Berthe Albrecht, dite Berty Albrecht

Berty Albrecht
Berty Albrecht

Résistante française (Marseille 1893-Fresnes 1943).

1. Pionnière de la lutte pour les droits des femmes dans les années 1930

Née dans une famille de la grande bourgeoisie d'affaires, protestante, Berthe Wild fait des études classiques au lycée Montgrand de Marseille, puis à Lausanne où, en 1911, elle entreprend des études d’infirmière. Jeune diplômée, elle part pour Londres comme surveillante dans une pension de jeunes filles.

Dès le déclenchement des hostilités de la Première Guerre mondiale, elle rentre à Marseille où elle joue un rôle important en tant qu’infirmière de la Croix-Rouge dans des hôpitaux militaires.

Repartie à Londres, elle y rencontre Frédéric Albrecht, un banquier néerlandais, qu'elle épouse en 1918 et dont elle aura deux enfants. Dans la capitale britannique, Berty (prénom parfois orthographié Berthie) apprend l’existence de l’Union sociale et politique des femmes – dirigée par Sylvia Pankhurst, la fille d’Emmeline Pankhurst – découvre le mouvement pour la planification des naissances et entre en contact avec le Mouvement pour la réforme sexuelle. Son militantisme pour ses deux causes, très éloigné du style de vie bourgeois que mène son mari, la pousse à se séparer de ce dernier.

Installée seule à Paris en 1932, Berty fait la connaissance de Léon Blum, de Maurice Thorez, et se lie d’amitié avec Victor Basch, président de la Ligue des droits de l'homme, à laquelle elle adhère. En 1933, elle lance une revue trimestrielle, le Problème sexuel. Morale, eugénique, hygiène, législation, dans laquelle elle défend notamment le droit des femmes à l'avortement.

2. L’engagement antifasciste

Dès les premiers signes de la montée du péril fasciste et nazi en Europe, Berty Albrecht met en place un Comité pour l’accueil des réfugiés antifascistes (juifs et opposants politiques) afin de leur procurer argent, logement et travail. Elle vient également à l'aide d'Espagnols républicains exilés en France. Dans son appartement, transformé en centre d’accueil où se côtoient libres-penseurs, francs-maçons, représentants de la gauche et de l’extrême gauche, a lieu, en 1934, sa rencontre, décisive, avec Henri Frenay, malgré leurs profondes divergences politiques.

3. La résistante

Entrée à l’été 1936 en formation à l’École des surintendantes d’usine, elle est affectée deux ans plus tard aux usines Barbier-Bernard et Turenne, qui fabrique des instruments d’optique pour la Marine. Mobilisée pendant la guerre en tant que surintendante à la manufacture d’armes de Saint-Étienne, elle entre, après l’armistice de juin 1940, comme surintendante aux usines Fulmen à Vierzon et profite de cette situation pour faire passer la ligne de démarcation à des prisonniers évadés.

Après avoir retrouvé en décembre 1940 à Vichy Henri Frenay, alors au 2e bureau de l’état-major de l’armée, elle commence à dactylographier les premiers bulletins de propagande du Mouvement de libération nationale (MLN) fondé par celui-ci. Chargée de mission par le ministère de la Production industrielle et du Travail, Berty Albrecht emménage en mai 1941 à Lyon, où elle rejoint Frenay qui a démissionné de l’armée pour se consacrer entièrement au MLN : celui-ci devient Combat en décembre 1941. À Villeurbanne, elle découvre l’imprimeur Joseph Martinet, le premier qui prend le risque de tirer le journal Les Petites Ailes à 2 000 ou 3 000 exemplaires, puis Vérités, à partir de septembre 1941.

Arrêtée à la mi-janvier 1942 avec une quarantaine de militants de Combat, elle est rapidement relâchée. Arrêtée à son domicile par la police du gouvernement de Vichy fin avril 1942, elle est internée à Vals-les-Bains, en Ardèche. Ayant entamé une grève de la faim, elle est transférée à l'hôpital d'Aubenas avant d’être incarcérée à la prison Saint-Joseph de Lyon (octobre), où elle apprend qu’elle est condamnée à six mois de prison. Elle simule alors la folie et entre en novembre à l'asile d’aliénés du Vinatier, à Bron, où un commando du mouvement Combat parvient à la libérer (23 décembre).

Épuisée mais demeurant sourde aux alertes de ses proches qui lui conseillent fortement de rejoindre Londres, elle se réfugie chez les parents de Danielle Gouze (future Danielle Mitterrand) à Cluny (Saône-et-Loire) et reprend ses activités clandestines avant d’être de nouveau arrêtée par la Gestapo le 28 mai 1943. Torturée et transférée à la prison du Fort Monluc à Lyon puis à Fresnes (31 mai), elle se donne la mort par pendaison. Inhumée le 11 novembre 1946 dans la crypte du Mémorial de la France combattante au mont Valérien, Berty Albrecht compte parmi les six femmes nommées Compagnons de la Libération (→  ordre de la Libération).

Pour en savoir plus, voir l'article la Résistance.