Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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plomb (suite)

La géographie économique

Le plomb se prête très bien à la récupération ; aussi la part du métal obtenu de deuxième fusion est-elle importante dans la production de certains pays : elle représente 40 p. 100 de la production des États-Unis. Le prix élevé du métal, l’apparition de matériaux de substitution (en particulier pour tout ce qui touche à la tuyauterie) expliquent que la progression de la production soit plus modérée que celle de la plupart des autres métaux : elle a seulement un peu plus que doublé depuis l’avant-guerre.

La géographie de la production des minerais de plomb est caractérisée par le fait que le plomb est fréquemment associé à d’autres métaux, le zinc et surtout l’argent : il y a peu de sociétés minières qui soient spécialisées dans la seule production du plomb. Les réserves connues de métal s’élèvent à une cinquantaine de millions de tonnes, ce qui représente à peu près quinze ans de production. L’extraction est géographiquement très dispersée : elle est caractérisée par un groupe de quatre grands producteurs (Canada, États-Unis, U. R. S. S. et Australie), qui assurent plus de la moitié de la production mondiale, et par une quinzaine de producteurs moyens (en Amérique, Mexique et Pérou ; en Europe, Bulgarie, Yougoslavie, Allemagne fédérale. Pologne, Suède, Espagne et Irlande ; en Asie, Corée du Nord, Chine et Japon ; en Afrique, Namibie [Sud-Ouest africain] et Maroc). Le plomb ne donne pas lieu à un grand commerce international : les pays de l’Est se suffisent à eux-mêmes, comme les producteurs de l’Amérique du Nord. La production européenne est insuffisante, mais elle est loin d’être négligeable. L’Australie est le seul pays capable d’effectuer des ventes importantes. Il s’y ajoute celles des petits producteurs d’Amérique ou d’Afrique. Le raffinage du minerai se fait pour partie dans les régions productrices, pour partie dans les pays consommateurs. L’Australie, le Canada, le Pérou et les producteurs africains vendent des minerais à côté de plomb raffiné. Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni alimentent une partie de leurs installations de raffinage par des importations. En France, le traitement métallurgique de première fusion est concentré dans l’usine de Noyelles-Godault, dans le Pas-de-Calais ; celle-ci appartient à la Société minière et métallurgique de Peñarroya. Cette usine, une des plus importantes d’Europe, travaille à la fois pour Peñarroya et pour d’autres sociétés minières.

P. C.

➙ Alliage / Antifriction / Essence / Étain / Métallurgie / Soudage.

 W. Hofman, Blei und Bleilegierungen (Berlin, 1941). / Lead in Modern Industry (New York, 1952). / R. Cazaud, le Frottement et l’usure des métaux ; les antifrictions (Dunod, 1955). / R. Gadeau, Métaux non ferreux (A. Colin, 1959).

Plotin

En gr. Plôtinos, philosophe grec (Lycopolis, auj. Assiout, Égypte, v. 203 - en Campanie 269 ou 270).


Ce ne fut pas un philosophe précoce ; après être passé d’un maître à un autre, déçu par les célébrités de son temps, il rencontra enfin, à l’âge de vingt-huit ans, le philosophe Ammonios Sakkas, le Socrate alexandrin. « Voilà l’homme que je cherchais », dit-il. Il fut son disciple pendant onze ans, jusqu’à sa campagne de Perse. Lors de la retraite, il dut fuir en Mésopotamie, puis à Antioche, d’où il se rendit à Rome (244). C’est là qu’il fonda une école qui compta parmi ses disciples Porphyre, Amelios, de nombreux sénateurs, des femmes illustres et, en général, toute la société cultivée de l’époque. Dans cette école régna d’abord l’esprit de l’enseignement d’Ammonios : doctrine secrète, interdite aux non-initiés. L’école fut dissoute lorsque Plotin, étant tombé malade, fut obligé de se rendre de Rome à Minturnes ; Eutychès, médecin alexandrin, accourut de Pouzzoles au chevet de son maître mourant ; « Tu vois, je t’ai attendu », dit le philosophe, et il ajouta une phrase qui résume toute une philosophie : « J’essaie de faire remonter le divin qui est en nous au divin qui est dans l’Univers. » Puis il mourut ; il avait soixante-six ans.

Plotin fut incontestablement le penseur le plus représentatif du iiie s., car il réunit en lui les traditions les plus élevées du monde antique. Alexandrin par son éducation philosophique, romain par son école, il se montra cependant grec par ses aspirations et, tout en étant ouvert à la culture orientale, il en subit peu l’influence.

Malgré sa participation à la malheureuse expédition militaire de Gordien III contre les Perses (242-244), il était, en fait, un ami de la paix, du silence, et de la contemplation.

Plus fortement encore que son maître Platon, qui, d’ailleurs, ne dissimula pas ses appétits charnels, mais entendit seulement les transcender, il ressentit, presque comme saint Paul, le poids mortel de son corps. Il se détournait d’ailleurs de tout ce qui en lui était devenir, conditionnement, histoire : « Il se retenait, raconte Porphyre, de parler de sa naissance, de ses parents, de sa patrie. » Il ne prenait point de viande, et sa pudeur approchait de l’ascétisme.

Il haïssait les peintres et les sculpteurs parce qu’ils représentaient des ombres de couleurs, et il ignora toujours que son fidèle disciple Amelios avait introduit secrètement dans son école le peintre Karterios, qui, après l’avoir observé attentivement, s’en alla peindre chez lui son portrait de mémoire. Au sein d’une époque sombre, aride, désordonnée, il fut toujours un solitaire et un mystique dont la philosophie comporte un renoncement beaucoup plus profond et réel que celui des épicuriens.

La phrase qui termine ses Ennéades — « envol de l’esprit seul vers lui seul » — exprime clairement ses aspirations et sert de conclusion à l’exposé de l’idéal mystique, qui débute par cette exhortation : « Détache-toi de toute chose. »

Ce contemplatif pur se refusait même, en termes hautains, à participer aux rites sacrés : « C’est aux dieux de venir vers moi et non pas à moi de monter vers eux. » Pour lui, d’ailleurs, la divinité était partout.