Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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photo-interprétation (suite)

Les échelles de prises de vue

Une interprétation est d’autant plus facile que la structure de l’objet à étudier est simple, visible dans sa totalité, si possible au milieu de son environnement et sur une seule photographie prise en général à axe vertical afin d’éliminer le maximum de déformations. Suivant l’étude envisagée (objet isolé, collection d’objets semblables ou ensembles de tailles différentes), il faut déterminer l’échelle de l’enregistrement qui permettra la meilleure approche.

Les grands ensembles naturels du globe de plusieurs centaines ou de milliers de kilomètres, tels que courants marins, amas nuageux, reliefs montagneux, fleuves, zonages botaniques ou forestiers, etc., sont, peut-être un peu arbitrairement, le mieux interprétables dans leur totalité à partir d’enregistrements à de très petites échelles, de 1/50 000 000 à 1/1 000 000 ; c’est le domaine de la photographie ou de l’enregistrement électronique par satellite, à des distances de l’ordre de plusieurs centaines de kilomètres.

Les structures naturelles de petite dimension, de l’ordre du kilomètre ou de l’hectomètre, et les structures créées par l’homme (villes, ensembles agraires, aménagements divers, etc.) sont visibles sur des documents d’échelles moyennes comprises entre 1/100 000 et 1/10 000 ; ces enregistrements sont le plus souvent effectués à partir d’avions photographes volant entre 1 000 et 20 000 m.

Les objets très petits, de l’ordre du mètre (véhicules automobiles, animaux, détails de construction ou de végétation, etc.), sont identifiables à des grandes échelles, de 1/5 000 à 1/500, à partir d’avions, d’hélicoptères ou de ballons captifs.

Le plus souvent, les photographies réalisées doivent permettre une vision stéréoscopique en relief des objets afin de pouvoir analyser leurs formes et leurs volumes. Cette simple condition demande que les photographies se recouvrent, que les échelles et les cadences de prises de vue soient rigoureuses, que le vol de l’avion soit régulier, enfin que les chambres de prises de vues photographiques possèdent des objectifs de qualité irréprochable avec le minimum de distorsions et d’aberrations.

La prise de vues aériennes stéréoscopiques exploitables nécessite des moyens en matériels techniques considérables et des hommes de très haute qualification. Les charges qui en résultent ne peuvent être supportées que par des organismes puissants, instituts nationaux civils ou militaires à la dimension d’un pays, ou sociétés topométriques privées régionales d’assez grande envergure.


Les différents capteurs

En fonction de leur nature et en particulier de la nature de leur surface, les objets présentent des propriétés remarquables d’absorption, de diffusion, de réflexion ou d’émission d’énergie dans certaines portions du spectre électromagnétique. C’est ainsi qu’en fonction de leur température propre les objets rayonnent une certaine quantité d’énergie ; de même, frappés par un rayonnement d’une longueur d’onde donnée, ils peuvent en réfléchir une certaine quantité.

Il est possible d’enregistrer sur les grains d’une surface sensible tout ou partie de cette énergie grâce à des effets photochimiques ; c’est ce qui est réalisé sur les émulsions photographiques traditionnelles qui travaillent dans le spectre visible ou le proche infrarouge (émulsions panchromatiques, couleur, infrarouge, fausse couleur).

De la même façon, des cellules photosensibles peuvent enregistrer ponctuellement cette quantité d’énergie ; on utilise alors des appareils à balayage latéral, ou « scanners », qui travaillent dans l’infrarouge thermique et enregistrent la thermorayonnance des objets. Ces deux procédés sont passifs, car ils se bornent à recueillir une information fournie par l’objet. D’autre part, il est possible de capter la réflexion ou l’« écho » d’un signal hertzien envoyé par un émetteur à balayage ; c’est le principe du radar latéral, qui est un procédé actif. De même que pour les scanners, les enregistrements réalisés sur bande électromagnétique peuvent, ensuite, être décodés et traduits à leur tour en photographies ordinaires en noir et blanc.

Dans tous les cas, le document résultant sera une surface présentant une certaine tonalité ou une certaine couleur, dont la densité sera proportionnelle à la quantité d’énergie reçue en chaque point de l’enregistrement, ou grain de l’émulsion. L’image définitive est donc un message qui renseigne sur la qualité et la nature de l’objet ; c’est une réponse qu’il faut déchiffrer.

Le premier travail du photo-interprétateur est de définir la longueur d’onde qui donnera la meilleure réponse, donc de choisir le meilleur mode d’enregistrement, par radar, par scanner ou par émulsion photographique.

Les radars travaillent en général dans les bandes centimétriques et décimétriques ; leur intérêt réside dans la possibilité qu’ont les ondes de traverser les formations nuageuses et les couvertures forestières. Leur emploi est donc nécessaire dans toutes les régions à très forte nébulosité, où la photographie aérienne traditionnelle est impossible et la végétation très dense. En particulier, les radars permettent l’établissement de cartes de la surface topographique et structurale du sol dans les zones intertropicales.

Les scanners travaillent dans les bandes micrométriques de l’infrarouge lointain (entre 3 et 5 μ et entre 8 et 14 μ). Ces bandes ont été choisies, car elles correspondent à deux fenêtres de l’atmosphère qui se trouvent ouvertes au rayonnement électromagnétique solaire. De plus, elles contiennent les rayonnements thermiques émissifs des corps, dont les températures sont celles des objets terrestres courants (entre – 50 et + 60 °C). Il est donc possible d’enregistrer directement par scanner la température des corps ; aussi, ce procédé présente-t-il un intérêt considérable pour l’enregistrement de nuit, pour la détection des flux de température de l’air, de la terre, des eaux continentales ou marines. On en déduit les applications à l’étude des courants, à la prospection des sources et des cavités proches de la surface, à l’étude des échanges thermiques, à l’évapotranspiration de la végétation et des cultures, à l’étude des pollutions, au comptage des animaux en forêts, etc. De plus, le dépouillement automatique des données enregistrées sur bandes magnétiques est possible et permet d’obtenir directement des renseignements quantitatifs. Malheureusement, leur définition est encore faible par rapport à celle des émulsions photographiques.