Alfred Duvaucel

Naturaliste et voyageur français (Paris 1793-Madras 1824).

Beau-fils de Cuvier, avec lequel sa mère s'est remariée en 1804, Alfred Duvaucel subit l'influence du grand naturaliste : s'il fait sa médecine, il s'intéresse surtout à l'étude de la faune et rêve aux animaux rares que pourraient lui faire découvrir des voyages lointains. En 1817, ses désirs se réalisent ; il est envoyé en mission en Inde par le Muséum national d'histoire naturelle de Paris. À Calcutta, il retrouve Pierre-Médard Diard (1794-1863), comme lui naturaliste et formé à l'école de Cuvier. Tous deux décident de s'installer à Chandernagor (au Bengale), alors possession française, où ils louent une maison qu'ils remplissent de squelettes, d'animaux empaillés ou même d'animaux vivants, capturés par eux ou dons de rajahs des environs. Avec une ardeur fébrile, ils chassent, empaillent, décrivent ou classent les spécimens destinés au Muséum. Ils enverront notamment à Paris une tête de « bœuf du Tibet » (yack) disputée aux chacals, un squelette de dauphin du Gange, un jeune bouc du Cachemire, deux faisans cornus et quelques autres oiseaux rares.

En 1818, le gouverneur anglais de Benkoelen, dans l'île de Sumatra, leur propose de les emmener avec lui et à ses frais dans les îles de la Sonde ; ils y poursuivraient leur collecte d'animaux et de plantes tandis que lui accomplirait les missions diplomatiques dont son pays l'a chargé. Les deux amis acceptent. En compagnie de Stamford Raffles, ils partent donc et visitent d'abord l'île de Penang, où ils recueillent quelques animaux intéressants, parmi lesquels deux espèces inconnues de poissons et quelques oiseaux remarquables. À Singapour, les naturalistes français se heurtent à la suspicion des autorités quand ils posent des questions concernant la faune locale, alors que les Anglais, qui ne songent qu'à mettre la main sur l'île – ils s'en empareront effectivement en 1819 – sont beaucoup mieux reçus. Près d'Achem, à la pointe nord-ouest de Sumatra, Diard est cerné dans la jungle par deux cents Malais qui le dépouillent du fruit de sa chasse, de ses armes et de ses bagages. À Malacca, après bien des efforts, Duvaucel et Diard se font céder par les habitants un ours, un tigre, un argus (grand faisan des forêts de Malaisie), et, par le gouverneur hollandais, un orang-outang qu'il retenait captif. D'escale en escale, ils finissent par rassembler de nombreux spécimens d'animaux. Cependant, ils se brouillent avec Raffles qui, lors de la séparation, à Bankoelen en août 1819, revendique pour son pays la majeure partie du matériel collecté.

Après avoir expédié à Calcutta ce qu'ils ont pu garder, les deux amis, surmontant leur déception, se disposent à reconstituer leurs collections. Pour diversifier celles-ci, ils se séparent, momentanément pensent-ils. Tandis que Diard va explorer Batavia, Duvaucel part en avril 1820 pour le Padang, région de l'intérieur de Sumatra. Il en revient et débarque à Chandernagor avec quatorze grandes caisses d'animaux empaillés et de squelettes ainsi qu'avec plusieurs singes vivants. Il songe un moment à regagner la France, mais il appartient à cette race intrépide de voyageurs scientifiques du xixe siècle prêts à braver tous les dangers pour enrichir les collections de leur pays. Il se rend au Bengale (aujourd'hui partagé entre l'Inde et le Bangladesh). Il ramène à Calcutta de nombreux autres spécimens d'animaux, mais aussi une fièvre tenace qui s'apparente à la malaria. Il meurt à Madras à la fin d'août 1824 sans avoir revu la France.