Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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particules élémentaires (suite)

On détermine dans ce dessein les probabilités d’interactions, ou sections efficaces, à partir desquelles on remonte aux amplitudes des fonctions d’ondes caractérisant les processus étudiés. Ces probabilités ont des ordres de grandeur très différents suivant les interactions : de l’ordre de 10–26 cm2 (10 millibarns) pour les interactions fortes, elles sont de l’ordre de 10–30 cm2 (1 microbarn) pour les interactions électromagnétiques et de 10–38 cm2 pour les interactions faibles. L’instrumentation mise en jeu comporte en général des systèmes de compteurs* et de chambres* à traces installés auprès des grands accélérateurs* de particules. Les premières observations ont été, il est vrai, effectuées avec le rayonnement cosmique, où ont été découverts, après l’électron positif (ou positron), le muon (improprement qualifié de méson μ lorsqu’on a cru y voir le quantum d’interaction forte) et même plus tard le pion et les particules « étranges ». Mais l’intensité des faisceaux de particules fournis par les accélérateurs n’a maintenant laissé au rayonnement cosmique que le domaine d’investigation des énergies tellement élevées qu’elles ne peuvent pas être atteintes autrement. La récente entrée en service des grands anneaux* de collisions à protons permet, cependant, d’étudier des interactions que seuls des accélérateurs classiques produisant des énergies dépassant 1 000 GeV auraient rendu accessibles.

Il n’est pas possible d’exposer ici de façon exhaustive les divers aspects de la physique des particules ; seules quelques idées générales seront dégagées, illustrées de quelques exemples. Les problèmes soulevés par la théorie des forces nucléaires qui sont responsables de la cohésion des noyaux d’atomes seront laissés de côté. De même ne seront signalés que les intéressants développements de la physique atomique résultant de la substitution de différentes particules élémentaires aux constituants ordinaires de l’atome :
1. Remplacement du proton de l’atome d’hydrogène par :
— un positron (on obtient le positronium) ;
— un muon positif (on obtient le muonium) ;
2. Remplacement d’un électron d’un atome par :
— un hadron chargé négativement ; qui peut être un méson π ou K, donnant respectivement un atome π-mésique (prédit dès 1947 et découvert en 1952 à Rochester et à Pittsburgh) ou un atome K-mésique (découvert en 1967 à Berkeley), ou un hadron Σ ou un antiproton, donnant respectivement des atomes sigmaïques et des atomes antiprotoniques (observés au Cern en 1970) ;
— ou bien plus classiquement par un muon négatif, donnant un atome mu-onique (observé sous le nom d’atome mu-mésique à l’université Columbia en 1953).

On ne fera aussi qu’évoquer le chapitre particulier de la physique nucléaire ouvert par l’étude d’états excités analogues formés en substituant à un neutron du noyau un baryon neutre, Λ, grâce à l’action de mésons K.


Caractéristiques des particules élémentaires


Stabilité. Vie moyenne. Masse

Une première distinction est établie entre les particules stables et les particules instables. Les premières ne sont susceptibles d’aucune désintégration, quel que soit le type d’interaction envisagé ; c’est le cas de l’électron, du proton, du photon. Le plus grand nombre des particules est au contraire soumis au processus de désintégration en deux ou plusieurs autres particules. Leur vie moyenne (c’est-à-dire le temps au bout duquel le nombre des particules a été divisé par le nombre e, en considérant aussi la période T correspondant à une abondance réduite de moitié) est T/Log 2, d’autant plus brève que l’interaction est plus intense ; elle est de 10–21 à 10–23 s pour les interactions fortes, de 10–15 à 10–20 s pour les interactions électromagnétiques et de 10–6 et 10–11 s pour les interactions faibles. Mais l’écart d’énergie mis en jeu est également déterminant, ce qui explique la grande valeur de la période de désintégration du neutron :

(antineutrino), qui est de 11 mn.

Mais, lorsqu’un mode de désintégration n’est jamais observé, c’est en général qu’il viole une des lois de conservation. Ainsi, pour expliquer que la désintégration
μ → e + γ
n’a jamais été observée, le mode normal étant on doit admettre qu’il existe deux neutrinos distincts : νe, attaché à l’électron, et νμ, associé au muon et parfois nommé neutretto.

Les possibilités d’observation des particules à durée de vie très brève sont liées à la correction relativiste qui s’applique à ces particules animées d’une vitesse très voisine de celle de la lumière ; ces particules parcourent une distance moyenne égale à τ étant la vie moyenne, soit distance qui déjà, pour est de l’ordre de grandeur de 1 fm = 10–13 cm, donc de la taille du nucléon, pour les interactions fortes, de l’ordre de l’angström pour les interactions électromagnétiques et qui peut se mesurer en mètres pour les interactions faibles.

Une autre conséquence de la brièveté de certaines vies moyennes est l’imprécision qui en résulte dans la définition de l’énergie, donc de la masse de la particule concernée. La quatrième relation d’incertitude permet, en effet, d’écrire que cette masse est définie à ΔE près avec τ. (ℏ étant la constante de Planck divisée par 2 π, soit ℏ = 6,6.10–22 MeV.s). Ainsi, une particule instable à l’égard de l’interaction forte (une « résonance » par exemple) pourra présenter une « largeur » de plusieurs dizaines de MeV.

La masse d’une particule peut être également légèrement différente suivant son état de charge, mais l’écart reste faible devant la valeur de la masse : 1,3/1 000 pour le couple neutron-proton, de l’ordre de 3 p. 100 pour le couple π± – π0. En revanche, la masse d’une particule et celle de son antiparticule sont identiques.

Les mesures de masses peuvent atteindre un très haut degré de précision ; il en est ainsi pour les mésons π et K : les mesures ne sont plus effectuées à partir de méthodes de spectrométrie de masse ou de bilans de réactions, mais grâce à la spectrométrie des rayons X produits dans les atomes π- ou K-mésiques : on a obtenu ainsi
mπ = 139,549 ± 0,008 MeV,
résultat associé par ailleurs à une limite supérieure de la masse du neutretto

est obtenu par l’étude des atomes kaoniques d’or et de baryum.