Eugene Vincent Craddock, dit Gene Vincent
Chanteur et compositeur de rock américain (Norfolk, Virginie, 1935-Los Angeles 1971).
Gene Vincent fait ses débuts de chanteur dans la marine au milieu des années 1950 et en pleine guerre de Corée. En 1955, à la suite d'un accident de moto, on le démobilise pour lui poser une broche dans la jambe. Il profite de la longue période de rééducation et d'hospitalisation pour perfectionner son chant. Dès sa sortie, il fait le tour des radios country de Norfolk et s'y produit en direct. Un an plus tard, il décide d'envoyer au label Capitol la chanson Be-Bop-A-Lula qu'il a composée avec le disc-jockey Tex Davis et qui figure en face B du single Woman Love. Capitol, qui voit en lui un rival potentiel pour Elvis, son équivalent rockabilly en plus teigneux, le signe à long terme. Le label l'encourage à affirmer cette image de mauvais garçon bardé de cuir et lui décroche un rôle sur mesure dans le film The Girl Can't Help It (la Blonde et moi). Il réenregistre Be-Bop-A-Lula, hit mondial qui se vendra à 9 millions d'exemplaires, avec The Blue Caps (les guitaristes Cliff Gallup et Willie Williams, le bassiste Jack Neal et le batteur Dickie Harrell). À l'époque, et mis à part les Comets de Bill Haley, ils sont le groupe le plus excitant et sauvage qui existe.
Un modèle. Petit à petit, Gene Vincent devient l'objet d'un véritable culte. Partout aux États-Unis et en Angleterre on imite sa tenue vestimentaire, son allure de rocker gominé vêtu de cuir noir et même sa démarche boitillante. Après chaque concert, le matériel, les salles et les hôtels sont dévastés. La voix de Gene Vincent, chanteur à la diction parfaite, à la sonorité enjôleuse ou agressive, devient celle d'une génération, d'un style de vie. Après les hits Race With The Devil (1956), Dance To The Bop, Lotta Lovin'(1957), les Blue Caps se séparent.
Dans une société américaine encore très puritaine, les médias décident de marginaliser le rock afin d'amoindrir son impact néfaste auprès des jeunes. Gene Vincent est du jour au lendemain rejeté par la critique. Il s'exile en Angleterre où l'animateur de télévision Jack Good lui propose de participer régulièrement au spectacle Boy Meets Girl. Comme l'Australie, le Japon et l'Europe sont encore friands de « vrais rockers américains », il s'y produit sans relâche….
La fin du rêve. En avril 1960, lors d'une tournée anglaise avec son ami Eddie Cochran, il est sévèrement blessé dans un accident de taxi. Cochran y trouve la mort. Gene Vincent, lui, sombre peu à peu dans l'alcoolisme. Son entourage redoute son comportement imprévisible et ses divorces à répétitions (4). Immanquablement, sa carrière suit le même chemin et il doit se contenter de timides hits anglais (Pistol Packin'Mama) et d'un public de teddy boys dans les pubs. En 1969, le (futur) célèbre D.J. John Peel le signe sur Dandelion, son label. La sortie américaine se fera dans la plus grande indifférence. La même année, il fait une apparition au Festival de Toronto aux côtés du Plastic Ono Band, de Jerry Lee Lewis et de Bo Diddley.
Malgré une douleur grandissante et faute d'argent, il ne se fera pas amputer de sa jambe. Complètement ruiné, il retourne chez son père en septembre 1971. Il y tombe malade et succombe à une hémorragie interne provoquée par un ulcère du foie. Ce personnage culte à la carrière inconstante est devenu une légende. Il symbolise encore aujourd'hui pour le public l'esprit pur et dur de la rébellion rock.