absolu
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin absolutus, de absolvere « détacher, délier » et « venir à bout de quelque chose, mener quelque chose à son terme, parfaire ». Le terme absolutus signifie une relation, quand bien même cette relation serait négation de la relation.
Ignoré par l'Antiquité grecque, le terme est d'abord utilisé sous forme adjective, puis substantivé pour devenir le concept central de l'idéalisme allemand. L'adjectif est également employé, depuis le xvie s., pour qualifier des théories politiques dites absolutistes. Aux yeux de leurs auteurs, la souveraineté de l'État doit être absolue, sinon elle n'est pas. Le souverain est ainsi délié de toutes entraves légales, religieuses ou traditionnelles, sans toutefois que sa souveraineté contredise nécessairement la liberté individuelle. Lorsque chaque individu transfère à la société toute la puissance qui lui appartient, de façon qu'elle soit seule à avoir sur toutes choses un droit souverain, la société alors formée est une démocratie, c'est-à-dire l'union des hommes en un tout, ayant un droit souverain collectif sur tout ce qui est en son pouvoir. La souveraineté absolue n'est pas, par conséquent, intrinsèquement monarchique.
Philosophie Générale
Ce qui se soustrait à tout rapport, à toute limitation. C'est l'inconditionné.
L'absolu est l'indéterminé
Étant négation de tout rapport, l'absolu échappe à toute détermination particulière et, par conséquent, à toute définition. Pour ces raisons il est nécessairement unique et se soustrait au discours, à tous les noms – y compris divins – par lesquels on voudrait le saisir. Le discours sur l'absolu s'épuise dans une série indéfinie de négations, le désignant comme l'indéterminé, l'incomposé, l'informe ou l'absolument inconnaissable.
Cette appréhension strictement négative de l'absolu s'épuise, comme le montre Hegel, dans la contradiction de son propre objet, puisque force est d'admettre que l'absolu, en lui-même, n'est rien, rien de ce qui est. L'être absolument indéterminé est pur néant(1).
L'absolu est l'être en tant que tel
La détermination négative et aporétique de l'absolu oblige à en chercher une détermination positive. L'attribution de l'adjectif « absolu », dans le latin médiéval, est double. Il concerne soit une forme ou une propriété quelconque, soit l'être comme tel.
Lorsque l'absoluité concerne l'être et en accompagne les déterminations, elle caractérise positivement le divin. Ainsi, « l'être dit tout simplement et absolument s'entend du seul être divin »(2). La conjonction de l'absolu et du divin s'opère, dans ce cas, au sein de l'ontologie. Le terme « absolu » qualifie alors, positivement, l'être lui-même, l'être pris dans son emploi absolu, c'est-à-dire l'être de ce qui subsiste par soi, et même l'être subsistant par soi. L'être et l'étant coïncident alors. L'absolu est l'étant qui se suffit à soi-même et à quoi tout le reste doit d'être, c'est-à-dire ce qui est absolument ou l'absolument étant, mais, toujours, il se constitue moyennant une opposition à un terme moins essentiel ou secondaire. Il se trouve, donc, inscrit dans une relation à un autre, dans une relation à son autre.
L'absolu est sujet
La préservation de l'absoluité, au sein de cette opposition, n'est possible que si la relation à l'autre est intégrée dans cette absoluité. L'absolu est absolument lui-même, lorsque la relation à l'autre est comprise dans le même et se trouve, alors, surmontée. Seule la structure du « sujet », au sens moderne, c'est-à-dire du « soi » de la conscience de soi actualise cette relation à l'autre, cette négation radicale.
L'esprit, le concept, conformément à sa détermination hégélienne, est précisément ce qui fait abstraction de tout ce qui lui est extérieur et de sa propre extériorité, c'est-à-dire de son individualité immédiates(3). Il supporte la négation de cette dernière. Cette absolue négativité du concept est ce par quoi la liberté et, par conséquent, le soi se définissent. La négativité est alors sans restriction et telle que le concept n'a rien hors de soi. Sa négativité s'identifie à son identité autarcique à soi-même, de telle sorte que l'absolu est, au sens hégélien, esprit. L'interprétation de l'absoluité comme l'absolument étant s'infléchit vers le soi, qui est absolu, parce qu'il a converti toute relation à l'autre en relation à soi.
L'absolu n'est donc pas un concept vide ou contradictoire, comme sa détermination négative au titre de l'absolument indéterminé le suggère. Il consiste en un processus de négation infini, qui porte en lui-même tout ce qui lui est autre, le fini, le déterminé, le différencié. Ainsi, l'absolu n'a de rapport à lui-même que comme totalité des déterminations possibles qu'il pose, nie et reprend en lui.
Caroline Guibet Lafaye
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Hegel, G. W. Fr., Science de la logique, t. 1, livre 1, « L'être », Aubier, Paris, 1976, p. 58.
- 2 ↑ Thomas d'Aquin, Quaestiones disputatae de veritate, Vrin, Paris, 1983, 2, 3.
- 3 ↑ Hegel, G. W. Fr., Encyclopédie des sciences philosophiques, t. III, Philosophie de l'esprit, § 382, Vrin, Paris, 1988, p. 178.
- Voir aussi : Aristote, Métaphysique, Vrin, Paris, 1991.
- Fichte, J. G., Doctrine de la science 1801-1802, Vrin, Paris, 1987.
- Hegel, G. W. Fr., Science de la logique, trad. P.-J. Labarrière et G. Jarczyk, Aubier, Paris, 1976, 1978, 1981.
- Heidegger, M., Chemins qui ne mènent nulle part, « Hegel et son concept d'expérience », Gallimard, « Tel », Paris, 1962.
- Kant, E., Critique de la raison pure, trad. A. Renaut, Aubier, Paris, 1997.
- Schelling, Fr. W. J., le Système de l'idéalisme transcendantal, Louvain, Peeters, 1978.
→ Dieu