Didier-Georges Gabily

Auteur dramatique, metteur en scène de théâtre et romancier français (Saumur 1955-Paris 1996).

D’abord comédien à Tours et à Paris, il écrit ses premières pièces et réalise ses premiers spectacles au Centre théâtral du Maine, au Mans, entre 1981 et 1983. Accueilli ensuite par certaines grandes structures du théâtre subventionné, il monte les pièces des auteurs qu’il aime (Claudel, les tragiques grecs) avant de fonder en 1989 sa troupe, le groupe T’Chan’G, ce qui lui permet de mettre lui-même en scène ses propres textes et d’imaginer un style de jeu, physique, brutal, tragique, que les interprètes – réunis autour d’une pratique du théâtre partiellement inspirée par les théories d’Antonin Artaud – exploiteront de spectacle en spectacle.

Pour tous, acteurs et spectateurs, les cadres habituels de la représentation explosent au profit d’un art de la démesure. Violences (1991), diptyque qui donne à la vie conflictuelle d’une famille d’aujourd’hui la dimension d’une féroce guerre mythologique, dure sept heures (Corps et Tentations suivi de Âmes et Demeures). Les œuvres suivantes sont aussi de vastes fresques où la violence des temps anciens vient se mêler à la violence de l’ère moderne : Enfonçures (1993), « oratorio » où l’auteur oppose le silence de Hölderlin et le fracas de la guerre du Golfe ; Chimère et autres bestioles (1994) ; Gibiers du temps (1996) ; Théâtre du mépris 3 (id.).

Fragilisé par une activité intense, à laquelle sa troupe est sans cesse associée, et le refus de toute prudence, il meurt à l’âge de quarante ans, sans avoir réalisé l’un de ses projets, qui associe le Dom Juan de Molière et son texte Chimère et autres bestioles. Il laisse alors une pièce inédite, Événements, publiée en 2008, où il réinvente rageusement la révolte de mai 68 en se plaçant du côté des ouvriers.

Défini par l’essayiste Bruno Tackels comme « un voyant de la langue », il a aussi écrit des romans et récits : Physiologie d’un accouplement (1988), Couvre-feux (1990), l’Au-delà (1992). Il a marqué profondément toute une génération d’artistes autant par ses œuvres que par son enseignement, à commencer par les metteurs en scène qui ont fait leur début à ses côtés, tels que Jean-François Sivadier et Yann-Joël Collin. Il reste le symbole d’un théâtre du refus, désireux de mettre en cause dans un même mouvement le théâtre conventionnel et la société du profit.