Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Rhodes (suite)

Vers 408 av. J.-C., l’architecte Hippodamos de Milet construisait au nord de l’île, dans un site exceptionnel, une ville nouvelle suivant un plan moderne. Cette cité est vite un pôle d’attraction pour tout le commerce du Levant et de la mer Égée qui transitait auparavant par Athènes. Cette remarquable expansion est contrariée au ive s. av. J.-C. par des conflits politiques incessants entre les partisans du régime oligarchique et ceux du régime démocratique. Ces luttes intestines ont pour conséquences de faire passer Rhodes sous diverses souverainetés : ainsi Sparte y domina entre 412 et 395 av. J.-C. et entre 391 et 378 av. J.-C., Athènes y fut prépondérante de 395 à 391 et de 378 à 357 av. J.-C.

Les rois de Carie, successeurs de Mausole, s’en emparent en 357 av. J.-C. et la conservent jusqu’en 340 av. J.-C. À cette date, un amiral, Mentor, la livre au roi de Perse, Artaxerxès III. Quelques années plus tard, en 332 av. J.-C., Alexandre le Grand y établit son autorité.

À sa mort, les Rhodiens chassent les troupes macédoniennes et retrouvent leur indépendance ; leur importance politique est favorisée par l’expansion du commerce du Levant à l’époque hellénistique. La plupart des pays méditerranéens adoptent même le système monétaire et le code maritime des Rhodiens. Le régime politique de Rhodes, lui, est devenu plus ordonné et plus efficace.

Entre les ambitions rivales des monarchies hellénistiques issues du démembrement de l’empire d’Alexandre, Rhodes se pose en championne de la liberté des mers et sait faire respecter son indépendance. Elle pratique une politique d’équilibre. En 305-304 av. J.-C., assiégée par Démétrios Poliorcète, elle se défend vaillament et résiste aux terribles machines de siège de son adversaire.

En souvenir de cette attitude héroïque, les Rhodiens élèvent près de leur port une statue géante au Soleil, le célèbre Colosse de Rhodes, une des « sept merveilles du monde ». En 227 av. J.-C., un tremblement de terre détruit une partie de la cité, mais d’autres États grecs participent par leurs contributions aux reconstructions. Rhodes soutient également quelques luttes contre les rois de Pergame et du Pont et contre les pirates crétois qui menacent la route commerciale du Pont-Euxin. À cette époque, Rhodes devient un centre de haute civilisation, comme en témoignent ses écoles de peinture et de sculpture, ses rhéteurs, ses philosophes et ses poètes.

Rhodes s’allie très tôt aux Romains et les aide dans leurs guerres contre Philippe V de Macédoine et Antiochos III de Syrie. Elle perd néanmoins ses possessions de Lycie au cours de la troisième guerre de Macédoine (172-168) et voit son commerce partiellement détourné vers Délos.

Fidèle à Rome au moment des guerres de Mithridate, elle soutient de ses navires les guerres de Pompée contre César. En 43 av. J.-C., Cassius l’assiège et le terrible tremblement de terre de 155 apr. J.-C. achève de la ruiner. Dioclétien, au ive s., en fait la capitale de la nouvelle province des îles.

Sous la domination byzantine, Rhodes est conquise à deux reprises par les Arabes (653-658 et 717-18). À partir de 1082, des marchands italiens, principalement des Vénitiens, qui s’y établissent, ne parviennent pas toujours à la protéger des pirates turcs.

Le 15 août 1309, à l’instigation du pape Clément V, l’île est conquise par les chevaliers hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, qui viennent d’être chassés de Chypre*.

L’île, sous leur impulsion, devient alors un bastion chrétien contre les corsaires turcs dans cette partie de la Méditerranée. Mais les actes de piraterie auxquels se livrent les Rhodiens et parfois les chevaliers eux-mêmes déterminent les sultans de Constantinople à réduire cette forteresse ennemie située entre leur capitale et le Levant.

En 1444, le grand maître, Jean de Lastic, repousse une première attaque du sultan d’Égypte et, en 1480, Pierre d’Aubusson sauve de nouveau l’île dévastée par Mehmed II de Constantinople, mais le 1er août 1522 Soliman II le Magnifique vient assiéger la place avec 300 navires montés par 100 000 hommes. La résistance est opiniâtre, et les Turcs éprouvent de telles pertes qu’après un assaut particulièrement meurtrier, le 24 septembre, ils se préparent à battre en retraite, lorsqu’un traître les prévient que la garnison est aux abois. Le siège continue et, le 22 décembre, le grand maître, Philippe de Villiers de L’Isle-Adam, signe une capitulation honorable : les chevaliers quittent l’île le 1er janvier 1523 (elle devient turque) et s’installent quelques années plus tard à Malte.

Sous les Ottomans, Rhodes connaît un long déclin, et sa population diminue en raison de l’émigration et des épidémies. À partir de 1890, à une époque où ils songent à se constituer un empire en Méditerranée, les Italiens convoitent l’île de Rhodes.

En 1912, après la guerre italo-turque, l’île passe à l’Italie, qui en fait le chef-lieu de ses possessions du Dodécanèse. Au traité de paix de 1947, les Italiens cèdent Rhodes et les îles du Dodécanèse à la Grèce.

P. P. et P. R.

➙ Grèce / Malte.

 C. Torr, Rhodes in Ancient Times (Cambridge, 1885) ; Rhodes in Modern Times (Cambridge, 1887). / H. Van Gelder, Geschichte der alten Rhodier (La Haye, 1900). / A. Gabriel, la Cité de Rhodes, 1310-1522 (De Boccard, 1923). / R. Matton, Rhodes (Klincksieck, 1954). / C. Dervenn, Rhodes et le Dodécanèse (Horizons de France, 1962).

Rhodes (Cecil)

Homme politique britannique (Bishop’s Stortford, Hertfordshire, 1853 - Muizenberg, près du Cap, 1902).


En 1870, il part pour le Natal, chez son frère Herbert, soigner un début de tuberculose ; l’année suivante, il rejoint Herbert dans le Griqualand pour y prospecter les champs de diamants récemment découverts à Kimberley. Malgré une santé précaire, Cecil Rhodes réussit rapidement à faire fortune dans les mines et il peut revenir en Angleterre poursuivre ses études à Oriel College, à Oxford (1873-74 et 1876-1881). C’est l’époque où la Grande-Bretagne s’engage résolument dans les voies de l’impérialisme colonial. Cecil Rhodes, gagné à ces idées, va mettre en pratique ses aspirations idéologiques en Afrique, dont il rêve de faire une Afrique britannique.