Philippe Pinchemel

Géographe français (Amiens 1923-Sceaux 2008).

Il est assistant à l'Université de Lille puis à la Sorbonne (1946-1951), puis attaché de recherches au Centre national de la recherche scientifique (C.N.R.S.) [1951-1952]. Il enseigne également la géographie économique à l'Institut d'études politiques (1948-1953). En 1952, il soutient une thèse de géographie physique, une étude de géomorphologie sur Les plaines de craie du nord-ouest du Bassin parisien et du sud-est du Bassin de Londres et une thèse annexe de géographie humaine, Structures sociales et dépopulation rurale dans les campagnes picardes de 1836 à 1936. Il enseigne ensuite à l'Université de Besançon (1952-1953) puis à celle de Lille (1954-1965). Il est alors nommé professeur à la Sorbonne où il reste jusqu'à sa retraite (1991).

Philippe Pinchemel cultive la tradition de la géographie régionale à différentes échelles : il rédige en 1964 une Géographie de la France (tome 1, Les conditions naturelles et humaines ; tome 2, Les milieux : campagnes, industries et villes), s'intéresse à La Picardie (Visages de la Picardie, 1949 et 1967) et au Nord (fondation – avec d'autres – de la revue Hommes et terres du Nord en 1963). Vivant dans une région très peuplée, il s'intéresse à la démographie : il est directeur des études de l’Institut régional d’études et d'action démographiques à Lille (1961-1965) puis membre des hautes instances de l'Institut national d'études démographiques (I.N.E.D.) [1974-1990]. Pour les mêmes raisons, il réfléchit sur les villes et les réseaux urbains : il enseigne à l’Institut d’urbanisme de l’Université de Paris (1964-1968) et rédige un ouvrage sur La Région parisienne (1979). Frappé par les problèmes de ces régions du Nord, il se préoccupe très tôt d'aménagement du territoire ; il participe à une commission Démographie, main-d’oeuvre, emploi du Comité régional d’expansion économique de la région Picardie (1962-1965) puis à la Commission nationale d’aménagement du territoire (1969-1972).

La notoriété de Philippe Pinchemel est surtout liée à ses travaux sur l'histoire et l'épistémologie de la discipline, d'autant plus qu'il est un des rares de sa génération à s'intéresser à ces questions : il fonde et préside la Commission pour l’histoire de la pensée géographique au sein de l’Union géographique internationale (1968-1980) et fonde avec le médiéviste Michel Mollat du Jourdain un Centre d'histoire de la géographie (1967) qu'il dirige de 1975 à 1991.

Dans ses nombreux articles, il revendique l'héritage de Vidal de la Blache ; ainsi il s'intéresse à la géographie régionale (notamment aux travaux du géographe auvergnat Lucien Gachon) et rappelle souvent que « la géographie est la science des lieux et non celle des hommes ». Il cherche aussi à faire connaître les œuvres des anciens : Président de la Section de géographie du Comité des travaux historiques et scientifiques (C.T.H.S.) de 1986 à 1998, il fait rééditer ou traduire des livres de géographes d'autrefois parfois ignorés ou oubliés. Et, en même temps, il demeure très ouvert à la nouveauté. Il fait traduire plusieurs livres de géographes anglo-saxons contemporains pour les faire connaître au public français ; il est membre du comité de rédaction de la revue fondée par Roger Brunet en 1972, L’Espace géographique.

L'aboutissement de son itinéraire intellectuel est le livre qu'il rédige avec son épouse, Geneviève, La Face de la terre : éléments de géographie (1988) ; sa notoriété actuelle est en partie liée à cet ouvrage. Déplorant l'éclatement de la discipline, il cherche à définir la géographie (en analysant ses fondements), ses objets (contribuant à définir les notions de lieu, de milieu et d’interface), ses méthodes et ses outils (notamment pour l’analyse spatiale). Il plaide pour une géographie recentrée autour de la notion de paysage. Cette géographie est une science humaine qui doit analyser l’écriture que les sociétés humaines laissent sur la surface de la Terre. Il finit par la définir ainsi (Géographies : pour une intelligence de la Terre, 2005) : « La géographie étudie l’interface terrestre, ses représentations, ses transformations par les sociétés humaines, ses différenciations et divisions en milieux, espaces, régions, territoires et paysages. »

Philippe Pinchemel s'intéresse enfin aux problèmes de l'enseignement secondaire (il est membre de plusieurs commissions de réflexion et de proposition sur les programmes au ministère de l'Éducation nationale) et supérieur : longtemps élu au Comité consultatif des Universités, il rédige aussi un livre Campus et urbanisme universitaire : étude comparative de quelques implantations universitaires en France et à l'étranger (1969).

Il reçoit le prix Vautrin-Lud en 2004.