Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Paris (libération de) [19-25 août 1944] (suite)

Grâce à l’intervention de Nordling, Choltitz a définitivement renoncé à exécuter les ordres de Hitler. Vers 15 h, les soldats du colonel Pierre Billotte attaquent l’hôtel Meurice et prennent Choltitz, qu’ils conduisent à la Préfecture de police, où il signe la capitulation de ses troupes entre les mains de Leclerc. Ce dernier emmènera ensuite le commandant du « grand Paris » à son P. C. de la gare Montparnasse, où le général allemand expédie l’ordre de cesser le feu.

Le 26 août, les Parisiens en liesse accueillent le général de Gaulle dans la mémorable descente des Champs-Élysées, et, le 31 août 1944, le gouvernement français se réinstalle dans la capitale, qu’il avait dû quitter le 10 juin 1940.

P. D.

➙ Leclerc / Guerre mondiale (Seconde).

 A. Dansette, Histoire de la libération de Paris (Fayard, 1946). / R. Dronne, la Libération de Paris (Presses de la Cité, 1970).

Parker (Charlie)

Saxophoniste alto et compositeur américain (Kansas City 1920 - New York 1955).


« Je vivais dans une sorte de panique perpétuelle. Le pire c’est que personne ne comprenait ma musique [...]. Je serais heureux si ce que je joue était appelé simplement « musique » [...]. J’ai entendu dire que Beethoven, sur son lit de mort, brandissait son poing contre le monde entier qui ne l’avait pas compris. Avec la musique, c’est toujours comme ça. » Ces propos de Charles Christopher Parker Jr. — dit « Charlie » ou « The Bird », ou encore « Yardbird » — indiquent que la révolution du jazz bop (ou be-bop*), dont il fut avec John « Dizzy » Gillespie un des principaux responsables, n’était pas limitée au seul niveau des sons. Ce qui avait changé, aussi, c’était le rapport du jazzman au contexte social. Avec Parker, et pour la première fois dans l’histoire du jazz, s’impose l’image du musicien noir digne, voire tragique ; au jazzman amuseur se substitue l’artiste incompris. Longtemps sous-estimée, la musique de Parker a été finalement reçue et acceptée par le biais d’une interprétation « romantique » de l’œuvre et de la vie du saxophoniste. Dans la mesure où cette musique joue avant tout de l’émotion, l’anecdote, la légende ont pris le pas sur l’analyse.


L’école du blues

Si les débuts musicaux et l’enfance de Parker restent mal connus, ce qui est certain, en revanche, c’est l’importance du blues à Kansas City pendant les années 30. Non seulement le jeune saxophoniste a pu en entendre beaucoup, mais surtout il en joua toutes les nuits, pour gagner sa vie, dès l’âge de quinze ans. En 1937, il est engagé dans un des plus célèbres orchestres de blues de la région, celui du pianiste Jay McShann, avec qui il participe à sa première séance d’enregistrement (en 1941). En même temps que la musique vécue professionnellement, il a déjà découvert l’usage des stupéfiants et les premiers signes d’incompréhension : sa sonorité, sa conception du travail rythmique sont jugées « exécrables » par certains de ses confrères qui estiment que « cela ne ressemble à rien ». New York : pendant trois mois, il est plongeur dans un restaurant de Harlem. Puis, de 1942 à 1944, il obtient quelques engagements. Dans le grand orchestre du pianiste Earl Hines, il rencontre « Dizzy » Gillespie. Mais sa façon de jouer lui attire encore des ennuis, surtout quand il se trouve au milieu de musiciens plus âgés que lui. « Je ne pouvais plus supporter, raconte-t-il, les procédés harmoniques stéréotypés que tout le monde employait à l’époque. Je me disais qu’il devait être possible de trouver autre chose. Parfois, j’entendais ce quelque chose, mais je n’arrivais pas à le jouer [...]. Un soir, pendant que j’improvisais longuement sur Cherokee, j’eus l’impression de jouer ce que j’avais entendu intérieurement. Je m’aperçus qu’en me servant des superstructures des accords comme d’une ligne mélodique et en m’appuyant sur de nouveaux accords appropriés je pouvais jouer ce que j’avais pressenti. Ce fut comme si je renaissais. »


Changement de registre

Avec d’autres jeunes musiciens qui, comme lui, refusent la routine des grands orchestres et les impératifs de la danse — « Dizzy » Gillespie, Thelonious Monk, le batteur Kenny Clarke... —, il met au point, à l’occasion de « jam sessions », de nouvelles conceptions rythmiques, plus complexes et libres quant à l’accentuation des temps. De même, sa maîtrise instrumentale lui permet, au-delà d’une vaine démonstration de virtuosité, de produire des traits volubiles sur les tempos les plus rapides, mais aussi de ponctuer son discours de silences parfaitement imprévisibles, du moins au regard des critères de ses prédécesseurs. D’où une apparence chaotique, tumultueuse, là où une analyse rigoureuse de l’improvisation indique en fait une imagination mélodique et rythmique littéralement inouïe. De plus, au cours d’une même séquence, il arrive souvent que Parker change de registre, produisant ainsi un supplément de « relief » et de tension.

Après avoir été associé en 1945 à « Dizzy » Gillespie, le saxophoniste s’assurera la collaboration de Miles Davis, du contrebassiste Curley Russell et du batteur Max Roach. À partir de 1946, ses périodes d’activité musicale et ses dépressions, qui l’amèneront à faire plusieurs séjours en milieu hospitalier, alterneront en un contrepoint de plus en plus serré. En 1947, sorti de la clinique de Camarillo, il enregistre avec le pianiste Erroll Garner et de nouveau avec Miles Davis, avec l’orchestre afro-cubain de Machito et des ensembles à cordes. Deux ans plus tard, il joue à Paris avec un nouveau quintette dont fait partie le trompettiste Kenny Dorham. En 1950, il fait une tournée en Scandinavie. En 1954, sa fille meurt et il tente de se suicider. Après un bref engagement au club Birdland de New York, il disparaît en mars 1955 des suites d’une crise cardiaque.