béatitude
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin beatitudo, de beatus, bienheureux.
Morale
Actualisation suprême du bonheur, en ce que la jouissance de la chose (ou de l'état) n'est plus du tout affectée du risque de la (ou le) perdre.
La question de la béatitude répond à une visée éthique, en ce sens que la vie heureuse a sa première condition dans la vertu de l'homme. La stabilité bienheureuse qu'apporte la béatitude repose en effet, en premier lieu, sur l'aptitude de l'homme de bien à supporter les aléas de l'existence avec calme : « s'il en est bien ainsi, l'homme heureux ne saurait jamais devenir misérable »(1). Mais c'est par excellence dans la contemplation que s'accomplit ce bonheur constant, comme le souligne particulièrement Plotin à propos des dieux : « Telle est la vie impassible et bienheureuse des dieux »(2).
Quel sens philosophique peut-on donner à la félicité des élus (c'est le sens religieux de la béatitude), au contact avec Dieu même ? D'une façon plus générale, faut-il considérer que la béatitude est toujours comprise comme le résultat de la vertu, que celle-ci promet mais qui lui demeure extérieur ? Le sage spinoziste atteint finalement l'union immédiate avec Dieu par la connaissance supérieure qu'il en a, qui est aussi bien une prise de conscience de la nature de l'âme : celle-ci comprend que son essence est dans la connaissance dont Dieu est le principe (car la connaissance du troisième genre saisit toutes les choses comme dérivées génétiquement de Dieu). Attachée immédiatement à Dieu comme à sa cause, l'âme accède elle-même à l'éternité. Aussi la connaissance du troisième genre produit-elle en l'homme une joie accompagnée de l'idée de Dieu comme cause : c'est la béatitude. Mais à ce stade, celle-ci n'est pas autre chose que l'activité même de l'âme qui connaît. La béatitude n'est donc plus la récompense de la vertu, elle est la vertu même(3).
André Charrak
Notes bibliographiques