Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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physiologie (suite)

Physiologie cardiovasculaire

Sur le plan fonctionnel, l’appareil circulatoire peut être divisé en quatre parties : un système de distribution (artères) ; un système échangeur (capillaires) ; un système collecteur (veines, oreillettes) ; un système de propulsion constitué par deux pompes en série. Les problèmes posés par l’étude de la circulation sanguine sont de trois ordres : modalités de l’écoulement du sang (hémodynamique) ; modalités des échanges entre le sang des capillaires et le liquide interstitiel baignant les cellules ; modalités du fonctionnement cardiaque.

• Écoulement du sang. L’écoulement qui s’effectue des régions à haute pression (système artériel) vers les régions à basse pression (système veineux) est dû à une différence d’énergie totale du sang entre ces deux régions : énergie totale = énergie de pression + énergie cinétique + énergie due à la pesanteur. Du point de vue physiologique, deux paramètres sont fondamentaux ; la pression hydrostatique (P) et le débit sanguin (D) liés entre eux par la relation de proportionnalités où R représente la résistance à l’écoulement (fig. 1).

Chez l’Homme, le cœur propulse chaque minute environ 5 litres de sang, qui sont répartis dans l’organisme. Au niveau de chaque organe et tissu, le débit sanguin doit être ajusté à ses besoins, qui d’une part sont très différents (reins, 25 p. 100 du débit total ; ensemble de la musculature, 15 p. 100 seulement) et d’autre part peuvent, pour un organe donné, varier en fonction de son activité (muscle au repos ou dans l’effort).

La pression du sang (pression hydrostatique) s’exerce sur la paroi des vaisseaux, qui répondent de manière différente en fonction de leur structure. Les artères ont des propriétés d’élasticité ; la pression tend à distendre leurs parois, créant, en leur sein, une tension (T) qui tend à s’opposer à cette distension : T = rP (r étant le rayon du vaisseau) [loi de Laplace]. D’un point de vue thermodynamique, il y a transfert à la paroi artérielle d’une fraction de l’énergie de pression du sang, sous forme d’énergie de tension. Lors d’une baisse de la pression, l’artère tend à se refermer, chassant le sang qu’elle contient ; l’énergie emmagasinée par la paroi est ainsi restituée au sang sous forme d’énergie cinétique. Par ce mécanisme, le caractère discontinu de l’écoulement sanguin est fortement atténué. Les veines, n’étant pas sous tension, présentent un aspect plus ou moins aplati ; une élévation de la pression pourra entraîner une importante augmentation du volume avant que soient mises en jeu les propriétés élastiques des parois. Ce comportement particulier des veines a des conséquences physiologiques non négligeables ; un exemple frappant en est le passage brutal de la position couchée à la position debout. Chez un homme couché, les membres inférieurs sont pratiquement au même niveau que le cœur, et les pressions veineuses, par exemple dans les pieds (5 mm Hg) et l’oreillette droite (2 mm Hg), sont très voisines. Lors du passage à la position debout, la pression veineuse au niveau des pieds atteint 90 mm Hg, car il s’y ajoute la pression exercée par la colonne de sang comprise entre le cœur et les pieds. La dilatation consécutive des veines entraîne une accumulation du sang dans la partie inférieure du corps, qui freine le retour veineux. Ce déplacement de la masse sanguine, joint à une diminution de la pression au niveau céphalique, peut provoquer une perte de connaissance transitoire (vertige orthostatique) [fig. 2].

• Échanges au niveau des capillaires. Deux forces gouvernent les échanges entre le plasma et le liquide interstitiel à travers la paroi capillaire : la pression sanguine (P), qui fait sortir du capillaire l’eau et les solutés diffusibles ; la pression osmotique (π) du sang, principalement due à la présence de protéine non diffusible, qui entraîne un mouvement inverse. Au début du capillaire (« région artérielle »), P est supérieur à π : il y a sortie d’eau et de solutés. Vers la fin du capillaire (« région veineuse »), P devient inférieur à π : il y a rentrée de l’eau et des solutés. Ce balayage du milieu interstitiel permet l’apport d’éléments nutritifs et l’élimination des déchets du métabolisme. Si la pression veineuse est trop élevée, la réabsorption de l’eau ne peut plus se faire ; c’est ce que l’on peut observer par exemple au niveau des capillaires pulmonaires lors d’une insuffisance du cœur gauche. L’absence de réabsorption entraîne l’extrusion du filtrat de plasma dans les alvéoles (œdème pulmonaire).

• Le fonctionnement cardiaque. La contraction cardiaque est un phénomène intrinsèque, ne nécessitant pas de stimulation nerveuse : isolé de l’organisme, le cœur* continue à battre. Cela est dû à la présence de cellules dites « cellules entraîneuses », douées de la propriété de se contracter automatiquement, qui « entraînent » les fibres musculaires cardiaques. Les cellules entraîneuses sont d’une part localisées dans l’oreillette droite (nœud sino-auriculaire) et à la jonction auriculo-ventriculaire (nœud auriculo-ventriculaire), d’autre part disséminées dans le ventricule (réseau de Purkinje). Le nœud sino-auriculaire (pacemaker des Anglo-Saxons) impose son rythme (80 battements par minute) à l’ensemble du cœur. S’il est détruit, un nouveau rythme, plus lent, s’établit, déterminé par le nœud auriculo-ventriculaire. Si ce dernier est détruit, la fréquence des contractions ventriculaires ralentit encore.

Un problème vital est la rigoureuse égalité des débits du cœur droit et du cœur gauche. Si, par exemple, le débit droit excède, ne serait-ce que d’une très faible fraction, le débit gauche, il s’établit, au bout d’un certain nombre de cycles cardiaques, une augmentation du volume du sang dans les veines pulmonaires, donc une augmentation de la pression veineuse suivie d’une perturbation des échanges capillaires qui peut provoquer un œdème pulmonaire. L’équilibre des débits est réalisé automatiquement grâce à une propriété particulière des fibres musculaires : l’intensité de la contraction est d’autant plus grande que la fibre est plus étirée. Dans ces conditions, plus le remplissage du ventricule est important, plus l’intensité de la contraction et, par suite, le volume éjecté seront grands. Les mécanismes à l’origine de ce phénomène sont encore mal connus.