axiomatique

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».

Logique, Mathématiques

Organisation formelle et syntaxique d'un ensemble d'énoncés.

Dans ses Éléments, Euclide présente l'arithmétique et la géométrie sous une forme quasi axiomatique : à partir de notions communes, postulats et définitions, il démontre des théorèmes. Ce paradigme de la rationalité formelle exerça une grande séduction (cf. Descartes et Spinoza) jusqu'à l'aube du xxe s.

Inventeurs de la logique contemporaine, Frege et Russell procédèrent de même à partir d'axiomes tenus pour des vérités évidentes et au moyen de règles de déduction transmettant mécaniquement, sans recours à une quelconque intuition, ces vérités initiales. La logique nouvelle, exprimant les « lois de l'être vrai », pouvait alors servir de fondement au discours mathématique qui devait lui être réductible.

Mû par un même souci de rigueur et de précision, D. Hilbert construisit dès 1899 une axiomatique de la géométrie qui évitait les manquements d'Euclide à son idéal de déductibilité (recours subreptice aux figures, postulats et définitions non explicités, etc.)(1). Il proposa alors une conception formaliste des systèmes mathématiques qui en faisait des constructions purement symboliques contrôlables par leur propriété métamathématique de non-contradiction. L'apparition dès 1915 de systèmes logiques non standards (logiques trivalentes, plurivalentes, intuitionnistes, etc.) conduisit à ne plus voir dans les axiomes que des conventions initiales adoptées pour des raisons pragmatiques. D'où le principe, de tolérance de Carnap : « En logique, il n'y a pas de morale. Chacun a la liberté de construire sa propre logique, i.e. sa propre forme de langage, comme il le souhaite »(2).

Présenté axiomatiquement, un système logique se compose d'une syntaxe, qui fournit les règles de formation des formules bien formées du langage logique ainsi que d'un stock limité d'axiomes et de règles de transformation (modus ponens) permettant la déduction de théorèmes ; d'une sémantique, qui conditionne l'interprétation de ce langage et assigne validité aux théorèmes, et d'une métalogique, qui détermine la consistance (on ne peut y déduire A et ¬ A), la complétude (tout théorème est valide et réciproquement) et la décidabilité (toute formule est évaluable) du système.

Il ne faudrait pas croire pour autant que tout système logico-mathématique doive adopter cette structure axiomatique. On peut parfaitement substituer aux axiomes des règles de déduction. C'est le cas, par exemple des systèmes de déduction naturelle(3). La forme axiomatique désormais n'est plus qu'un mode de présentation d'un système logico-mathématique parmi d'autres.

Par-delà les différences techniques, le choix d'un mode de présentation engage la définition de la logique(4) : Garde-t-elle un rapport privilégié au vrai ? N'est-elle qu'un langage et un calcul purement rationnel ou un simple système d'inférence ?

Denis Vernant

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Hilbert, D., Les fondements de la géométrie, trad. P. Rossier, J. Gabay, Paris, 1997.
  • 2 ↑ Carnap, R., The Logical Syntax of Language, Routledge et Kegan, London, 1937, trad. anglaise de l'original allemand de 1934, 17, p. 52.
  • 3 ↑ Gentzen, G., Untersuchungen über das logische Schließen, trad. fr. J. Ladrière, Recherches sur la déduction logique, PUF, Paris, 1955.
  • 4 ↑ Engel, P., La norme du vrai, Gallimard, Paris, 1989.
  • Voir aussi : Blanché, R., L'axiomatique, PUF, Paris, 1990.

→ déduction, intuitionnisme, logique multivalente