production (suite)
Le coût marginal
Dans la théorie classique, où l’on supposait une concurrence* pure et parfaite (v. prix), il était démontré que les entreprises finissaient par vendre à leur coût marginal : si les prix du marché étaient supérieurs, l’écart entre les deux provoquait la venue d’un certain nombre d’entreprises alléchées par cette « rente », qui, rapidement, se mettaient à vendre à un prix compris entre le prix du marché et le coût marginal, entraînant alors une disparition de la rente. Si les entreprises vendaient au-dessous de leur coût marginal, elles disparaissaient rapidement du marché, n’ayant aucun intérêt, en effet, à s’y maintenir.
Mais on s’est en fait aperçu qu’il existait toute une série de situations de marchés différentes où il n’y avait pas de concurrence pure et parfaite (v. prix), et que, de ce fait, une entreprise pouvait vendre au-dessus du coût marginal sans que, forcément, d’autres entreprises apparaissent (car l’information, notamment, n’est pas totale). D’autre part, des entreprises peuvent vendre au-dessous du coût marginal un produit sans pour autant disparaître, car elles fabriquent et vendent plusieurs produits, l’un pouvant ainsi, parmi d’autres, se révéler non rentable.
Le secteur public lui-même va connaître les coûts marginaux. La notion de coût marginal comme guide pour la fixation des prix des services publics procède de l’idée suivante : on constate que ce qui coûte très cher à la collectivité, c’est l’utilisation des services publics à l’heure de pointe ; on est, en effet, obligé de surinvestir pour répondre à la demande de l’heure de pointe, et cet équipement ne se rentabilise pas, car il est inutilisé aux autres heures ; d’où l’idée de tarifications différentes selon les heures d’utilisation. Comme le coût marginal est très faible, par contre, en heures creuses, on a mis en place pour ces dernières une tarification très dégressive : ces tarifications existent à l’Électricité de France (tarif vert), pour le téléphone, et, depuis longtemps, on pense à l’appliquer aux autoroutes de façon à adapter la demande à l’offre par une tarification aux heures de pointe.
La théorie de la production et ses évolutions récentes
La théorie classique de la production a connu un véritable renouveau avec la programmation linéaire. En réalité, deux groupes de problèmes peuvent se poser au chef d’entreprise.
1. Compte tenu de dotations en facteurs de production et, connaissant la fonction de production et la fonction de revenu (qui n’est, ici, que la somme du chiffre d’affaires réalisé dans chaque production), quelle est la quantité de chaque produit qui doit être produite ?
2. Connaissant la quantité qui peut être écoulée et la fonction de coût total, quels sont les prix maximaux que peuvent atteindre les facteurs de production ?
Ce second problème s’appelle le dual du précédent : tous deux sont en effet liés (le revenu sera d’autant plus grand que le coût de production sera plus bas). La théorie montre que le maximum de la fonction de revenu est égale au minimum de celle de coût (à condition qu’il y ait une solution).
La résolution de ces problèmes fait appel aux techniques de la programmation linéaire. La programmation est dite « linéaire » parce que l’on suppose que la quantité d’un facteur donné pour produire un bien ou un service donné est une fonction linéaire du niveau d’activité. (Il est évident que cela entraîne une limitation, et des techniques de programmation non linéaire peuvent être utilisées.) [V. jeux (théorie des).]
La théorie de la production et la théorie économique générale
La théorie de la production telle qu’elle vient d’être décrite doit être replacée dans son cadre : en effet, on a supposé qu’aucune condition économique ne changeait et surtout que la production d’une firme donnée n’avait pas d’action sur les différents marchés, tant celui où s’écoule la production que celui des facteurs de production et des capitaux. Il est évident que, dans le cas d’une entreprise importante dans son secteur, si les effets de substitution (par exemple du capital au travail) deviennent trop importants on va assister à toute une série de conséquences : le débauchage (qui entraînera une levée de boucliers de la part des syndicats*) ou, dans un premier temps, une limitation de la croissance des salaires. Dans le cas contraire, les salaires pourront fortement augmenter.
Ce modèle ne vaut que comme modèle permettant de déterminer les conditions d’équilibre. Il est évident encore qu’il n’est pas dynamique et que l’on ne fait pas entrer les changements de productivité qui peuvent se produire, le progrès* technique en particulier qui risque de modifier les proportions des facteurs.
A. B.
➙ Capital / Prix / Travail.
J. R. Hicks, Value and Capital (Oxford, 1939 ; 2e éd., 1946). / P. A. Samuelson, Foundation of Economic Analysis (Cambridge, Mass., 1947). / J. Fourastié, le Grand Espoir du xxe siècle (P. U. F., 1949 ; nouv. éd., 1958) ; la Productivité (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1952 ; 8e éd., 1971). / R. G. D. Allen, Mathematical Economics (Londres, 1956). / W. Krelle, Production, demande, prix (trad. de l’allemand, Gauthier-Villars, 1970-71 ; 2 vol.).