sourds (nombres)

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du latin surdus, « sourd ».

Mathématiques

Dénomination ancienne des nombres que nous désignons comme algébriques et irrationnels.

Cette notion est tombée en désuétude depuis la fin du xviiie s. On trouve un article conséquent sur ces nombres dans l'Encyclopédie méthodique(1). Le terme utilisé pour désigner ces quantités, présentes implicitement dans certaines équations (aussi simples que x2 – 2 = 0), mais que l'on ne sait exprimer « en nombre » est riche d'enseignement. En tant qu'ils sont irrationnels, ils échappent à la raison, au sens de la théorie des proportions. Cette détermination intellectuelle s'accompagne d'une qualification liée aux sens : pour Al-Khwarizmi (ixe s.), ce sont des racines muettes ou aveugles. Pour G. de Crémone (xiie s.), elles sont sourdes. Ces nombres échapperaient ainsi à la perception.

L'étude des nombres sourds a permis une extension de la notion de nombre et de l'usage des exposants. Les règles de simplification (telles que 3√8ab3c = 2b3ac) ne permettant pas toujours de « réduire les nombres sourds » comme le note Descartes dans la Géométrie de 1637, des exposants fractionnels sont généralisés dans l'écriture algébrique (81 / 3 pour 3√8 par exemple).

C'est seulement dans le cadre de la résolution des équations algébriques que ces nombres particuliers ont été étudiés (sous ce vocable) et c'est pourquoi, ce qualificatif ne concerne, en propre, que des nombres algébriques.

Vincent Jullien

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Encyclopédie méthodique, ACL, 1987.