Ismaïl Haniyeh

Homme politique palestinien (al-Shati, bande de Gaza, 1963).

1. Le militant

Fils de réfugiés palestiniens, il étudie au début des années 1980 la littérature arabe à l'Université islamique de Gaza et milite au sein du syndicat étudiant islamiste avant d’en prendre la direction. Emprisonné par Israël à plusieurs reprises durant la première Intifada (1987-1993) pour ses activités politiques, il est déporté en 1992 au Sud-Liban en compagnie d’autres membres actifs du Hamas.

À son retour, il occupe différentes fonctions de direction au sein du conseil de l’Université islamique et seconde Ahmad Yacine, le leader spirituel du Hamas, à partir de 1998. Il est l’objet d’une tentative d’assassinat ciblé en juin 2003. Après la mort de A. Yacine (2004), I. Haniyeh devient l’une des principales figures du bureau politique interne du Hamas. Il représente ce mouvement au sein du Comité de coordination des activités de la seconde Intifada.

2. Le leader modéré

Considéré comme un leader modéré au sein de son propre camp, il se voit confier la tâche de diriger la liste du Hamas lors des élections législatives de janvier 2006. À la suite de la large victoire de son parti, il est appelé au poste de Premier ministre par le président palestinien, Mahmud Abbas. En juin 2007, alors qu’il dirige un gouvernement d’union nationale depuis quelques mois, il est limogé par M. Abbas : la prise de contrôle militaire de la bande de Gaza par son mouvement conduit le président de l’Autorité nationale palestinienne à nommer un gouvernement d’urgence dont la direction est confiée à Salam Fayyad, et à déclarer l’ancien cabinet et sa tête de file « hors-la-loi ». Néanmoins, I. Haniyeh demeure légitime à son poste de Premier ministre aux yeux de l’immense majorité de la population de la bande de Gaza.

Après la vaste opération lilitaire menée par Israël à Gaza (27 décembre 2008-18 janvier 2009), l’heure est à la trêve de longue durée. L’enjeu est alors, pour I. Haniyeh, d’éviter une nouvelle opération militaire du même type afin de reconstituer les forces du mouvement, mais aussi de négocier un relâchement du blocus économique imposé, par l’État hébreu, à la population gazaouie. En dépit de la sécurisation de la zone-frontière, l’isolement de la bande de Gaza demeure. Cette situation d’échec entraîne une montée de protestation de la part des opposants du Premier ministre qui lui reprochent d’abandonner son agenda nationaliste. Ce dernier n’hésite pas à leur répondre par la répression.

La libération en octobre 2011 du caporal franco-israélien Gilad Shalit (détenu à Gaza depuis 2006) en échange de la libération de plus d’un millier de prisonniers palestiniens – transaction directement négociée avec l’État d’Israël – redore néanmoins le prestige de I. Haniyeh. À partir de janvier 2012, dans le sillage des « révoltes arabes » et de l’arrivée au pouvoir de gouvernements dirigés par des mouvements islamistes proches des Frères musulmans en Tunisie et en Égypte, I. Haniyeh entreprend une tournée régionale dans plusieurs pays de la région ainsi qu’en Iran.

En novembre 2012, une nouvelle opération militaire israélienne d’envergure qui se termine par la conclusion d’un cessez-le-feu permet à I. Haniyeh et son mouvement d’apparaître, de nouveau, comme la force politique qui compte en Palestine, au dépend du Fatah. Peu après, I. Haniyeh accueille triomphalement, à Gaza, le leader politique du mouvement en exil, Khaled Mechaal, pour célébrer le 25e anniversaire du Hamas. Puis, de très nombreuses personnalités politiques étrangères de premier plan – turques, qataries mais aussi égyptiennes – viennent lui apporter publiquement leur soutien politique. I. Haniyeh est désormais fort de cette nouvelle légitimité internationale.

Depuis les « Printemps arabes », la situation dans la bande de Gaza est néanmoins de plus en plus dépendante du positionnement des acteurs régionaux, ce qui limite d’autant la liberté d’action de I. Haniyeh. La déposition du président égyptien Mohamed Morsi, proche des Frères Musulmans, en juillet 2013, et son remplacement par l'ex-général al-Sissi, entraînent ainsi une politique d’hostilité farouche à l’égard du gouvernement Hamas de la part de l’État égyptien. Le poste-frontière de Rafah, au sud de la bande de Gaza, est fermé très régulièrement, ce qui limite les mobilités des voyageurs et surtout, renforce l’impression d’enfermement des Palestiniens placés sous l’autorité de I. Haniyeh. Dans le même temps, l’ensemble des tunnels qui relient la bande de Gaza à l’Égypte et alimentent en biens de consommation courante et matériaux de construction, de manière informelle, ce morceau de territoire soumis à un blocus sévère de la part de l’État d’Israël depuis 2006, sont détruits. Les conditions de vie économiques et humanitaires des populations de la bande de Gaza se détériorent donc rapidement – ce qui place I. Haniyeh en position de fragilité. C’est dans ce contexte que ce dernier s’accorde, en juin 2014, avec M. Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, pour mettre fin à la partition territoriale et politique entre la Cisjordanie et la bande de Gaza – via la mise en place d’un gouvernement d’union nationale.

Pour en savoir plus, voir l'article Question palestinienne.