vide
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
De l'ancien français vuit, en latin vacuum, « vide ».
Physique
Dans la physique moderne, le sens radical et absolu du terme vide – à savoir celui d'un espace où il n'y aurait aucune sorte de réalité matérielle, et qui ne serait le cadre d'aucun phénomène physique – n'a pas cours. L'espace « vide » est forcément un système dynamique complexe. On peut cependant donner un sens relatif à ce terme en appelant vide un espace au sein duquel la concentration d'atomes est particulièrement faible : un tel vide constitue le milieu inter galactique et on peut, en laboratoire, reconstituer des pressions si basses qu'elles sont dites ultra-vides.
Le vide est surtout une notion polémique. L'une des plus importantes controverses philosophiques de l'antiquité oppose la doctrine aristotélicienne résolument pléniste qui réfute a priori la possibilité du vide aux doctrines atomistes qui en proclament la nécessité. Si la formule selon laquelle « la nature a horreur du vide » s'impose jusqu'au expériences de Torricelli (en 1644), elle est l'expression de doctrines métaphysiques. Le vide serait la manifestation d'une faiblesse créatrice, incompatible avec la toute-puissance et la perfection divine. Cet argument, encore présent chez Leibniz(1) peut être « renversé » comme l'indiquent certaines des « interdictions de 1277 » promulguées par E. Tempier(2) à l'encontre des aristotéliciens : c'est la thèse de l'impossibilité du vide qui y est dénoncée comme limitative au vouloir et à la puissance divine.
La critique cartésienne du vide est plus radicale : la proposition « le vide est » est une contradiction puisque le vide étant « rien », elle consiste à affirmer que le non-être est, ce qui est une absurdité. Au cours des expérimentations « sur le vide » des années 1640, Pascal sera ainsi amené à réfuter cet argument en soutenant que le vide ne doit pas être confondu avec le néant et que « l'espace vide tient le milieu entre la matière et le néant »(3). Cette position est aussi celle de Gassendi pour qui « outre la substance et l'accident, le lieu ou l'espace [...] sont de vrais êtres »(4).
L'impossibilité aristotélicienne du vide ne survit pas au développement des expériences et des théories physiques des xviie et xviiie s., mais la thèse cartésienne de l'Ether, souvent interprétée comme anti-vacuiste, s'avère compatible avec les théories nouvelles, comme aussi les théories atomistes. La controverse se poursuit donc, profondément renouvelée au fur et à mesure des transformations des théories physiques.
Vincent Jullien
Notes bibliographiques