Charles Pérez
Zoologiste français (Bordeaux 1873-Paris 1952).
Charles Pérez, fils d'un zoologiste, manifeste dès l'enfance un goût très vif pour les animaux. Afin de satisfaire sa curiosité, il consulte les ouvrages d'histoire naturelle à sa portée, mais ceux-ci ne répondent pas toujours à son attente. Devenu chercheur, il étudie les métamorphoses des insectes pour essayer de résoudre quelques-uns des problèmes qui l'intriguent. Comment et pourquoi la chenille se transforme-t-elle en un insecte qui n'offre pas la moindre ressemblance avec elle ? Comment un être vivant peut-il se modifier, se remanier d'une façon aussi complète, en abandonnant des organes, tel le têtard qui perd sa queue ; en se fabriquant des organes nouveaux, tel le papillon qui acquiert des ailes aux riches couleurs ?
Il montre que c'est la phagocytose qui permet de faire disparaître les organes caducs, exclusivement caractéristiques de la larve. Il établit que la destruction des parties phagocytées est totale, que rien n'y échappe. Les anciens noyaux des cellules sont « frappés de déchéance définitive » ; ils meurent et sont digérés dans les phagocytes. Leur matière, en tant que substance chimique assimilable, peut être réemployée pour la nutrition des organes en voie de développement chez la nymphe, mais il n'y a jamais utilisation telle quelle pour l'édification des nouveaux tissus. Pendant la nymphose, c'est-à-dire lorsque l'insecte se trouve dans son enveloppe de nymphe, tout ce qui est très spécialisé chez l'insecte parfait se différencie entièrement à nouveau, à partir d'éléments tissulaires dont la première origine remonte à la période embryonnaire ; ces éléments sont restés, en quelque sorte, à l'état de vie latente durant la période larvaire.
Charles Pérez était de cette race d'hommes animée par la passion de comprendre et le désir d'expliquer. Quand, à l'approche de la cinquantaine, il devient directeur de la station biologique de Roscoff, en Bretagne, il apporte la même ardeur à l'étude de la faune marine qu'auparavant à celle des insectes. Il s'intéresse tout particulièrement aux parasites des crustacés décapodes – c'est-à-dire à cinq paires de pattes marcheuses. Au cours d'excursions répétées sur les mêmes grèves, et de fréquents dragages renouvelés tout le long de l'année sur les mêmes fonds, il récolte en abondance certains crabes et bernard-l'ermite. Avec son équipe, il examine les animaux un par un, les dissèque au besoin, établit un recensement par sexe, par âge, etc. Ces travaux méthodiques lui fournissent de précieuses indications sur le rapport numérique des sexes, sur l'évolution saisonnière de la population et, par suite, sur la durée de vie individuelle des crustacés et de leurs parasites. Ainsi, pour le crabe oxyrhynque, Macropodia rostrata, il constate que les jeunes arrivent sur les fonds de dragage vers le mois de février, qu'ils atteignent la maturité sexuelle au début de l'été, se reproduisent jusqu'à l'hiver, et qu'une mortalité massive atteint les vieux adultes en avril. La vie individuelle postérieure à la période larvaire ne dure donc guère plus d'une année. Il s'ensuit que la sacculine, le parasite de ce crabe, ne vivra pas au-delà de ce laps de temps.
Pérez a donné de minutieuses descriptions de parasites peu ou pas connus jusqu'alors, avec toutes les formes qu'ils affectent au cours de leur existence. Il a aussi étudié les perturbations qu'ils provoquent chez leurs hôtes, et notamment les répercussions qu'ils ont sur la vie sexuelle de ceux-ci : il a observé, par exemple, que l'épuisement général dû à la présence des parasites se manifeste directement par une diminution ou même une suppression de la fécondité. (Académie des sciences, 1935.)