de 18 vaisseaux et de 1 414 canons ; les troupes anglaises investissent Cuddalore par la terre, mais Suffren, avec sa force de 15 vaisseaux (1 018 canons), accourt de Trincomalee pour secourir la place assiégée. L’escadre de Hughes se présente et Suffren manœuvre habilement pour la tirer au large, puis, ayant complété ses équipages, il livre le 20 juin 1783 le dernier combat de la campagne : c’est un affrontement classique en ligne de file, mais à la fin de la journée l’escadre anglaise doit se retirer et Cuddalore est délivré grâce à l’élan des Français. Les préliminaires de la paix de Versailles suspendent les hostilités sur cette victoire. Suffren, qui vient d’être nommé lieutenant général des armées navales par Louis XVI et bailli par l’ordre de Malte, connaît alors une extraordinaire popularité. Acclamé à son passage à l’île de France, il est ovationné à son arrivée à Paris, où il reçoit bientôt une charge de vice-amiral que le roi crée pour le récompenser. En 1787, au moment d’une nouvelle crise avec l’Angleterre, on lui confie le commandement de l’ensemble des forces navales, puis tout s’apaise : Suffren vit à Paris, où il représente le grand maître de l’ordre de Malte et où il mourra victime d’un accès de goutte mal soigné.

A. L.

 G. Labat, le Bailli de Suffren. Documents inédits sur la campagne de l’Inde, 1781-1784 (Féret, Bordeaux, 1901). / R. Boutet de Monvel, la Vie martiale du bailli de Suffren (Plon, 1930). / E. Davin, Suffren (Soc. d’éd. géogr., mar. et coloniales, 1947). / J. de La Varende, Suffren et ses ennemis (Éd. de Paris, 1948).

suicide

Meurtre de soi-même.


Il est d’usage de distinguer le suicide au sens strict, acte réussi sanctionné par la mort, la tentative de suicide, acte incomplet en raison de la survie du sujet, la velléité de suicide, qui est une action à peine ébauchée, l’idée de suicide, simple représentation mentale de l’acte, sous-tendue par un désir plus ou moins intense de mourir. En fait, la velléité ou la tentative de suicide ont souvent la même signification que le suicide.


Suicide sincère ou chantage au suicide

La distinction entre conduite suicidaire sincère et conduite suicidaire de chantage se révèle très difficile en pratique, et dangereuse, car la gravité ou la bénignité apparente des conséquences de l’acte suicidaire ne reflètent pas exactement les intentions réelles de la personne : la tentative de suicide n’est souvent qu’un suicide que l’on a empêché de réussir. Le fait que la décision soit habituellement prise à la légère n’autorise pas à croire à l’insincérité de son auteur. D’autre part, celui qui se sert du suicide comme d’un chantage ou d’une menace peut se tromper sur les risques véritables qu’il court et mourir sans l’avoir désiré tout à fait. C’est dire que la plus grande prudence s’impose dans l’interprétation des intentions du suicidant. Toute tentative d’autodestruction doit faire l’objet d’un examen médical psychiatrique.


Comportements qui équivalent à des suicides

Tels sont le refus d’un traitement ou d’une intervention chirurgicale importante, le refus de l’alimentation, les toxicomanies graves lorsque le sujet a été averti de sa déchéance prochaine, la recherche consciente et gratuite du danger vital que l’on rencontre par exemple chez les adolescents ou chez certains conducteurs de véhicules.


Étude clinique


Circonstances des suicides

Il ne fait pas de doute que les tentatives de suicide sont de plus en plus nombreuses actuellement, mais l’accroissement du taux des issues fatales est heureusement moindre. Cette extension de la conduite suicidaire apparaît comme un phénomène social répandu dans bien des pays. À son origine, on veut parfois voir le rôle des moyens modernes de diffusion de l’information relatant complaisamment les tentatives de suicide et favorisant les réactions d’imitation chez les sujets fragiles, surtout les adolescents. Mais il est certain qu’interviennent de multiples autres facteurs. On compte environ un suicide réussi pour huit tentatives.

Le suicide s’observe surtout dans la seconde moitié de la vie, chez des hommes trois fois sur quatre. La tentative, en revanche, intéresse davantage la première moitié de la vie, notamment l’adolescent et singulièrement le sexe féminin. Chez les vieillards, l’acte entraîne plus fréquemment la mort. La femme en période menstruelle ou puerpérale paraît particulièrement exposée au suicide. Le niveau intellectuel, les acquisitions scolaires et professionnelles ne jouent pas un rôle déterminant. Les débiles mentaux réussissent moins souvent leurs tentatives que les sujets d’intelligence normale.

Le fait d’être célibataire ou marié, avec ou sans enfants, n’offre pas non plus de particularités notables.

Dans l’ensemble, les tentatives ont lieu plus volontiers en fin de journée, les suicides au petit matin, mais il s’agit là d’une notion statistique qui laisse place à de nombreuses variantes. On dénombre actuellement en France annuellement 8 000 morts par suicide, alors que les tentatives atteignent le chiffre considérable de 40 000 à 50 000 environ.


Les moyens utilisés

Ils sont infiniment variés, mais les intoxications apparaissent de plus en plus comme l’agent privilégié : médicaments de toutes sortes, barbituriques, tranquillisants, sédatifs, analgésiques, etc., mais aussi insecticides, raticides, produits de nettoyage, etc. La section des veines du poignet peut s’associer au poison ou constituer la seule voie choisie pour mourir. La règle classique « aux femmes le poison, aux hommes la violence » (pendaison, défenestration, usage des armes à feu) se trouve assez souvent respectée. On observe aussi l’asphyxie par le gaz d’éclairage, la noyade, ou des procédés plus extraordinaires : l’emmurement, l’autodestruction par le feu, l’autodissection minutieuse d’une artère, l’automutilation, l’utilisation de machines ou d’instruments broyeurs, marteau-pilon, étau, etc.