esquisse
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
De l'ital. schizzo, « ébauche », de schizzare, « jaillir ».
Esthétique
Ébauche d'œuvre, que celle-ci soit envisagée comme l'état préparatoire d'une réalisation en cours ou pour son intérêt indépendant.
Toute entreprise artistique ou intellectuelle débute en général par une phase d'exploration dans laquelle l'auteur élabore un plan d'ensemble, envisage plusieurs configurations ou teste des variantes. Étape provisoire, souvent détruite, elle n'en est pas moins une source particulièrement instructive pour la compréhension du résultat ; ainsi la critique génétique analyse les brouillons d'un écrivain ou les états successifs d'une œuvre complexe. Certains artistes vont jusqu'à faire photographier (voire mouler, comme Rodin) des étapes qu'ils considèrent comme significatives et qui seront pourtant dépassées par les suivantes.
Nul mieux que Delacroix n'a senti ce qu'il y a d'irremplaçable et d'unique dans l'esquisse : « je crois que cette différence entre les arts du dessin et les autres tient à ce que les derniers ne développent l'idée que successivement. Quatre traits, au contraire, vont résumer pour l'esprit toute l'impression d'une composition pittoresque. »(1).
Alors que l'esthétique s'est longtemps attachée au seul état terminal dont la facture lisse effaçait toute trace d'hésitation ou de repentir, la sensibilité moderne a revalorisé l'état inachevé, du simple croquis pris sur le vif à une forme de composition qui rend perceptible les aléas du processus de réalisation, voire son prolongement possible. Ainsi le non-fini devient-il une modalité d'exécution à part entière.
Jacques Morizot
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Delacroix, E., Journal 1822-1863, Plon, Paris, 1996, p. 408.
- Voir aussi : Green, A., Révélations de l'inachèvement, Flammarion, Paris, 1992.
