métaphore

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du grec métaphora, « transport » ou « transfert ».

Épistémologie, Esthétique, Linguistique

Figure de rhétorique (ou trope) dans laquelle un mot ou une phrase, qui littéralement dénotent une chose, sont utilisés pour en dénoter une autre.

Selon Aristote, « la métaphore est l'application d'un nom impropre, par déplacement soit du genre à l'espèce, soit de l'espèce au genre, soit de l'espèce à l'espèce, soit selon un rapport d'analogie »(1). Philosophiquement, la métaphore pose deux problèmes principaux : existe-t-il une signification métaphorique ? la métaphore possède-t-elle une valeur cognitive, nous fait-elle connaître quelque chose qui ne pourrait être dit littéralement ?

Certains philosophes, et par exemple Searle(2), sont tentés de penser que la métaphore possède une signification à rechercher dans l'intention de celui qui l'exprime. D'autres, et par exemple Goodman(3), pensent qu'il n'existe pas de signification en général et de signification métaphorique en particulier. Comprendre une métaphore ne revient pas à saisir une signification métaphorique. C'est plutôt comprendre le transfert d'une étiquette d'un domaine où son application est habituelle vers un domaine où elle est en quelque sorte contre-indiquée, mais pourtant éclairante. Avec l'étiquette est transporté aussi un schème, c'est-à-dire tout ou une partie du réseau d'étiquettes auquel appartient le terme transféré.

Davidson(4) doute qu'il soit pertinent d'affirmer que les métaphores sont cognitives puisqu'elles sont des énoncés faux. Elles ne sont que suggestives. Goodman pense qu'il existe des métaphores vraies et d'autres fausses. Si je dis que Pierre est un âne, cela est littéralement faux (dans le cas où, par exemple, Pierre est un professeur), mais cela peut être littéralement vrai et bien plus significatif que de savoir qu'il chausse du 42 (ce qui est vrai). Cette opposition caractérise l'enjeu philosophique principal aujourd'hui au sujet de la métaphore : a-t-elle ou non une valeur cognitive ?

Roger Pouivet

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Aristote, La poétique, trad. R. Dupont-Roc et J. Lallot, Seuil, Paris, 1980, chap. xxi.
  • 2 ↑ Searle, J., Expression and Meaning (1979), trad. fr : Sens et expression, Minuit, Paris, 1982.
  • 3 ↑ Goodman, N., Languages of Art (1968), trad. fr : Langages de l'art, J. Chambon, Nîmes, 1990.
  • 4 ↑ Davidson, D., « Ce que signifient les métaphores », dans Inquiries into Truth and Interpretation (1984), trad. fr. Enquêtes sur la vérité et l'interprétation, J. Chambon, Nîmes, 1993.

→ intention, langage, rhétorique, signification